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MAD GOD +

27 Fév

Cauchemar éveillé pour tous et pour les jeunes cinéphiles, possible expérience fondatrice, Mad God a le goût de ces aberrations et cas limites du cinéma sur lesquelles on revient toujours, au moins en esprit ; on reviendra vers celle-ci avec davantage de plaisir sinon de facilité. Par rapport à Begotten ou Philosophy of a knife, Mad God est relativement intelligible et surtout plus regardable sur tous les plans. Ce plaisir est aussi un chemin de croix, car il s’agit de traverser un royaume de l’arbitraire et de la violence permanente, où les semblants d’Homme naissent et meurent comme matériel (et plus comme poussières).

Ce ‘film d’auteur’ (avec beaucoup de petites mains) en stop-motion, signé d’une référence des effets visuels (Phil Tippett connu pour L’empire contre-attaque et la saga RoboCop) a pris pour l’essentiel une décennie à la conception, mais l’entame remonte à 1990. L’ampleur du travail et de la démonstration impressionnent (peu de moments semblent ‘cheap’ malgré le style de production), l’écosystème monstrueux passionne (ou rebute, la faible popularité du film joua donc en sa faveur au début, avant que sa réputation se nuance suite à la sortie sur internet en 2022 puis surtout celle en salles en 2023). Les décors, silhouettes, explosions de feu ou de sang évoquent 1914-18, les exploits des khmers rouges. On pensera à toutes sortes de représentations de l’enfer émaillant l’histoire des arts visuels, soupçonnera quelques sectes. Mais Mad God se voit sans eux ; il y a une matière en-deçà de la culture, le parfum d’une humanité visitée pour la première fois, pas ou peu encombrée de références (comme dans les premiers films de David Lynch, Alphabet ou Eraserhead).

La traversée se fait sans paroles, cris et borborygmes sont autorisés. Le missionnaire anonyme déambule dans un univers industriel miteux sans grâce ni pitié, où tout sera retenu contre vous si par hasard votre existence était aperçue – mais c’est peut-être ‘humaniser’ ce qui tient davantage d’un choc de réflexes animaux face à l’arbitraire du chaos et de despotes puérils (le tyran d’un des premiers étages se résume à une bouche capricieuse, à nourrir et à subir, étalée sur des écrans omniprésents). La création de pantins articulés à la chaîne, sans égards ni plus petite conception de leur développement et leur bien-être, évoque au mieux un élevage de bêtes intensif et aveugle (générées pour être ingérées, sacrifiées par nécessité ou divertissement, vouées aux travaux abrutissants) – sinon, la modernité vue par ceux qui la vivent comme la pire des déchéances. Au cinéma, ce contre-modèle a déjà pris forme via Metropolis. Mais on peut estimer qu’il n’y a pas tant de ‘modernité’ que de modernisation de l’oppression et du cannibalisme inter-individuel ; lesquels peuvent être archaïques, spontanés, ritualisés, avec ou sans destin présumé.

À la fois fugue et dystopie, Mad God donne l’impression d’une Humanité soumise à une simulation de royaume du Mal, sans échappatoire, sans repos ni compensations, sans espoir – où l’once de rationalité et de haute technologie s’emploie à asservir des êtres interchangeables, privés de toute autonomie (dans la première scène avec des visages humains, les secondes s’éternisent pour le patient d’un savant fou sous l’effet de la terreur et de l’anticipation du pire… peut-être aussi à cause d’une drogue expérimentale ?). Finalement apparaît un paradis artificiel : il existe pour permettre à une somme de gangrènes humanoïde d’observer ses petites créatures arrachées au bonheur. L’architecte en rouge avec une trogne sartrienne sans le regard de carpe démoniaque a peut-être des motivations plus nobles que le voyeurisme morbide, peut-être aussi vaut-il mieux mourir qu’être son cobaye.

Écriture 6, Formel 8+, Intensité 8- ; Pertinence 8-, Style 9, Sympathie 8+.

