Tag Archives: Jean-Paul Belmondo

WEEK-END A ZUYDCOOTE =+

11 Juin

Les détracteurs du Dunkerque de Nolan ont trouvé dans ce film une vengeance. Basé sur le premier roman (homonyme) de Robert Merle, Week-end à Zuydcoote représente les allées-et-venus d’un groupe de soldats français et britanniques pendant la bataille de Dunkerque (juin 1940). Il déploie des moyens importants, visibles lors des scènes de bombardements. Belmondo (déjà dirigé par Verneuil deux ans avant pour Un singe en hiver), alors acteur très populaire en passe de devenir emblématique, joue un sergent-chef détaché au maximum dans pareilles conditions (il rate même des occasions de fournir ses cascades typiques).

C’est la principale référence du spectateur et une manière pour lui de traverser ces plages sans se laisser accabler. À Julien comme à nous d’apprécier l’abondance d’ironies tragiques offertes par les circonstances. Cette distance ne gâche ni l’intensité ni la pertinence du film ; l’interprétation de Belmondo porte ses limites. Ses laïus d’humanitaire gouailleur et de sceptique gentil ne poussent jamais bien loin. Même traitement pour ses accès héroïques, possiblement contradictoires. Il se met bientôt à éprouver Dieu de ses sarcasmes, toujours nonchalamment, en s’échauffant lentement face au curé engagé ; c’est comme s’il liquidait ses stocks. À force de survoler la situation (sans aller jusqu’à entrer dans le déni joyeux façon La vie est belle) son personnage manque de naturel et de consistance, reflète mal les émotions fortes, les drames ou les urgences.

Le réalisme du film est contrarié non par la légèreté, mais par des écarts symboliques ou démonstratifs. Le comique est omniprésent mais ne relève pas du troupier habituel – quand il se fait franc, il s’exprime par exemple au travers de Dhéry (Pierre Mondy), au fort instinct de conservation à la tournure grotesque (surtout en instants de paix), ou encore en rabaissant sèchement les anglais (avec leur thé, leur suffisance et leur rigidité). Le spectacle est fluide et un peu random, sans fil narratif interne ; les hommes et leurs décisions sont déterminés par le flot d’événement ; la menace constante est ce fil conducteur au-dessus de tous les autres, rationnel mais imprévisible.

Loin des élucubrations pacifistes ou des poses de désabusés, le film conforte l’idée qu’on ne fait pas la guerre sans se « salir les mains » et montre quelques exactions de l’équipe locale sur son propre terrain. La plupart sont mineures et même banales ; en relève, le cynisme face aux macchabées tout frais, qui est aussi une façon de relativiser l’horreur et d’ailleurs ne pousse pas à trahir l’effort d’encadrement civilisé (concrètement, les passages de camions pour débarrasser proprement le chantier). Enfin il peut être compliqué de démêler ce qui relève de l’éventuelle hystérie de Jeanne ou d’une mollesse de direction d’acteurs ou d’écriture. Les dernières scènes avec Catherine Spaak sont à la limite du théâtre ‘low-cost’ ; mais cette note improbable aussi a son charme, bien que contrairement aux autres dans le flou, celle-là semble purement et strictement opportuniste – comme une fantaisie réconfortante.

Note globale 62

Page IMDB + Zogarok sur SensCritique

Suggestions… L’Homme de Rio + Les Égarés/Téchiné + Les Mariés de l’an II

Scénario/Écriture (2), Casting/Personnages (3), Dialogues (3), Son/Musique-BO (-), Esthétique/Mise en scène (3), Visuel/Photo-technique (4), Originalité (3), Ambition (4), Audace (3), Discours/Morale (-), Intensité/Implication (3), Pertinence/Cohérence (2)

Note arrondie de 61 à 62 suite à la mise à jour générale des notes.

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LE DOULOS =+

1 Nov

le doulos

Troisième film noir à la française de Melville, après Bob le flambeur (1956) et Deux hommes dans Manhattan (1959), Le Doulos marque une accélération dans la carrière du cinéaste (futur auteur du Cercle Rouge, du Samouraï et de L’armée des ombres). Écrit et tourné avec empressement, ce polar innovant va retenir l’attention de nombreux cinéphiles et ouvre une série de films qui ont profondément marqués des cinéastes comme John Woo, Tarantino ou Winding Refn. Les concepteurs de la Nouvelle vague française (Truffaut en tête) se réjouissent et Melville devient un de leurs référents.

