Tag Archives: Brian De Palma

FURIE =-

28 Juin

Sorti juste après Carrie, Furie est d’abord le premier film à gros budget de Brian DePalma. À cette occasion il s’offre plusieurs stars, John Cassavetes et Kirk Douglas en tête. Nous sommes à l’intersection, entre le Brian  »nouveau meilleur réalisateur de sa génération » des 70s et le DePalma  »provocateur ultra-sophistiqué » des 80s. Ni pour le pire ou le meilleur, plutôt pour un entre-deux dont on est jamais ni rassasié ni frustré.

 

DePalma fait entrer deux films l’un dans l’autre ; le paranormal et celui policier, d’espionnage. C’est ce second versant, flirtant à l’occasion avec la comédie, le plus convaincant de loin. L’autre finasse en vain, essayant le drame psychologique tout en se dérobant dès qu’il s’agit de laisser les personnages donner et non plus seulement prendre la lumière.

 

Comme souvent, c’est accrocheur, un peu séduisant, avec son supplément dans les fondations du scénario et surtout dans cette manie de transfigurer l’image. Puis des événements ridicules se produisent (le sort d’Esther – on dirait qu’un tâcheron s’est incrusté pour souiller le climax d’un virtuose) et tout devient soumis à une logique mécanique transparente, ennuyeuse par ses effets et la faute d’une narration inconsistante.

 

DePalma a voulu mélanger Carrie à une sorte de thriller conventionnel et visionnaire à la fois, rappelant un peu Friedkin ou Scanners. Furie présente une issue de film à suspense au gore outrancier dont on se demande quel crédit pourrait lui être fabriqué. Il y a quelque chose de profondément stupide dans ce film (pourtant éblouissant) et les choix que son scénariste opère.

Note globale 53

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SAGA MISSION IMPOSSIBLE =+

14 Avr

Mission Impossible était d’abord une série anglaise des années 1960. De celle-ci la Paramount a tiré un film et par extension une des sagas les plus connues de l’action. Pour une fois, la qualité est plutôt au rendez-vous et les films peuvent se distinguer, au moins les uns des autres (à l’instar de Die Hard).

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MISSION IMPOSSIBLE ***

3sur5 Première adaptation de la série éponyme des 60s, Mission Impossible est un film d’action et surtout une grosse production assez bizarre. Elle présente peu d’humour par rapport aux productions moyennes du genre, opte pour une tonalité franchement inquiétante qui n’entrave jamais sa dimension ludique. Au contraire, elle la dope.

Cette spécificité est due à la présence de Brian De Palma à la réalisation. Le cinéaste de l’illusion était taillé pour ce programme de suspense, d’action et de numéros de haute voltige. Le résultat est surprenant tant cette grosse machine épouse parfaitement ses thématiques personnelles. Les gadgets propres à la franchise se découvrent grâce à lui une vocation pertinente. La longue introduction relève du blockbuster baroque, mix franchement rare.

Juste avant Snake Eyes qui marquera la fin de son âge d’or, Brian De Palma intègre ici des acteurs français au casting : Jean Reno, Kristin Scott Thomas, Emmanuelle Béart. Leur présence contribue à cette sensation de fuite perpétuelle entre plusieurs mondes, entre les exigences du genre et des studios d’un côté, les tentations intimes de l’autre. De Palma tournera bientôt en Europe pendant toutes les années 2000, avec notamment Femme Fatale à Paris.

Note globale 66

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MISSION IMPOSSIBLE 2 ** 

3sur5   Volte/Face, en 1997, marque un grand retour de John Woo. La suite de Mission Impossible lui est alors confié. Elle va grignoter trois années de sa carrière, pour un résultat accueilli de façon mitigée et même nommé aux Razzie Awards.

S’il est difficile de les comparer en terme de valeur, John Woo et De Palma sont deux auteurs au style reconnaissable immédiatement, sachant s’adapter aux standards d’industries prenant commande chez eux. Les artifices de De Palma ont cependant une dimension théorique que Woo ignore copieusement.