Note globale 86

Page IMDB  + Zogarok sur SensCritique

Suggestions… Bandits bandits + Frankenstein + Mad Max + Damnation/Tarr + Prince des ténèbres + Color out of space + Titane + Possession/Zulawski + Dredd + Pearl + Mandy

 

L’ORIGINE DU MAL +

6 Mai

Un des meilleurs films où le méchant est une victime entourée de vermines plus rassasiées. Des mystères et compétitions relatifs à la naissance et la filiation, une grande fille intimement et apparemment perdue mais fondamentalement solide et prête à tout, un patriarche bourgeois infect doublé d’un demi-obèse désinhibé, des combats de lesbiennes en prison, des secrets, impostures et jeux de dupes, des appétits égoïstes et de la frustration omniprésentes, une violence perpétuellement différée ou transformée nourrie par le ressentiment lui-même soutenu par l’inaptitude de chacune à prendre le large… le tout servi par une mise en scène et un casting ne craignant ni l’excès (ces split-screen sont probablement grossiers, s’avèrent utiles) ni le ridicule (à force le bluff et l’hypocrisie sont toujours drôles) ou les transitions bizarres (Stéphane hébétée face à une révélation… puis un chien de garde) ; je n’avais pas besoin d’une liste si fournie pour être séduit.

Pourtant à l’ouverture on sent les clichés du film social en embuscade, couplés au polar français commun déjà indiqué par l’affiche stylistiquement cheap et chabrolienne. Très vite on est plongé dans un doute stimulant car on se sent débarqué dans ce tableau ordinaire comme le ferait un cafard écrasé dans la vie mais déterminé à retourner vers la lumière ; comme si l’affreux et ingouvernable de Seul contre tous rassemblait ses esprits (ce qui consiste à liquider les ruminations et tous les produits de la conscience) depuis sa chambre miteuse pour rejoindre le monde avec une composition décente. Le jeu de Calamy est d’abord un peu saoulant (et suspect, mais de maladresse de la part de l’actrice) tant on nous la présente comme une pauvre gourde malmenée et toujours prête à faire des efforts pour se faire pardonner sa gaucherie ; puis rien ne paraît plus juste et spontané que ce ‘masque’ pour une victime réelle dont la condition (pleine de limites) contre-indique toute sorte d’interaction directe (car elle est en position de faiblesse et car sa déconstruction identitaire s’est imposée avant qu’elle aborde le monde social).

Cette manière de se présenter toujours sinueuse et vulnérable s’accorde avec un tempérament ‘inhumain’ et des aspirations affectives finalement peu élaborées (c’est une machiavel avec des désirs enfantins), avec peu de tendresse ou de haine envers les gens – elle est un pion dans un monde de pions souvent plus forts mais plus naïfs qu’elle. Or la manipulation est la meilleure arme d’une victime donc celle-ci charme les femmes, se soumet aux supérieurs, pour obtenir ce qu’elle veut – elle s’avilira volontiers tant qu’on ne l’empêche pas de prospérer, ce qui signifie, dans son cas et à ce niveau de croissance, prendre une place stable (en gardant cette petite dignité de façade, qui la rend si manifestement humble). C’est pourquoi dans les premiers instants elle entre en conflit avec la domestique tout en semblant (et en ‘étant’) neutre voire trivialement bienveillante dans cette relation : elle vient pour la place du parasite ou du vampire en échange du rôle de soutien. Qu’elle occupera le plus candidement et probablement servilement tant qu’elle sera acceptée, logée à tous degrés – il ne s’agit même pas d’amour, encore moins d’affirmation de soi, à peine de sécurité financière, c’est avant tout une recherche de bien-être.