Le Doulos (‘chapeau’ en argot et ‘indicateur de police’ pour les flics et les malfrats) est caractérisé par des manières à la fois éthérées et violentes, les liens retors entre le banditisme et les forces de l’ordre, le cynisme, voir l’aigreur active de cette combinaison d’univers. L’air est lourd dans le Paris du Doulos, la capitale semble située dans les limbes, les espaces sont étriqués. Le spectateur n’est pas tenu par la main ni rassuré par des repères clairs : aucun manichéisme et surtout, une absence d’ambitions réalistes, soulignée par le récit très éclaté et une propension à la pose solennelle (dont Serge Reggiani est l’objet privilégié). Admirateur de certains cinéastes classiques (Wyler surtout) et férus des films bis à base de gangsters, Melville est un styliste tourné vers l’Amérique.

Il rend cette fois clairement hommage au film noir américain et tend à le pasticher. Le commissariat est calqué sur celui de Carrefours de la ville (pré-film noir de 1931) avec Gary Cooper, des éléments anglo-saxons sont introduits (les fenêtres à guillotine). Parmi les quelques ‘gueules’ habitant ce film élégant, Belmondo trouve un de ses rôles les plus marquants : sa fausseté n’est obscène qu’à de rares moments (simulations de la douleur), dans l’ensemble sa présence en fait une pièce complémentaire au climat général. Jouant ironiquement le gentleman pour ses victimes, c’est au milieu des prédateurs pessimistes un parfait salaud immature, pétillant et bluffeur, accroché à quelques artefacts romantiques. Il est la décevante once de lumière, infantile et sans mystère.

Note globale 68

Page Allocine & IMDB   + Zoga sur SC

Suggestions… A bout de souffle + Casque d’or + Mélodie en sous-sol 

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Scénario/Écriture (3), Casting/Personnages (3), Dialogues (3), Son/Musique-BO (4), Esthétique/Mise en scène (4), Visuel/Photo-technique (4+), Originalité (3), Ambition (4), Audace (4), Discours/Morale (-), Intensité/Implication (3), Pertinence/Cohérence (3)

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MINI FILMS Mai 2021

28 Juin

Notes complémentaires comme pour le mois précédent, ramassées en une formule : Consistance (ou écriture), Formelle, Intensité (ou force) ; Perspective (ou pertinence), Style, Sympathie.

Bandits, bandits… **** (UK 1981) : Merveille d’imaginaire en roue libre avec de grandes inspirations visuelles. Comme en atteste le Jean-René Haut-Bourgeois en guise de Dieu et la liquidation des parents infects, c’est une tentative d’évasion spirituelle d’enfant. La réinterprétation de Napoléon laisse un doute sur les capacités des scénaristes mais la bêtise et l’humour nul, encore prégnants dans le recyclage de Robin des bois, n’entament rien du charme de cette fuite rocambolesque relevant du rêve éveillé. Notes : 678-699. (82)

L’alpagueur ** (France 1976) : Polar quelconque et efficace avec Belmondo. Bruno Crémer est génial. Notes : 566-656. (58)

Money monster ** (US 2016) : Démonstration finalement futile, déresponsabilisant les salauds hystériques (le terroriste et le bouffon influenceur) qui ne sont que les jouets ‘du système’ – lequel ne crève jamais, avec la complicité passive du peuple comme des journalistes qui doivent bien persévérer dans leurs petits circuits plutôt que partir en croisade (or on est dans une situation légitime voire ‘tautologique’ donc le film ne sait plus trop quoi dire et renonce fondamentalement avant même de boucler). Notes : 556-545. (48)

The Humanity bureau * (Canada 2018) : Film d’anticipation jamais décidé à aller au bout de ses idées (ces survivants ne servent à rien) ; sans doute par manque de temps et de moyens il végète autour de cette volonté d’exfiltrer la mère et son fils. J’ai aimé ces images d’une élite tétanisée par le potentiel chaos et l’explosion de rage des brebis brutales – mais ce film est trop superficiel pour aller au-delà d’intuitions fixes, d’images sans histoires spécifiques. Notes : 344-555. (42)

Au bonheur des dames ** (France 1930) : Adaptation [de Zola] par Duvivier à la fin du muet. Mise en scène dynamique aux antipodes du huis-clos Marie-Octobre. De la place pour l’amourette et pour les tableaux de mœurs sociales ; la tension entre les petits et le grand commerce se réduit à son intérêt scénaristique et une compassion convenue. Notes : 776-656. (62)