Pourtant ce second opus ne manque pas de grâce. Si la nanardise de son scénario (le virus « la chimère ») vient renforcer le décalage, il est aussi un monstre d’adrénaline. Le style est sophistiqué et les ingrédients les plus aguicheurs sont là, avec Thandie Newton en équivalent de James Bond girl, des courses aériennes, des moments de tension redoutables et un duel entre deux super-héros ténébreux pleins de super-pouvoirs technologiques, Tom Cruise et Dougray Scott.

Par la suite, la tendance s’est confirmée : Mission Impossible 2 demeure le mal-aimé de la saga. C’est tout de même un joli blockbuster, peu enclin à irriguer le cerveau, mais stimulant pour le reste.

Note globale 56

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Suggestions… Broken Arrow

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MISSION IMPOSSIBLE 3 **

2sur5  Pour le troisième opus, nouveau virtuose malin et génial cette fois encore, JJ Abrams, créateur de Alias et metteur en scène de Lost. Les critiques et les spécialistes ont beaucoup aimé, voir se sont emballés pour ce Mission:Impossible 3 en allant jusqu’à y voir un renouveau de l’action.

Connerie. Ce qui cloche de A à Z dans cet opus tant loué, c’est son orientation de serial matiné d’une gravité sans objet et d’invraisemblances exagérées. Tout a beau être permis, il faut aussi que quelque chose de solide se tienne, traverse le récit, permette à l’action de graviter autour d’une réalité saillante qui viendrait plus tard refléter les succès. Ici il n’y a rien de ça, on court, on s’agite, on s’ennuie. En plus, lorsque Cruise se retrouve submergé, JJ Abrams rate l’occasion de faire vivre sa solitude, ce qui alimentait fortement des films d’action modèles comme Le Fugitif ou Volte Face.

Et comme dans une vulgaire série télé de quarante-cinq minutes, on révèle le faux climax en introduction. Pour autant (et malgré cet « anti-Dieu »), la flamboyance nanardesque (ou naveteuse) du second opus n’est plus là. Et on s’amuse moins, c’est catégorique, sauf du clin-d’oeil à Top Gun avec Tom en moto. On retrouve toutefois une chose qui s’y était perdu : l’importance du déguisement et du timing. C’est court, mais ça remplit bien les cases. Notez aussi Philipp Seymour Hoffman en méchant bien troussé.

Note globale 52

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Suggestions… Looper + Robocop 2014

 

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MISSION IMPOSSIBLE 4 : PROTOCOLE FANTÔME ***

3sur5 Brad Bird s’est illustré dans l’animation, d’abord avec Le Géant de Fer, puis pour Pixar Les Indestructibles et Ratatouille. Qui aurait cru que c’est un auteur avec ce genre de CV qui viendrait doper l’action movie gratuit et décomplexé ? À une époque où celui-ci a perdu ses lettres de noblesse (au point de pousser à la résurrection catastrophique de la franchise Die Hard), c’est assez providentiel.

Protocole Fantôme est le blockbuster excitant par excellence. Dans une certaine mesure, cet opus se contente de repasser dans la galerie Mission Impossible, d’en aligner les gadgets et l’essence. Mais Brad Bird s’amuse aussi à semer des catastrophes, des bugs, des imprévus. À l’image de John Woo qui rompait avec l’angoisse et la solennité, Brad Bird se contente d’en mettre plein la vue et se surpasser d’une part, d’introduire des motivations, une vérité, à ses personnages et surtout de les lier. Il ne s’agit plus d’amour et de trahison mais d’une équipe soudée, pas du tout assortie mais extrêmement efficace.

On est maintenant très loin du premier Mission Impossible, mais revenus à peu près à son niveau. De ce film américain parmi les tous premiers tournés à Dubaï, les amateurs et concepteurs du genre se souviendront de quelques scènes-clés : l’effet d’optique dans un couloir du Kremlin voué à réjouir les analystes, la balade hors-piste au centième étage, la supercherie en deux espaces et la poursuite sous la tempête de sable.