Si on vient pour l’intrigue, on sera probablement diverti comme espéré ; mais si on vient pour des rebondissements concernant la nature des individus, alors on risque de trouver le suspense faible une fois l’essentiel éventé. Cette Origine du mal est une comédie de mœurs – une comédie sombre. Verbalement elle en fait le travail, avec ces dialogues où chacun s’applique à casser l’autre, sèchement ou en douceur ; aussi avec le personnage de la vieille, si ordinaire et élitiste même dans son extravagance. Elle se voudrait épanouie dans la mesquinerie mais n’est qu’une variation dorée de rombière au foyer pleine d’amertume ou de femme lésée, négligée, se donnant des allures de vieille pute insoumise pour effacer le désespoir charnel et moral qui crève les yeux et gêne un peu. Mais le plus drôle reste les pauvres interventions pour tempérer ou faire bonne figure de cette ‘Stéphane’, ces phrases toutes faites et cette politesse exagérée usantes en première instance, mais aussi savoureuses que pathétiques lorsqu’on réalise que cette tempérance compulsive n’est qu’une façon de paraître saine et inoffensive tout en s’économisant. D’ailleurs sous stress, son pilotage automatique déraille ; la réponse (reptilienne) qu’elle apporte à sa partenaire lors d’une scène finale est proche de celle donnée par la créature de Creep. Le caractère sous cette carapace a un grand pouvoir de fascination : celui d’une petite vipère prolétaire capable de réaliser ce qu’une personne trop pleine de sa dignité ne commettra jamais.

Écriture 7, Formel 7, Intensité 8 ; Pertinence 7, Style 7, Sympathie 8.

Note globale 82

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Suggestions… Irréprochable + Le jardin des délices + Seules les bêtes + Parasite + Inexorable + La Cérémonie + 8 femmes

CLOSE +

25 Avr

Sur le paradis perdu. Ennuyeux au départ (déluge de niaiseries et d’insouciance, plus tard d’émulations collectives de gamins) y compris par son intention manifeste de présenter comme naturelle et pure une romance homo juvénile. Puis à mesure que la situation se complique pour et entre les deux, le film devient plus profond et poignant (ou stressant quand la nature de leur complicité devient voyante, dans un contexte de garderie obligatoire qui se prête naturellement à toutes les nuances d’aliénation et au harcèlement). Suite à la bascule majeure (dont la brutalité est bonne pour la narration et sur le fond – il faut sentir cette coupure précipitée, cette volonté d’absolu qui a triomphé et vous laisse exsangue), cette nostalgie, cette douceur et cette douleur, deviennent entêtantes. Conscience à vif d’être passé à côté de l’amour d’une vie, ou au moins d’un confort et d’une amitié intenses, de milliers de moments de joie qui font l’intérêt d’exister. Peut-être aussi que la meilleure page d’une histoire personnelle vient de s’écrire, car cet amour pourra être idéalisé et ré-interprété à perpétuité, au prix d’un manque cruel (et alors que les deux individus avaient probablement une inclinaison trop proche, même si celle du brun était plus franchement féminine).

C’est justement cette érosion d’un lien et d’une situation parfaites que le brun ne supporte pas – en nettoyant l’âme du blond par le vide, il se donne les meilleures chances de le garder captif. Et celui-ci doit subir le soutien [même quand il est sincère et bienveillant] idiot et ‘administratif’ d’adultes (avec cette maladresse et cette indécence toute féminine et typique d’éducateur totalitaire et/ou petit d’esprit d’inviter à ‘partager’ son émotion) et de camarades incapables d’entrevoir l’ampleur de ses remords – et voir notamment ce gamin gras et bourru, vraisemblablement stupide, persévérer… or c’est pour obtenir l’acceptation d’un cortège d’animaux dans ce goût-là qu’il va vivre avec un fantôme. Il a voulu faire un pas de côté pour mûrir (notamment en se rapprochant d’un garçon sportif, au tempérament sobrement assertif et sans égocentrisme aveuglant – relation qui partait pour devenir le véritable premier amour, l’éveil qui le marquerait et serait romancé) et va malgré lui griller les étapes en éprouvant déjà le vertige d’un vieillard qui verrait son monde englouti. Le temps a ralenti, on ne veut surtout pas arriver au terme du film, lequel sera pourtant –c’est inévitable– une délivrance –car si on ne force pas, il n’y a jamais d’atterrissage.