Que Dios nos perdone *** (Espagne 2016) : Une conscience élevée des situations de proximité gênante entre humains. Tous les personnages clés sont des abrutis ou des ordures. Notes : 767-666. (66)

Red Rock West ** (USA 1993) : Du ciné cowboys un brin retardé avec un trio monumental. Scénario désespérément prévisible et tapant toujours bas. Notes : 367-266. (56)

 

Mini-Critiques : 2021: Avr, Mar, Fev, Jan. 2020: Dec, Nov, Oct, Sept, 15, 14, 13. 2019: 12, 11, 10. 2018: 9, 8. 2017: 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1

Mini Courts : 2020, 4, 3, 2, 1

Mini Revus : 2ou2020, 1

Mini Mubi : 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1. Courts & moyens Mubi : 4, 3, 2, 1

 

MINI-CRITIQUES 8 (2018-1)

5 Mar

Hook ou la revanche du capitaine Crochet ** (USA 1991) : Signé Steven Spielberg et doté d’un gros casting (avec Julia Roberts en fée et Dustin Hoffman en capitaine pirate). La morale et les moments avec les enfants prêchent chacun à leur façon pour une morale et une joie humbles et conventionnelles, prenant l’imagination comme opium. La séance est sympathique mais prévisible en tous points. Ni fausses notes ni grands et beaux moments. Robin Williams montre encore, encore, l’étendue de ses talents, tout en paraissant exactement le même. (56)

Your Name. ** (Japon 2016) : Néglige la cohérence de son concept et parfois même le corrompt au bénéfice de surenchères ‘romcom’. Très joli et plutôt agréable, mais gâché par ses préférences infantiles. (62)

Vape Wave * (Suisse 2016) : Documentaire diffusé sur LCP, pas sorti en salles mais projeté dans plusieurs pays, pris en charge par Jan Kounen (narrateur ‘cobaye’ et réalisateur). Les saynètes et les effets, puis les laïus d’effarouchés, dominent les faits et l’éclairage (brut, amélioré ou approfondi, peu importe). Le vapotage est présenté comme une pratique mal perçue, accablée par des fantasmes relayés par les médias, parfois persécutée. Les fumeurs également sont plaints – ils sont victimes de ces gens et organisations n’acceptant pas encore que la vie puisse être douillette. La séance est un mélange de conventionnalisme, de foires d’egos en douce et d’exercice de style en roue-libre ; la véracité est d’autant plus sujette à caution.

Mais en tant que film ou même clip et non documentaire, Vape Wave montre régulièrement une marque propre et le talent créateur de Kounen (qu’on apprécie ou pas ses applications et ses motifs – je ne les ai pas appréciés). Malheureusement cela représente une petite portion, concentrée au début (et dans le futur). Le reste est une publicité à peine masquée, ou une propagande de service public et/ou de collaboratifs ‘consciencieux’ socialement, avec toujours un ton infantile, complice, secrètement d’un sérieux absolu et plombant (régressif). Les petits sketchs sont forts mous, l’imitation par Kounen de la ministre de la santé est un bonheur soudain. Enfin tout ça aurait pu être massivement raccourci. (38) 

La vie de château ** (France 1966) : Comédie de Rappeneau où la jeune Deneuve n’est pas gâtée par son personnage (bien qu’elle-même soit flattée par les hommes – au point d’attirer une exultation troupière, incompatible avec les mœurs ‘anti-sexiste’ 52 ans plus tard). Le film a des points communs avec Papy fait de la résistance mais n’est pas si chargé que lui. Sa légèreté le tire parfois vers la mollesse. Personnages ‘mono’ mais sympathiques. (62)

Star Wars – L’empire contre-attaque *** (USA 1980) : J’ai apprécié le premier opus la semaine précédente, également vu lors de sa diffusion sur TF1. Je sais que cet opus au moins ne fera jamais partie des films que j’aime ou respecte particulièrement, mais j’ai bon espoir pour les deux suivants, qui semblent dotés de ce qui manquait ici – les décors fastes, les arguments déjà réglés pour l’épopée.