Note globale 65

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SÉANCES EXPRESS n°10

4 Avr

> Nowhere (1997)*** (66)

> L’esprit de Caïn (thriller 1992)** (56)

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NOWHERE ***

3sur5  Sexe, drogues et solitude. Sorte de film punk sucré mais pas acidulé, Nowhere s’inscrit dans la lignée du précédent Doom Generation de Gregg Araki. Il reproduit les figurines du soap criard (intégrant des actrices de ce monde : Shannon Doherty, Rose McGowan) tout en méprisant son essence. Ce qui intéresse Araki, ce sont les ténèbres sous les ecstas. Son langage se fonde sur le goût de l’outrance et du paradoxe. Dans cette marche hystérique, des ados pressés mais surtout pas de devenir adulte se laissent dominer par leurs pulsions de vie et de mort, sans le moindre contrôle, sans chercher la nuance ni la sérénité. L’horreur, l’amour, parasites étouffés en vain même si leurs restes sont appréciés, reviennent à la charge pour gâcher la fête ou l’extase orchestrée.

Nowhere est un film psychédélique sur l’adolescence livrée à toutes les expérimentations, à la satisfaction aveugle et sans frein de ses désirs, mais également au vide existentiel. Blottie dans la vulgarité et l’effusion kitsch, elle ignore la réalité (dure en l’occurrence) du monde. La niaise Egg comme la virulente Mel vivent coupées de toute conscience, se rendant fragiles chacune à leur façon, disposées à marcher dans les pas de ceux qui les priveront de leur liberté. Cruel paradoxe, alors qu’elles mènent leur vie comme il leur plaît. Dark est le seul à s’en vouloir pour son indolence et percevoir les aspects les plus lourds, sombres et tristes de sa condition. C’est peut-être pour cette raison qu’il est le seul à voir distinctement ce tueur en série, reptile sorti de Godzilla ou du Monstre des Temps perdus, qui jamais ne s’en prendra à lui, tandis que les autres ne le voyant venir se trouvent transformés, littéralement, en cafards. Une excroissance pas plus irréelle ni surtout absurde que ceux qu’elle décime et qui l’ont créée, en lui prêtant une source extraterrestre, afin de se soustraire encore aux funestes notions de lucidité et de responsabilité.

Note globale 67

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Suggestions… Mysterious Skin + A Single Man + The Raspberry Reich + Summer of Sam

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L’ESPRIT DE CAÏN **

3sur5   Des opus de Brian De Palma, c’est l’un des moins aimés et estimés, pas forcément à tord. Dans L’esprit de Caïn, un savant fou inocule la schizophrénie (!) à des cobayes ; et notamment à son propre fils, dont nous assistons la dernière crise. En vérité, il s’agit d’un cas de personnalité multiple : cette confusion est à l’image de la dynamique foncièrement kitsch à l’œuvre dans L’esprit de Caïn.

Caricatural et même auto-parodique, ce nouvel hommage à Hitchcock (huit ans après le très conceptuel Body Double) use de procédés grandiloquents (voix-off avec léger écho pour signifier le monologue interne) et abonde dans le sens des visions oniriques, débouchant parfois sur des scènes proches du non-sens, amalgamant la narration et le délire de son schizo, John Lithgow (Trinité de Dexter). C’est du cinéma boursouflé avec plans séquences hypertrophiés et catastrophes s’avérant simples cauchemars sordides. Le film a un charme certain, renvoyant bien à son époque (le début des 90s). C’est aussi une démonstration de virtuosité, toutefois elle a quelque chose de poussif voir désuet. C’est beau mais jamais crédible, c’est (régulièrement) puissant mais ça esquive malgré soi l’émotion.

D’abord enthousiasmant, le film lasse, tout en étant ponctué de petits coups-d’éclats (la séquence avec les explications de la psychiatre, le twist – dernier plan pompé sur Ténèbres d’Argento). Malgré les performances formelles, le style est confus, d’ailleurs le principe du jumeau diabolique (désinhibé et conquérant, un peu son Pitt de Fight Club) échoue. Un DePalma mineur et caractéristique.

Note globale 56

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Note arrondie de 55 à 56 suite à la mise à jour générale des notes.

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Séances Express : 15, 14, 13, 12, 11, 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1

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BODY DOUBLE ++

22 Nov

 

body-double

C‘est l’un des films les plus importants de Brian De Palma et un produit phare des années 1980. Il connaît pourtant un échec critique à sa sortie, accumulant la plantade au box office et les sarcasmes, allant jusqu’à être nommé aux Razzie Awards. Une injustice, mais surtout une aberration sensationnelle compte tenu des compétences manifestes employées à l’écran. Brian ne pouvait que provoquer de telles réactions ; pourtant sous le maniérisme, nul cynisme.