Peu d’autres (la série Six feet under fait partie du lot) ont su communiquer les émotions de deuil et de culpabilité, de ce sentiment horrible, étouffant, avec un arrière-goût délicieux car il entretient une mélancolie qui devient la plus belle nuance d’une existence soudain terne et compliquée – mais il faut bien vivre, alors cette sensation aussi devra être rangée. Il y a dans la partie endeuillée un peu trop de tendresse à la limite de l’inapproprié (principalement avec le frère), mais c’est peut-être le prix de l’authenticité (et de la cohérence avec la préférence homosexuelle). Si on passe ce détail, les clichés de l’innocence bucolique et printanière, on peut trouver un de ces films qui font ressentir le charme et l’importance des acquis affectifs versus l’insignifiance des obstacles de l’environnement, des défauts d’une partenaire, de la honte qu’infligerait un parent ou un ami.

Écriture 7, Formel 7, Intensité 9 ; Pertinence 8, Style 7, Sympathie 8.

Note globale 78

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Suggestions… Trois jours et une vie

LE MENU –

23 Avr

L‘intérêt de la manœuvre est laissé en suspens… jusqu’à la sortie ; entre-temps sont ajoutés des ingrédients qui ne serviront à rien, ne font qu’intriguer ou animer… ou simplement meubler ? Car en conclusion il n’y avait même pas des fausses pistes, mais du pur remplissage (incroyablement balourd et opportuniste comme ce poignardage par l’employée sexuellement abusée par son patron) ; un méli-mélo piochant parmi les clichés de thrillers de la dernière quinzaine. La suggestion magnifique en conclusion (il faudrait savoir apprécier les choses simples ?) est un comble du foutage de gueule. Y a-t-il plus snob que ce genre d’oeuvres opaques, dont l’ambition manifeste et l’étrangeté n’ont d’autre but que flouer et intimider le chaland – qui aurait l’audace de passer pour un arriéré en rejetant ouvertement ce film ?

Hormis la curiosité et l’attentisme dans lequel il nous plonge, ce Menu n’a rien pour lui : il est invraisemblable et inutile, peuplé d’individus apathiques aux caractérisations infantiles, son humour absurde et sa médiocrité puent la prétention et le cynisme paresseux, le chef est une sorte d’Hannibal sado-maso sur-vendu qui mériterait le goulag tant il se donne pour peu tant d’importance. Je sent ce film comme une expérience ‘sociale’ type Funny games ; l’invitation à fuir lancée aux hommes otages plaide en ce sens, puisqu’à la fin le chef lance à la bourgeoise lasse qu’ils n’ont jamais été retenus – bien que ce soit hypocrite, comme l’invitation à fuir qui relevait de l’invitation à être la proie d’une chasse à l’homme expéditive.

Le film se plaît trop à saboter tout ce qui viendrait l’élever dès que l’effet d’un retournement a été consommé (comme il termine cette scène du sauveteur qui a aimé le film blâmé par le chef, on s’attend à un basculement hargneux… puis les affaires reprennent). Trop de gens le gobent manifestement (car aucun commentaire positif ne semble voir ce que je pointe ici), je suppose donc que de tels ‘exercices de style’ continueront de saturer nos écrans avec l’assentiment de crétins soit demi-, soit sur-, en tout cas cultivés en vain puisque ça ne les protègent pas des blagues vaseuses produites à leur dépens.

Écriture 3, Formel 6, Intensité 5 ; Pertinence 2, Style 3, Sympathie 2.

Note globale 26

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Suggestions…

SDM 2022 (5-Décembre)

16 Avr

Les notes au détail (EFI-PTS) : l’Écriture, la Forme, l’Intensité (ou l’impact) ; la Perspective (ou pertinence), le Style, la Sympathie.