Le 2e ou 5e épisode est effectivement supérieur en terme de mise en scène et de divertissement. C’est du grand spectacle, sans les côtés boiteux du premier. Cet opus est relativement sombre, très vif, comblera celui qui se laisse aller. Les décors, la photo (les couleurs !), les gadgets sont remarquables. Les personnages emblématiques gagnent en épaisseur : Yoda est une excellente recrue, qui déniaise un peu les tendances religieuses ou à défaut les étoffe ; Dark Vador gagne en charisme, sa mission et son passé se définissent. En revanche les personnages du groupe principal ratent leur décollage : les deux robots piétinent, la princesse et Harrison Ford entretiennent une relation un peu absurde, mais individuellement ils affinent leurs styles. Chewbecca est superflu mais son incongruité finit par le rendre bienvenue (ses grognements ressemblent à des pleurs d’autiste). Je comprends toujours mieux l’adhésion à Indiana Jones mais j’ai cette fois franchement (même si légèrement) aimé, tout en y voyant de nombreux défauts et pas l’ampleur d’une épopée culte à ce point, notamment lors des combats. (68)

Scoop ** (USA 2006) : Vu à la télé, comme tous les autres sur cette liste à l’exception de Your Name et de Slaughterhouse. Woody Allen est très drôle, parfois sa satisfaction personnelle est un peu trop visible et parasite la vraisemblance (idem pour Joansson, son amusement déborde au bar par exemple). Séance très plaisante, même si le scénario est assez fainéant surtout pour conclure et pour renforcer le réalisme (un millionnaire doublé d’un probable tueur en série se montre si insouciant, ne cherche ni n’obtient d’informations sur cette fille sortie de nulle part ?). (58)

Hatchi *** (2010) : Inspiré d’une histoire réelle, produite au Japon début XXe, transposée aux USA. Le protagoniste humain est joué par Richard Gere, c’est un gentil petit-bourgeois, un professeur de piano épanoui habile au barbecue comme dans sa petite société. Il connaît tous les gens de son circuit quotidien et ne montre jamais d’émotions négatives ou antagonistes : un véritable ravi de la crèche avec le cadre assorti. Et c’est tant mieux. Le film est très niais, mais carrément niais, sans trembler – de la niaiserie pour enfants et pour gens qui ont vieilli et du tire-larmes efficace pour tout le monde. Offre quelques vues subjectives du chien (noir et blanc et couleurs altérées). (68)

La taverne de l’irlandais *** (USA 1963) : Positif comme le précédent, sans la tristesse. Se gâte un peu après la rencontre avec le père, soit au bout d’1h10 environ. Finalement John Wayne vaut bien Gabin (mais c’est une confirmation, pas une révélation). Le personnage de Lee Marlin est insupportable et méritait ce qu’il s’est ramassé ; dans l’ensemble, ce film est plein de justes leçons. Un ‘feel-good movie’ à sa façon, signé John Ford, l’auteur du populiste Les raisins de la colère. (72)

Le Cid *** (USA 1961) : Une adaptation très ambitieuse (de Corneille), superproduction de trois heures avec une foule de figurants, de décors, de couleurs éclatantes (Technicolor). Un excellent film de cape et d’épées, excellent film de type ‘saga’ ou super-soap aussi (rétrospectivement). C’est un grand plaisir jusqu’au-moment où la lassitude l’emporte – elle n’a plus qu’a grignoter doucement le reste du temps. C’est aussi un des derniers films dirigés par Anthony Mann, meilleur que les autres que j’ai vu de lui (Je suis un aventurier, Les Affameurs). (68)

Ulysse ** (Italie 1954) : Représentation directe (à tous points de vue – voilà un [relatif] péplum de moins de deux heures), théâtrale au début, charmante, avec une tendance à la mollesse (mais jamais au point de ‘lâcher’ vraiment). Face-à-face Quinn/Douglas comme dans Le dernier train de Gun Hill cinq ans plus tard. (62)

La Fin des temps *** (USA 1999) : Schwarzenegger vs Satan incarné. Humour grotesque, héros devenu cynique et voué à se racheter, degré premier ou zéro – qui déplaît puisque la religion est dans l’équation. J’ai aimé et me suis amusé. Les interprètes sont très bons (comme à leur habitude). Premier vu de Peter Hyams. (66)

