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Le mirage Hollande déjà sabordé
A peine élu, Hollande est déjà rendu impotent, ses plans discrédités et sa posture d’alternative abattue. Dans la foulée des insolents résultats des Législatives Grecques, d’une Bourse en panique et d’un marché sceptique, les acteurs de l’actualité cherchent ouvertement à transférer les souverainetés nationales vers l’Union Européenne. Parallèlement, les commentateurs labellisés légitiment les prises de positions tranchées de leaders appliquant la vision néolibérale de l’économie et de la politique, la seule enseignée de façon massive tant par le biais des médias que des programmes scolaires ambitieux. Ceux qui devraient être les observateurs sont des porte-paroles, vraisemblablement pas tout à faits conscients de leur caractère moutonnier et prosélyte.
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Plus que jamais, l’Europe est régentée par l’Allemagne, Etat fédéral qui trouve son compte, plus que les autres, dans l’établissement d’une Union supranationale et défend ardemment ses intérêts (car la monnaie euro est consacrée par et pour elle, a été formalisée selon sa propre monnaie antérieure). Ambassadeur de Bruxelles et des dogmatiques européistes, Merkel vient réprimer les alternatives et nier l’autorité d’un chef d’état sur son propre pays. Révision du Pacte de Stabilité ? C’est non et ce « non-négociable » de la Dame de Fer allemande se substitue au « There is no alternative » qui scellait, peut-être sans savoir à quel point, l’ascendant d’une logique implacable. De toutes façons, Hollande n’a posé aucune condition, le « non » est donc d’autant plus aisé qu’il vient contrecarrer une posture à l’arrachée, n’expliquant ni le comment ni l’après. Il en va de même pour l’idéal de « croissance », mot-valise à la mode depuis quelques jours, concept rabattu mais jamais planifié par l’intéressé et son équipe.
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Et pendant ce temps, Hollande s’amuse du brio des Corréziens, parvenus à hisser un des leurs au »poste suprême » (comme on pouvait le clamer, avec raison, il y a déjà quelques décennies) pour la seconde fois. En marge, il glisse à son entourage et ses collaborateurs que la situation de l’Europe, l’élection en Grèce et les perspectives de récession radicale le préoccupe ; d’ailleurs, il fait confiance aux solutions qui sont exposées par les leaders de la technocratie bruxelloise et leurs acolytes, les économistes de l’école néolibérale.
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C’est donc un nouveau Président ému de son parcours, tout affecté de devoir quitter sa Corrèze, qui s’offre à la vue des Français. L’oligarchie des incapables trouve là une pleine et belle incarnation ; un type lambda qui, comme nous, sera spectateur de notre Histoire et dont les gémissements ne seront même pas audibles pour les décideurs de notre destin.
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Diversion par les mœurs
Et sur quoi Hollande se recroqueville-t-il déjà ? Sur les réformes sociétales, de mœurs, et l’application de principes humanistes gratuits mais sans implication, de symboles égalitaristes. Il y aura donc parité parfaite dans le Gouvernement, pour la première fois ; puis bientôt, le mariage »gay » (on parle peu, voir jamais, de « mariage homosexuel »).
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Obama s’est épris du sujet très récemment… À l’heure ou l’empire néolibéral est chamboulé et que les peuples se donnent les moyens de gronder (mais avec les outils qu’on leur accorde), le chef d’État de la première puissance du Monde fait les unes en évoquant l’union civile homosexuelle, thème qui pourrait être réglé en un clin d’oeil… Mais la gauche libérale-démocrate a tout intérêt à repousser les réformes sociétales, car elles lui garantisse un combat penaud et fédérateur, tout en faisant des adversaires »conservateurs » d’odieux passéistes bloquant le progrès et les libertés individuelles. Il y a une deuxième raison, c’est qu’une fois les homosexuels mariés, ceux-ci n’ont plus, comme les hétérosexuels mariés et dans une situation sociale équivalente, d’intérêt à se bercer des litanies consensuelles des valets des néolibéraux.
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L’UMP tient bon, Copé tient la barre
Copé dit d’Hollande que c’est une « anguille », mais Copé lui-même est une anguille ; méthodes, personnalités et perspectives inverses, mais anguille qd même ! Après la fin des élections présidentielles, le leader de l’UMP a eu la bonne idée de reprendre le programme de Sarkozy pour la campagne des Législatives ; reste à voir en quoi les deux aventures électorales se répondront ou se contrediront.