Les huit catégories de genre : Intimisme (empathie et personnages), Drame (lourdeur et extériorité), Fantaisie (évasion et imagination), Épouvante (effroi et agression), Suspense (intrigue et investigation), Action (aventures et divertissement), Comédie (humour et situations) & Alternatif (non-fiction et expérimental).

Hellraiser (épouvante) : critique à venir. (7ou8)

La nuit du 12 – (suspense) : Ciné simplets. La bande-annonce était sidérante de fausseté et tant de sérieux maladroit et lourd de la part du réal de Seules les bêtes me semblait anormal. Mais le film est effectivement un pensum grossier avec une galerie d’hommes toxiques qui sont tous un peu le tueur de cette jeune fille. Les acteurs font pitié car ils donnent une contenance à ce qui n’a aucun sens. La juge est sidérante et si ce genre d’attitude ‘positive et constructive’ fausse et imbécile est crédible (surtout venant d’un de ces individus dont on sent l’inanité dans un rôle d’autorité), montrer un personnage féminin à la contribution si mauvaise est étrange de la part d’un film chargeant les hommes. Si le film ne recevait pas de si bons avis je me demanderais encore pourquoi certains ont senti le besoin de le faire exister. Apparemment un bon casting et une grosse déférence à l’agenda idéologique féministe suffisent à galvaniser quelques foules. 363-253. (26)

Peter von Kant – (intimisme) : voir la critique. 245-234. (32) 

Pearl + (drame) : Sur la douleur (et la rage) d’être et se savoir de peu de valeur, sentir l’urgence de saisir les rares opportunités sous peine de se désintégrer – mais sous le filtre exubérant d’une fille de ferme psychotique poursuivant des illusions narcissiques. Le développement de son état et du scénario sont prévisibles, le film doit beaucoup à l’interprète (Mia Goth) – atout trop bien compris par le réalisateur qui pousse la démonstration aux portes du lourdingue (le sourire fixe en générique de fin) et du mauvais goût (la danse avec un décors de tranchée en carton-pâte). L’autre puissance originale de Pearl est son style, avec sa photo saturée, son cadrage de comédie musicale légèrement euphorique des années 1940-50 malmené par des émotions toxiques d’envie et de frustration. La mère souhaite mutualiser son propre fardaud – elle serait une caricature parfaite [de film à moralité légère ou victimaire – en plus elle pleure ses camarades allemands !], si elle ne faisait part de sa propre souffrance et surtout si le film n’en venait pas… à lui donner raison (bien que son attitude n’ait pu qu’encourager les fixations de sa fille et les contenir que maladroitement). Sortie simultanée avec X, avec lequel il partage des personnages, thèmes et décors en commun avec deux générations de différence. Adopte un focus individuel et tourmenté alors que X fait dans la comédie et le grotesque. 678-687. (76)

Barbare =- (épouvante) : Démarre tout en mystère et dignité puis se dégrade en farce, avec quelques facilités et invraisemblances. Contient un connard de compétition. 466-365. (52)

Pinocchio =+ (fantaisie) : Confirmation après Nightmare Alley que le cinéma de Guillermo Del Toro devient enfin pleinement satisfaisant et complet grâce à une bonne écriture au sens large : histoire, thèmes, personnages. Le deuxième élément est assez ordinaire et répétitif, avec des couplets sentimentaux, anti-autorité et anti-militariste, mais donne aussi dans la variation heureuse de Frankenstein. Superbe animation, belle dans une moindre mesure car les passages dans l’au-delà brisent la moyenne ; la version de 2020 était moins flamboyante et peut-être moins gracieuse, mais j’ai été plus sensible à son réalisme décalé. Les personnages sont réussis, malheureusement les méchants fascistes sont mono-traits donc assez vains au-delà de la fonction de repoussoirs ou punching-ball. Bande-son un peu trop Candy crush. 687-677. (68)