Rescue Dawn **** (2007) : Un film d’Herzog passant à la télé hors-arte et même sur NRJ12 ! Cette anomalie est due à la présence d’un acteur AAA, Christian Bale. L’enrobage est légèrement plus classique (photo, mise en scène, montage, même la musique) à cause des parties impliquées dans la production. Le début et la toute fin ramènent aux joies (diverses) du troupier, le reste est un dur égarement dans la jungle. Les militaires (et autres) ne sont pas présentés de façon manichéenne ou idéaliste. L’excentricité du personnage principal (Dieter Dangler) est plus flagrante que dans le documentaire lui étant consacré précédemment réalisé par Herzog (Petit Dieter doit voler). Cette excentricité n’implique pas d’aberrations. Excellent film de survie dans la jungle, de détention (puis d’évasion), sur la démence. 400e noté 8/10 sur 3583 films sur SC. (78)

Riens du tout *** (France 1992) : Premier film tourné par Klapisch, dont je ne suis pas client, ni la cible. Satire du monde de l’entreprise et de ses petites mains. Léger et piquant, archétypes efficaces (assez ridicules et assez vraisemblables). Les ‘casseurs’ (des cracheurs dans la soupe) sont présentés positivement puisqu’ils sont les seuls à avoir du recul, même si c’est par névrose pour certains. Le jeune faux loubard, sorte de fil narratif par défaut, est dans ce cas ; je l’ai trouvé méprisable, comme son camarade négativiste et le crétin professeur de musique. Le film garde tout de même une certaine lucidité même sur ces sales gosses qui ont le bon rôle. M’a tout de même semblé légèrement ‘long’ pour un film d’1h30, sûrement car on se fatigue de l’effet catalogue. (64)

Le Capitan ** (France 1960) : Sorti dans la foulée du Bossu, avec les mêmes arguments. M’a paru radicalement meilleur, quoique s’englue aussi – les aventures valent mieux que les intrigues. Le duo Bourvil/Marais fonctionne et les farces de Bourvil sont efficaces, dans un registre enfantin et bouffon. (58)

Ennemis rapprochés ** (USA 1997) : Tandem Ford/Pitt, dirigé par Alan J.Pakula, spécialiste du thriller judiciaire/politique et auteur du fameux Les Hommes du Président. Un peu policier, un peu sentimental, un peu action, très ‘dramatique’ dans le ton et sans grand intérêt. Malgré des atouts supérieurs, a la même valeur pour le spectateur ou consommateur qu’un téléfilm amorphe et correctement ficelé. Une chose plaide pourtant en sa faveur : ces personnages réalistes, qui ne semblent pas tirés des conventions du cinéma et ne font jamais ‘tache’, médiocres ni caricaturaux (idem pour le récit, moins pour la façon de le présenter et dérouler). (46)

9 mois ferme ** (France 2013) : Sixième film tourné par Dupontel, druckerisé et donc loin de la fureur de Bernie, mais regonflé par rapport au Vilain. Son duo avec Kiberlain est excellent, le lourdaud/victime tient un numéro amusant. Court et efficace, sauf sur la fin, gâtée par les sentiments. Mise en scène colorée, avec quelques emballements [heureux] pour passer des propos lourds. (62)

Cartouche *** (1964) : Une des collaborations Broca – Belmondo, deux ans après le jubilatoire Homme de Rio. Inspiré d’un personnage réel du XVIIIe, sorte de ‘robin des bois’ et de terreur, dont on retient ici le potentiel affable et romantique. Interprétations très affectées. Fait le choix des sentiments voire de la tragédie dans la dernière partie, autour du cas de Claudia Cardinale. Énergique, film d’aventures enthousiasmant le reste du temps, quoique laissant peu de traces. Film de cape et d’épées à gros budget bien visible dans tous les cas, malgré des légèretés dans la mise en scène. (64)

Le choix des armes ** (1981) : Réuni Deneuve, Big Gérard et Yves Montand, sous la direction d’Alain Corneau (Série noire, Police Python 357, Crime d’amour). Beaux ou bons décors, quelques séquences remarquables autour du trio (romantiques avec Deneuve/Montand, ou explosives avec Depardieu – comme le passage à la station-service). Trop long. (58)

Slaughterhouse, l’abattoir de l’angoisse * (1987) : Slasher digressant depuis le cas célèbre déjà source d’inspiration de Texas Chainsaw Massacre (1974). La mise en place avec les prétendus ados est fausse et régressive d’une manière qui démoraliserait les parodistes. Une part de farce cohabite avec la franche horreur. Tout un univers passe autour de cet abattoir et d’un filtre cochon, mais le décollage et l’approfondissement n’auront pas lieu. Il reste le travail sur la musique, les cris de cochons, le duo de cinglés et des petites références pour gourmets et goreux (‘la fête du porc’, l’anecdote des empreintes digitales douloureuses). Le complément du titre est spécifiquement français. (42)