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Paradoxalement, ce programme, sans le mal-aimé Président sortant, perd son meilleur porte-parole. Copé, mal défini, n’est pas, pour l’heure, cohérent dans des postures idéologiques quelconque, puisqu’on le connaît plutôt comme un défenseur taquin de l’ordre établi et de la position officielle de la droite de gouvernement sur les débats ou polémiques du moment.
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Raillé, assimilé à une « droitisation » opportuniste (sauf que le terme de »droitisation » a été invoqué pour chacune des postures un tant soit peu non-linéaires de Sarkozy pendant cinq ans), ce programme a permis à Sarkozy de revenir à 48% et de se réapproprier l’électorat traditionnel des droites (mais aussi les non-alignés et les attentistes), devenu sceptique et parfois revenu de loin. Ce sont surtout les slogans qui ont rassurés, mais aussi la possibilité d’offrir aux électeurs du Front National une brèche, même factice ou dérisoire, sur leurs sujets de prédilection. C’était, notamment, la renégociation à propos de Schengen ; ayant gagné le respect de Merkel et des européistes, Sarkozy aurait pu davantage inciter à quelques inflexions. Il aurait pu aussi se transformer en Orban français, en mode libéral et atlantiste ; c’est en tout cas ce qu’il a laissé leurrer. Opération brillante et sans doute pas si vaine, car ainsi Sarkozy a su redonner un horizon à la droite traditionnelle. Elle n’aura le récupérer si elle comprend son intérêt objectif au lieu de se laisser absorber par l’illusion « centriste-humaniste ». Lisse et bien sous tous rapports, cette étiquette est un piège aguicheur qui la conduira à l’échec (électoral bien sûr, idéologique surtout) et à l’abandon de toute influence sur le jeu politique (quand ces centristes-humanistes croient justement le contraire).
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L’UMP peut encore se tirer honorablement des Législatives, mais elle aura du mal à transformer l’essai (l’essai étant la remontée fulgurante de Sarkozy, qui a su remobiliser à droite et au centre et capter les indécis). La droite mainstream perdra probablement ce scrutin, peut-être même y aura-t-il une nouvelle vague rose qui justifiera des commentaires condescendants au sujet de la stratégie de l’UMP depuis l’entrée de Sarkozy dans la campagne (c’est-à-dire il y a deux mois et demi). Mais ils auront tort ; c’est simplement que les électeurs croient peu à la praticité des réformes promises, ou ne croient pas que les dirigeants de l’UMP pourront tenir des engagements aussi forts. Pour s’émanciper de l’absolutisme européen, Sarkozy a réussi, dans l’entre-deux de l’élection, à apparaître comme le plus apte, à défaut et même si c’est cruellement absurde, d’être le plus sincère et décidé. Un sursaut ponctuel mais néanmoins impressionnant, d’ailleurs près de la moitié (un sondage à la sortie des urnes avançait le chiffre de 51%) des électeurs du FN ont tenté le vote Sarkozy, peut-être avec l’énergie du désespoir ou bien un espoir timide, mais ils l’ont fait néanmoins, quitte à se tromper.
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Le cerbère de confort tient sa belle affiche
Mélenchon n’en finira jamais d’user des armes du système pour exister. L’hypothèse d’un duel Marine/Méluche est donc désormais réalité, la candidature étant validée ce samedi. Jusqu’à jeudi, Mélenchon ne savait ou il serait catapulté ; il s’est même cramponné à des alliances réclamées (et non négociées) à Martine Aubry. Au lendemain du premier tour pourtant, cette crapule niait encore l’intérêt des législatives pour son cas personnel (allant jusqu’à minimiser son implication). Aujourd’hui, il s’invite sur les terres de Marine Le Pen pour pérenniser la bonne affiche des »populistes », déjà encouragée lors de son émergence (avec notamment le face-à-face autour de la table de JJ Bourdin). C’est amusant, c’est triste aussi. D’emblée, Mélenchon réaffirme ses vieilles manies en animalisant sa concurrente, notamment en lui demandant de venir « aboyer » devant lui. Il réclame le débat, tout en conservant ses manières de malotru et maintenant le clivage anti-riche/anti-immigré qui séparerait les gauches radicales des droites extrêmes… alors même que Marine Le Pen a été bien plus cohérente, pugnace et surtout concrète dans, non seulement sa dénonciation de la sournoise banalisation de la crise de la dette (perçue, par le biais des médias, comme allant de soi), mais qu’elle y a par ailleurs apporté des solutions globales et précises (abrogation de la loi de 1973 notamment).