Mort sur le Nil + (suspense) : Excellente surprise pour moi qui aime beaucoup la version de 1979 (et aussi Meurtre au soleil). Bonne intro sur le champ de bataille et à l’infirmerie où la femme a la meilleure réaction possible, aidante et pragmatique sans être sale. La dégradation immédiatement après (la danse ‘tam-tam’ en public) restera un morceau isolé. Des soupçons de wokisme ridicule, mais on est dans l’extrême fourchette basse venant d’un blockbuster. C’est d’ailleurs une contribution paradoxale car aseptisée ; le film choisit l’ineptie la plus commode et rassembleuse, refait l’Histoire plutôt qu’il la ‘déconstruit’. Concernant l’intrigue, il vend la mèche en mettant trop d’emphase sur le duo de tueurs, perdu de vue dans la seconde moitié où s’enchaînent les meurtres. Le suspense est donc un peu fragile contrairement à l’approche sentimentale, la qualité vient surtout des personnages et du casting. La scène où Poirot se met à courir est positivement surprenante : à événement exceptionnel, réaction exceptionnelle. Elle est moquée par les mêmes puristes qui s’effaroucheront de l’absence d’audace de ce remake inutile : on fera semblant de découvrir un pont entre les anti-conformistes puérils et les gardiens du temple. La réplique « Le caviar me manque, mes employés encore plus » est grotesque : et alors ? Elle est parfaitement cohérente, mais peut-être faut-il qu’en tant que nantie elle sorte un truc ouvertement dégueulasse afin de bien se signaler et ne laisser aucun doute pour prononcer sa condamnation ? 778-678. (72)

Firestarter =- (fantaisie) : Très différent du premier (que je sur-note), donne l’impression d’avancer dans le brouillard (on ne revoit jamais le vieux créateur). Gros manque d’intensité et ‘trop écrit’. Émotionnellement trop pleurnichard, héroïne peu crédible dans la colère. La richesse du premier venait surtout des personnages et ici ils sont à la fois mal conçus et mal voulus : le revirement de l’indien est aberrant alors qu’il était déjà un écho infamant au rôle de G.Scott. Le couple de vieux campagnards, des gens fiables sur lesquels nos héros en fuite pouvaient se reposer, cède la place à un ronchon sous-doué avec sa femme immobilisée depuis trente ans. On marche dans le vide au royaume de la stupidité et du misérabilisme, avec une once de style (et la musique de Carpenter), un gap [favorable] entre la tenue du rythme et la faiblesse de fond (peut-être imputable au roman car le premier était fort malgré ce découpage bizarre de l’histoire – avec une autre mise en scène et direction d’acteurs sa part de ‘mou’ aurait tout dévoré). Finalement le moralisme doucereux constant de papa envers la fille sert surtout le film, car il justifie la rétention de son pouvoir même quand elle est acculée – mais elle l’utilisera pour le climax et lors de quelques débordements où elle se fait peur. Plus absurde que tragique, l’équilibre craque lors d’une séquence insensée avec les flics et le sniper. Pour liquider les individus à problème l’organisation secrète et les forces de l’ordre sont excellentes, pour mener à bien la mission c’est une catastrophe ; la façon dont la gamine circule dans le QG n’a aucun sens, hormis nous fournir une séquence bien kitsch de couloirs froids mordorés et violacés où la grande méchante malgré elle tente de corrompre notre héroïne tout en la brisant. 455-254. (42)

Ambulance =+ (action) : Excellent dans son registre. La VF amplifie le côté beauf et bigger-than-life, surtout au départ avec les voix de loubards et Nitro le chien. Gyllenhaal a de fameux restes de son psychopathe de Night call. Une jolie scène érotico-gore digne des Crimes du futur (où le côté érotique n’était pas communicatif). Quelques trucs douteux voire éclatés (repeindre l’ambulance pour passer inaperçu ? Sans repeindre celles en couverture ?) et des flics pas très ‘instinctifs’ aux abords de la banque. 377-367. (64)