Fast & Furious : Tokyo Drift * (2006) : Premier F&F antérieur au 5e que je découvre. Très kitsch (dialogues, relations). Du Crash pour fans de tunning. Quelques bizarreries de continuité. Trop léger et répétitif, juste deux-trois ‘tournants’ dans l’histoire. (32)

Fast & Furious 7 ** (2015) : Après deux opus mieux réputés (ceux que j’ai vu, en plus de Tokyo Drift), la réalisation a été confiée à James Wan. Cet épisode est d’un niveau supérieur aux précédents, également aux autres productions de masse ou franchises dans le domaine de l’action-movie. La photo et les effets spéciaux sont assez brillants tout en étant communs. Le film est souvent simpliste pour soutenir son déroulement et l’introduction de gadgets. Il vire en mode BD avec des sauts d’immeuble ou le débarquement surréaliste à la montagne et retrouve de la beauferie (bling-bling) à Abu Dhabi. Il contient beaucoup de moments sentimentaux, lourds sans être indigents, jusqu’à la diapo où frère Diesel ressasse sa relation avec frère Brian – aka Paul Walker, acteur décédé sur le tournage. (62)

Libre comme le vent ** (1958) : Western sur la forme et drame en pratique, avec les aléas relationnels d’un Steve au centre (Robert Taylor) – avec son frère (John Cassavetes), avec une nouvelle arrivante (Julie London) et dans une moindre mesure avec la communauté. Court et lourd, conventionnel dans ses procédés et ses jugements plutôt que vraiment niais. Animalise un peu le Tony, comme une sorte de nerveux malfaisant et fébrile. Joli habillage. (58)

10 canoës, 150 lances et 3 épouses * (Australie 2006) : (concours de) Bites à l’air libre, chasses, épouses, intrigues relationnelles médiocres, rites et combats : la vie dans cette communauté est des plus dissuasives. Construction instable (portraits/ récits/ enchâssements et répétitions), développement lent. Sous-titré, langage anglais et aborigène. Des passages en noir et blanc. (38)

The Lady * (2011) : Un des regrettables Besson, réalisateur dont je trouve les films habituellement potables, légèrement bons ou simplement mauvais. Besson a voulu s’exprimer sur un symbole vivant et incarné de la lutte contre les tyrans, contre la corruption, pour le pouvoir du peuple par le peuple. Il vient à un moment où tout le monde peut dire du bien sur une ersatz [perçue] de Gandhi. À cette fin il enjambe plein de faits et de nécessaires ambiguïtés. Le film est niais, ses méchants grossiers et mono-traits avec une surface encore plus réduite que pour les autres. Il dramatise à outrance, jusqu’aux petites souffrances d’une otage (et le dilemme avec sa famille). The Lady est une BD mielleuse et donc une misère pour un biopic. Tout comme le ciné-gentil n’a aucun intérêt pour traiter la politique (sauf du point de vue d’un larbin ou de son maître). The Iron Lady à la gloire de Thatcher, à peu près aussi partisan et un peu moins aveugle, en tout cas pas unilatéral, vaut largement le double voire le triple de cette bêtise. Séance débile quoique pas désagréable et sans longueurs. (28)

Bons Baisers de Russie ** (1963) : Mon initiation à James Bond ! Avec une vieille lesbienne dure et traître à la patrie soviétique. Des moments repris dans OSS 117. Agréable mais futile et trop lent. (54)

La Mort en direct *** (1980) : Vu pour le thème et à cause de la direction par Tavernier. « La mort est la nouvelle pornographie – la nudité ne choque plus personne ». Initiative intéressante mais tendance à s’affaler ; manie (constante dans les futurs docs ou fictions sur la télé-réalité, comme Le jeu de la mort) de compatir formellement et de pointer le gouffre entre la mécanique ou le système et un ou deux humains mâchés dans le processus. Tourné en anglais avec des acteurs US dont Harvey Keitel. Emet le sentiment qu’il n’y a plus de drames et qu’il faut trouver de nouveaux dopants et divertissements à l’Humanité, qui s’ennuie dans son confort pour une part moisie. Le film lui-même offre une aventure authentique, avec vagabondage romanesque et semblant de romance tragique. En conclusion, il indique avoir été tourné en Écosse et à la mémoire de Jacques Tourneur. (68)