 

D’abord Body Double, à l’instar d’Obsession notamment, s’inscrit ouvertement dans la filiation d’Alfred Hitchcock. Mais Body Double n’est pas davantage une simple relecture de Fenêtre sur cour qu’Obsession ne l’aurait été de Vertigo. De Palma le fétichiste transcende ses références et déploie son propre langage et ses images dans un espace où il fait entrer ses idoles. Il a pu être cynique, mais jamais il n’a été un copieur ; et s’il a du génie alors que les thèmes sont triviaux ou les genres infamants, louons le génie pour de si merveilleux enfantillages.

 

Énième hommage au cinéma, à son pouvoir et ses méthodes de mystification, Body Double est ouvertement roublard. Mais la particularité de De Palma est de faire le malin sans cacher son jeu, pour servir autant la démonstration que le divertissement. Il en résulte un spectacle où le kitsch futuriste et la modernité, mais celle des eighties, sont fait arts. On parcourt Body Double comme une galerie chic surchargée de dynamiques libidinales.

 

Tout ce luxe et cette évolution, ces lieux impeccables et cette Chemosphere ébouriffante (l’appartement prêté au héros), inspirent un plaisir sereinement régressif, où la mort peut venir comme le point final de cette sensation de confort et de plénitude. Nous voyons Body Double avec les yeux de Jack (Craig Wasson), acteur au chômage et individu totalement submergé dans un univers arrogant et solide, où il est sans ressource ni influence.

 

Jack n’est pas simplement un loser à Hollywood, c’est surtout un prisonnier volontaire qui vient de trouver un bunker où il se rassure et grâce auquel il trouve l’assurance nécessaire pour allez au-devant des épreuves et de dangereuses aventures. Les fantasmes du personnage commencent à rejoindre la réalité, si factice soit-elle ; il entre dans le conte de fées et il y joue sa partition avec succès.

 

Dans un esprit conceptuel et parodique (mais sincère, aimant ce qu’il affiche), De Palma amène le cinéma de prestige sur les plate-bandes de la série B, à moins que ce ne soit l’inverse. Conceptuel mais pratique : l’orfèvre jubile et ne manipule son public que pour mieux le gâter tout en l’invitant à choisir entre illusion consentie ou pleine conscience des arrières-plans, voir à prendre les deux.

 

La limite, c’est lorsque De Palma utilise son film au lieu de l’alimenter. Jusqu’au meurtre, c’est l’immense De Palma. Ensuite, le cinéaste emploie les citations et gonfle les caricatures pour affirmer un point de vue extérieur à ce manège, en réglant ses comptes avec les gérants de cet univers, autrement dit, les castrateurs des magiciens talentueux comme De Palma lui-même. Ils viennent abîmer la pureté des œuvres avec leur cahier des charges et leurs exigences mal placées. L’auteur de Blow Out exprime sa défiance voir son amertume envers Hollywood, dénonce les méthodes infâmes de l’Actor’s Studio.

 

Alors Body Double, le film-objet, est ainsi sacrifié. Il s’applique à lui-même un coup de perceuse mal introduit pour mourir sous ses propres coups avant de laisser son fantôme nous guider dans les coulisses. C’est irritant et démonstratif, mais ainsi comme Jack, De Palma arrache le masque de son adversaire. Il y a une sorte de revanche déguisée en masochisme qui rend cette dernière partie contrariante et en même temps, extrêmement puissante. Elle réussi finalement à renforcer la démarche générale de Body Double : célébrer avec goût et exubérance la capacité d’absorption du cinéma, au mépris des caprices du réel.