Un talent en or massif =- (comédie) : Poussées hystériques et inconsistances (les agents secrets sont lamentables). Ne sait pas quand s’arrêter et la farce meta ne dilue pas complètement l’impression d’assister à une série B bâclée mais sous stéroïdes grâce à sa star. Ce dispositif ne donne qu’une sorte de plaisir coupable avec Cage de plus ; hormis son scénario, pas de quoi se démarquer, or ce scénar est très faible en-dehors des lignes principales utiles aux rebondissements. 365-334. (38)

Terrifier 2 – (épouvante) : Le premier Terrifier était quasi mutique, tenait la tension constante sinon allait droit au but, quasi toujours dans les griffes du tueur. À cette bisserie sauvage (qui visait bas avec appétit) succède une bisserie sucrée toute en remplissage (qui vise le sous-sol avec mollesse). Nous subissons une heure de présentation puis (le sommet gore puis) encore une demi-heure bavarde avant que le film démarre. Finalement les trente minutes à la fête foraine sont tellement médiocres… Oui Terrifier 2 vous donnera quelques scènes extrêmes, mais entre elles c’est l’ennui. Et puis, 2h20 pour ça ? Mais les Vendredi 13 et les Freddy les plus foireux avaient la décence de durer 1h30 ! Aucun effort ne soutient la ré-orientation teen et marvelo-retardée ; que dire du ressort ‘Ils t’ont appelée car tu es la seule capable de les arrêter’… Évitez de tartiner un long scénario s’il y a si peu à mettre dedans et qu’avec ce si peu l’auto-contradiction arrive déjà. On fait fructifier le surnaturel planté à la fin du premier, lequel manifestement va permettre de boucler n’importe comment quand n’importe quoi aura été accumulé : saga en vue et elle se donne des garanties pour être des plus minables. 243-132. (22)

Top Gun Maverick =- (action) : Davantage un film sentimental rappelant les westerns lénifiants de la prétendue ‘grande époque’ que du cinéma d’action. Toutes ces scènes de troupes finissent par donner envie de dégueuler tant c’est artificiel et enfantin même quand ça se veut gras. Tous ces dialogues clichés sont-ils nécessaires ? Cette façon de tourner autour de Connelly sans jamais aboutir alors que tout s’y prête a-t-elle le moindre sens ? Les scènes d’entraînement sont trop rares. Les clins-d’oeil au premier abondent (pourtant je ne l’ai jamais revu – ça doit être pour ça que je ne suis pas réceptif… sauf qu’il est de bon ton de dénigrer le premier tout en valorisant celui-ci). On devrait pouvoir parler de reboot pour être puriste, mais remake à ce stade n’est pas insensé tant l’obsession du décalque parsème la séance – parfois même en deux temps à peu d’intervalle (le retour en moto devant la maison de Jennifer). Le succès d’un film aussi pingre et lisse me laisse perplexe. 374-334. (36)

Shamshera – (drame Inde) : De l’épique raisonnablement lourdingue et grossier, proche des blockbuster américains. Très creux et rempli de trahisons. Sans surprise, j’en sort renforcé dans ma conviction que le secteur est à éviter. 365-323. (36)

Bullet train – (action) : Déluge de second degré lourdingue et de violence extrême. Je n’ai apprécié qu’à de rares exceptions comme la mort de ‘pétasse’ car avec ce personnage on tombait trop bas. 365-233. (28)

Glass Onion – une histoire à couteaux tirés =- (suspense) : Le renversement de la deuxième heure me semble un peu facile ; on nous montre peu de choses pertinentes, puis soudain on nous annonce que les deux intrus en savaient davantage et passe en revue leurs scènes de la première heure. Le suspense n’est pas forcément entamé, mais il est de basse qualité. 465-344. (42)

SDM 2022 : Novembre (4), Aout à Octobre (3), Juillet (2), Janvier et Mars (1)

Mini 2022 : Décembre, Novembre, Octobre, Septembre, Aout, Juillet, Juin, Mai, Avril, Mars, Février, Janvier

SDM 2021 : Décembre ou 3/3, Juillet ou 2/3, Juin ou 1/3