2 fast 2 furious ** (2003) : Bien meilleur que le suivant (Tokyo Drift) et au niveau des 56, en étant différent : plus coloré, plus émotionnel, plus sensuel et moins puissant. Un peu crétin, vulgaire, transparent, généreux. Casting sympathique. Finalement, c’est le plus aimable et enjoué que j’ai vu, après le 7e opus – c’est donc le meilleur après lui. (54)

Tellement proches ** (France 2009) : Troisième du duo Toledano-Nakache, autour d’embrouilles d’une famille supposée dysfonctionnelle. Recyclage joyeux et grand-public des clichés en terme de caractères et parfois en terme de vannes. Efficace et simpliste. Niaiserie ravageuse (et convenue comme le reste) dans la dernière partie. (48)

Au Service Secret de Sa Majesté ** (1969) : Second que je vois de la franchise, à nouveau sur FranceO. C’est un James Bond à part, avec l’australien George Lazenby et une ‘vraie’ romance avec engagement. Les décors (dans les montagnes suisses) et la musique forment les points forts. L’action (non le rythme) comble le vide. (48)

L’étudiante et monsieur Henri ** (France 2015) : Auto-adaptation d’une pièce de théâtre par le réalisateur qui avait commencé fort mal via Irène. Vu à la télévision où il paraît au mieux. Naïveté et réalisme, bons mots, bons interprètes. (58)

Bob le flambeur ** (1956) : La raideur habituelle de Melville est poussée à son comble, la lenteur est toujours de la partie et affecte surtout le scénario. Tout est dans le style pour cet espèce de cartoon très langoureux, propre et superficiel(lement ‘noir’). Avec un braquage en perspective, c’est en fait un film de gangsters, dotés du swag de l’époque. Les démêlées du groupe et les faiblesses des personnes occupent presque tout l’espace, l’action est rare, les buts restent mous, la direction est floue. (56)

Fatima ** (France 2015) : La femme du titre est une femme de ménage peu intégrée en France, avec deux filles qui elles parlent le français et n’ont pas grandi au bled (recrée sur place par les bigotes et faute d’accès à mieux). Le film s’attache à sa vie minable sans faire dans le misérabilisme. Il relève d’une école ou à défaut d’une catégorie ‘réaliste’ remplissant un job de fonctionnaire et préférant la vérité sociale à l’art, à la subjectivité (sauf celle d’une ‘héroïne’ mais toujours en plaçant sur elle une expression qui n’est pas la sienne, commente son ressenti de façon didactique). À la rigueur il pourrait être téléfilm et remplirait aussi bien sa mission – ou plutôt sa fonction. Le scénario et le contenu sont minimalistes et sans complexité, mais le film est sensible à son triple-cas, synthétique. La fin abrupte rend l’ensemble assez débile. Dans les quinze dernières minutes la politique commence à s’installer sérieusement et le film ne met plus seulement des mots dans la bouche de Fatima, mais aussi des convictions, les résidus d’une représentation du monde – c’est le rôle de sa lettre, pleine de ressentiment. Le film s’écrase alors : il a pu faire illusion, mais finalement n’est qu’un produit de convaincu, de partisan, qui s’est contenté de faits orchestrés, s’est bien dépouillé, pour installer le terrain et ne dire rien d’autre que ce dont son engagement a besoin. C’est dommage, car il y a de l’efficacité, un joli élan, de l’empathie clinique, une façon de se poser dans la laideur et la bête réalité qui avec davantage de perspective aurait joué un rôle constructif (à une échelle plus large que faire tenir des tranches de vie). (52)

La Ritournelle ** (France 2014) : Film français très classique puisque très humble et portant sur l’adultère avec doutage joyeux et relance à la clé. Donne envie pour un contre-emploi insolite : Isabelle Huppert en femme d’agriculteur (en Normandie). Elle reste une névrosée planant au-dessus ou en-dehors du milieu et de ses fonctions – enfin, une Bovary plutôt qu’une névrosée. Les personnages autour d’elle, sauf le suédois, sont souvent dans la connerie ; elle a une tendance à la fuite, se montre intrépide puis lâche, déterminée mais distraite (elle part à Paris pour retrouver un homme, passe méthodiquement dans tous les magasins de la ligne où il doit se trouver, mais n’a pas prévu ce qu’il faudra lui dire). (58)