Note globale 91

 

Page Allocine & IMDB  + Zogarok Body Double sur Sens Critique

Suggestions… Blue Velvet + Chromosome 3 + Mulholland Drive

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LE BÛCHER DES VANITÉS =+

7 Nov

bucher vanités

Adaptation d’un best-seller de Tom Wolfe (1987), Le Bûcher des Vanités (1991) est un film théâtral et ambigu. D’abord poussif et grossier, il gagne en intérêt au fur et à mesure tout en laissant transparaître clairement sa nature. Sauf via Phantom of the Paradise et Outrages, De Palma s’est rarement investi à un niveau idéologique, politique ou philosophique (il semble peu concerné par ce qu’induit son Scarface). Il s’est aussi rarement autant amusé à donner dans le mauvais goût et flirter avec la vulgarité téléfilmique : Le Bûcher contient ainsi des passages au cheap inhabituel.

Fidèle au matériau original qui a sans doute flatté son propre cynisme, De Palma fait le portrait d’un New York hypocrite et mesquin, peuplé d’arrivistes et de voyous ordinaires du haut en bas de la chaîne alimentaire(Annie, la mère de la victime, subitement consolée par la perspective des 10 millions de $ de dommages et intérêts élevés se promettant à elle). Un journaliste minable en bénéficie : Peter Fallow (Bruce Willis), déjà tenu pour écrivain grâce à son livre sur une affaire gigantesque lancée par un de ses articles. Il était une fois Sherman MacCoy (Tom Hanks), courtier ultra-riche, victime du système et présenté comme une enflure finale au grand-public afin de garantir l’équilibre et protéger les vrais salauds. Peter Fallow s’est contenté de présenter son implication dans une obscure ratonnade ; les politiciens, les médias et la Justice vont faire de lui leur bouc-émissaire.

L’attention de Brian De Palma est tournée sur cet aspect et sur la descente aux enfers de Tom Hanks en premier lieu ; l’auteur de l’article occupe une place très secondaire, reflétant sa position de minable passant opportuniste bientôt précipité à l’avant-scène. À l’heure où les élections approchent, il faut une affaire avec un blanc afin d’amadouer la population du Bronx et les médias, devenir ‘politicaly correct’. Ce bourgeois blanc est le meilleur atout pour montrer que la justice est la même pour tous, bien que dans le tribunal de Freeman, l’ensemble des jugements concernent des noirs. De nombreux réseaux de pouvoirs tirent profit de la situation, y compris un pasteur noir très influent, toujours disposé à composer avec ses adversaires supposés à l’abri des regards.

De Palma voulu faire un film avec un discours social franc et prendre position ; si son regard est clair, l’engagement cependant est intuitif plutôt qu’idéologique ou même concret. Il n’attaque rien ni personne en particulier, mais plutôt l’harmonie de la société américaine à laquelle ne croiraient que les hypocrites ou les individus épargnés. C’est un discours fort qui peut être facilement dupliqué, autour duquel le réalisateur est en proie à quelques turpitudes. Son propos est souvent très appuyé, certains points du scénario peu réfléchis. Les qualités sont plutôt du côté de la synthèse et du casting extrêmement hétéroclite : entre Freeman, Willis, Hanks, Melanie Griffith et les autres, c’est un peu le choc des mondes, chacun étant confortablement installé dans un rôle de prédilection chamboulé par la tempête que constitue cette affaire et l’approche dissipée de De Palma.

Entre l’ironie rigolarde et le flegme virtuose, Le Bûcher des Vanités singe la tragédie, singe le lyrisme ou la grandiloquence : celui de la chute, celui de la rémission, celui des postures politiques diverses. Il nous met avec force dans la position de Sherman MacCoy et ainsi impliqués nous éprouvons un sentiment d’injustice d’autant plus éprouvant qu’il est impossible de se justifier. En effet, Sherman n’est pas un pur innocent ; mais pour autant, il n’a pas si mal agi, il n’a jamais été mauvais ni hostile dans ses actions directes. De Palma sait faire vivre sa solitude ; il sait aussi faire de son sujet une farce incisive. Ainsi le spectacle s’achève sur un pur trollage, avec le discours ridicule de Morgan Freeman sur l’honnêteté : « rentrez chez vous et vivez honnêtement » ; pendant que nous faisons nos affaires ? Enfin Willis, au personnage insupportable, au jeu complaisant et pénible, interrompt son laïus sur la pureté de l’âme, car effectivement, les bénéfices valent bien une mise aux enchères.

Note globale 68

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Suggestions… Le Loup de Wall Street + Madame Doubtfire   

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