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En dépit de cela, c’est ce même théâtre de dupes qui est de nouveau mis en scène. Le système envoie ainsi dos-à-dos ses deux facettes »radicales », consacrant les deux personnages comme les représentants de mouvements à la marge des consensus, comme deux excroissances spectaculaires. Dans ce choc des »extrêmes », Mélenchon incarne le côté »utopiste », l’idéal que les formations plus raisonnables ne peuvent assumer, trop occupées par le principe des réalités. A l’autre bout du ring et de l’échiquier, MLP est la menace réelle et ultime, le réceptacle de tous les non-dits les plus nauséeux, celle qui engendre les débats qui font mal, celle qui bascule dans un monde interdit et pose des perspectives aveuglantes tant elles se hissent hors du cadre rationnel de la raison et de la démocratie. C’est là les images mentales qui sont fixées et sculptées dans l’esprit des français.
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En outre, il y a des questions politiques pures, que les médias dominants ne posent pas et que les médias alternatifs ne posent pas non plus (par mélenchonisme -c’est le cas d’AgoraVox-, désintérêt, ou parce que l’actualité est trop vaste et vivace en cette période post-électorale doublée d’une accélération de la crise occidentale).
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Les voilà donc : le FDG restera-t-il une structure, un large espace de coopération de gauche ? Ou bien est-il voué à n’être qu’un rassemblement ponctuel ? Sera-t-il torpillé par l’égoïsme des élus du PCF ou la lâcheté de Mélenchon – les deux s’annoncent déjà ? Y a-t-il d’ailleurs encore un Front de Gauche, à l’heure ou Mélenchon et ses acolytes peinent à trouver des accords et des circonscriptions ? Bref, l’étiquette Front de Gauche existera-t-elle toujours après ces Législatives ? Et si c’est le cas, est-ce que le mouvement orchestré par Jean-Luc Mélenchon ne deviendra pas un FN de confort d’une majorité de centre-gauche (balayant des cadres d’EELV à des satellites du MoDem) ?
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Le rallié opportuniste
Éternel loser, Bayrou reste le spectateur de sa propre déchéance. Voilà un homme espérant se fixer au carrefour de la vie politique mais que ses voisins survolent et ses lointains adversaires méprisent. En évoquant le « danger » d’une cohabition, le brave centriste a fait le boulot, qu’aucune force apparente ni aucun mouvement d’opinion ou politique ne réclamait. Splendide retournement de veste, de la part d’un des meilleurs propagandistes de l’idée, schématique et simpliste mais pas innocente, selon laquelle Hollande allait ruiner la France.
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Afin de justifier cette orientation, on invoque des raisons de valeur plutôt que de politique, d’économie. La vérité, c’est que Bayrou fait de la realpolitik à son échelle personnelle et que l’européisme béât du Parti Socialiste lui facilite la tâche. En outre, Bayrou s’est offert au camp du vainqueur annoncé en espérant participer à sa réussite électorale ; mais il n’a créée aucune interdépendance, le PS et Hollande ne lui doivent rien, simplement lui est à leurs pieds sans pouvoir plus désormais se retourner sur sa droite, puisqu’il l’a abandonné. Son ralliement, qui en fait n’existe que pour lui (il n’a intégré aucune équipe) a brisé un non-dit qui lui était favorable : en ayant toujours pas basculé officiellement vers le centre-gauche, Bayrou conservait ses chances de récupérer les fuyards modérés, libéraux et »humanistes » de l’après-Sarkozy. Il a encore raté sa chance et s’est encore vautré tout au fond d’un gouffre, face à une pente probablement encore plus pénible à escalader (et en plus avec le sentiment, pour les électeurs, que désormais ce n’est même plus la peine).
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