Gribouille ** (France 1937) : Vu dans le Cinéma de minuit de France3 avec un préambule peu engageant, où le narrateur n’a de mots que pour les acteurs et les films relatifs. Il indique qu’un remake hollywoodien a été tourné en 1940. Vu pour Michèle Morgan, qui n’est pas à son meilleur dans un rôle pourtant à fort potentiel et approprié (probable tueuse de son amant créant la confusion dans la famille qui la prend en charge). Lourd et traînant. Sorte de comédie à suspense, d’un registre courant dans les années 1930-40. La musique est le meilleur. Raimu chante Gloria In Exelcis Deo à l’Église – l’ensemble des scènes reste insignifiante. (36)

Chérie, je me sens rajeunir ** (USA 1952) : Comédie loufoque ou burlesque de Howard Hawks. J’ai peu accroché au début et sur la fin, aimé les phases de folie ou de régression de Cary Grant et Ginger Rogers, ou encore la participation du singe. Le film se renouvelle trop peu malheureusement et le silence aurait été préférable au laïus final sur la jeunesse en esprit, même s’il dure une vingtaine de secondes (avant le baiser convenu puis ‘the end’). Marilyn Monroe joue une secrétaire-potiche allumeuse (à quel degré de conscience ?). (56)

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Autres Mini-critiques : 9, 7654321 + Mubi 4, 3, 21 + Courts 2, 1 + Mubi courts 2, 1

PIERROT LE FOU -°

11 Oct

Dans la Nouvelle Vague, il y a tous ces films, poseurs mais vifs malgré tout, avec une candeur nuancée par la rigueur du traitement. Il y a Jules et Jim, A bout de souffle ; et il y a ces objets aberrants où le besoin d’émulation vire à la déliquescence, parce que le sujet est trop faible, l’auteur trop lâche et sûr de son talent. Comme expérience, Pierrot le fou est un cauchemar, comme film de cinéma, une expérimentation à la vacuité militante.

Pierrot le fou, c’est les effets malheureux de la constipation physique et mentale sur les esprits juvéniles illustrés. Le couple composé par Belmondo et Anna Karina s’amuse à jouer des personnages, exécuter des mimiques. Au programme : on va « vivre ». Godard et son équipe traversent ainsi la France comme des enfants attardés et indisciplinés, ou restés trop longtemps en manque de divertissement. Aucune éructation n’est de trop pour eux. Les acteurs se donnent la réplique au sens littéral, la logorrhée impudique abouti à des fautes hallucinantes comme la chanson « la ligne de chance ».

Pierrot le fou ne mérite pas de meilleure analyse que le commentaire suivant : branlette systématisée. Il est très loin de l’Alphaville du même Godard, sorti la même année et n’en partage que la radicalité, mais rien du contenu, quoique la raideur caricaturale et l’opacité délibérée du premier le préserve de déconvenues mesquines. Le casting est tout aussi aberrant. Karina et Belmondo sont des Bonnie & Clyde décomplexés, puérils, gentils et décérébrés. Leur combinaison d’innocence et de créativité matinée de glamour en fait un couple culte ; ou alors tout ça est juste d’une maladresse infinie, c’est à apprécier.

Pour juger il faudra admettre de prendre en compte le grotesque des manières, qui vaut bien l’absurdité lamentable de l’entreprise. D’abord Belmondo est ridicule dans le costume de dandy. Godard avait su dominer cette évidence en trouvant un bel équilibre dans A bout de souffle, mais ici il pousse à fond dans ce sens, démontrant involontairement que Belmondo serait bien plus à l’aise dans la comédie pure ou l’action, d’ailleurs sauf exception (Le Magnifique) ses rôles dans des policiers seront les meilleurs.

Puis toutes ces manières, pour un produit si rèche, limite bâclé, tout en nous imposant ses expérimentations grandiloquentes au résultat navrant ; c’est trop moche pour une seule séance. Ceux qui veulent vomir la Nouvelle Vague doivent voir Pierrot le fou car tout leur est délivré pour qu’ils la diabolisent sans vergogne. Il n’y a pas à extrapoler, c’est plus pompeux, vaniteux et stérile que la description d’une parodie impertinente.

Note globale 23

Page Allocine & IMDB  + Zoga sur SC

Suggestions…

Note ajustée de 23 à 24 suite aux modifications de la grille de notation.

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