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THE GREAT ECSTASY OF ROBERT CARMICHAEL *

5 Nov

1sur5 Complètement con mais sait appâter et retenir l’attention, fût-ce à ses dépens. Soutient une vision bien clichée, apocalyptique et paresseuse de la société : voyez cette jeunesse désœuvrée, voyez ces médias (télévision, même les jeux vidéos qui absorbent leur attention !), voyez la drogue, la vulgarité. Il faut montrer les déterminismes, les familles prolétaires. Et bien sûr la propagande et la sévérité politique sont partout – la télé crache du Bush contre l’Iraq.

Par ses façons, le film veut commenter et accuser le monde entier. Mais absorbé par son style et des certitudes floues, il tire aussi brutalement qu’en vain. C’est un essai glauque de nouvel auteur soucieux de cogner, avec une marque certaine quoique voyante plutôt que neuve. Son style est un genre de glaciation à la Haneke (ou certains Chabrol comme La cérémonie) fusionnant avec Larry Clark, ou du Lanthimos (Canine) vivant et engagé, mais aussi simpliste.

En même temps il faut sonner dénonciateur lucide et pas simplement militant borné – ce serait basique ! Alors Great Ecstasy s’applique à esthétiser sans participer, mais quand même en laissant le point de vue des coupables être alimenté, sans soutenir celui éventuel des autres (antagonistes ou voisins). Air connu : réhabilitez ces coupables qui sont des victimes ; les victimes, elles, sont des cyniques qui ont réussi (ou alors mettons tout le monde à égalité sous le règne de la fatalité, surtout si ça essuie les crasses des turbulents) ! Les vingt dernières minutes de violence avec la maison assiégée ne font que traduire et valider en sourdine le ressentiment envers les riches blaireaux de ces petits crétins. On sent bien ces motifs d’agacement (mais l’envie, l’ignominie et la méchanceté sont massivement plus développées) que peuvent inspirer cet environnement ou la starlette en particulier – son discours d’optimiste de l’épanouissement, en mode rêve américain petit format en un contexte [et à une époque] où c’est ouvertement aberrant, mérite probablement une méchante fessée pour le réveiller ; la sanction qu’il récolte en fin de parcours reste délirante en plus de laisser le malaise se proliférer. On nous suggère de trouver des raisons à des crasses dont les cibles n’ont pour tort que d’être plus élégantes jusque dans leurs vices équivalents (égoïsme et mauvaise foi).

Naturellement on s’attarde sur le viol [pardonnez, j’ai spoilé le ‘grand moment’ utile à ‘tout remettre en perspective’] en musique (classique) – en bon héritier de Kubrick. Puis on enchaîne avec des images de guerre en archives – car chaque bêtise trouve sa source dans le Mal et la société, les responsabilités n’existent que du côté des plus grands ou des poseurs de limites, ne l’oublions jamais (les autres vivent aussi dans cet espace de semi-décrépitude mais peu importe, apprécions la complexité par le petit bout exclusif brandi par notre malin génie). Ou alors, Loach est rendu à un étage inaccessible, alors tant qu’à faire les auteurs de cette chose se sont fixés pour objectif un reboot d’Orange mécanique – il vaut mieux se crasher de très haut, ça produit davantage de dégâts et comme la digestion est plus lourde, par perplexité ou sur un malentendu on pourrait crier au chef-d’œuvre.

Note globale 32

Page IMDB   + Zogarok Great Ecstasy of Robert Carmichael sur Sens Critique

Suggestions… Paranoid Park, The Bunny Game, Tenemos la carne, Happy End/Haneke, Le Corbeau, Le Triomphe de la Volonté, It’s a free world, Mise à mort du cerf sacré, Seul contre tous 

Scénario/Écriture (3), Casting/Personnages (2), Dialogues (3), Son/Musique-BO (6), Esthétique/Mise en scène (5), Visuel/Photo-technique (6), Originalité (3), Ambition (8), Audace (7), Discours/Morale (2), Intensité/Implication (5), Pertinence/Cohérence (2)

Les +

  • une certaine recherche et des bonnes pistes côté son
  • fabrique une grosse mécanique cohérente et efficace même si c’est de la merde surfaite, puérile et fausse(ment compliquée)
  • sait disséminer des bouts de réflexion ou plutôt des terreaux, qui font rester en espérant assister à un décollage, une progression, un engagement plus fin ou sérieux

Les –

  • énième baudruche taillée pour choquer et paraître grande à travers ce choc
  • débile, crétin au mieux
  • personnages et écriture misérables, délaissés, instrumentaux au summum de leur usage
  • originalité résiduelle, seuls les jeunes/novices pourront être leurrés
  • et en plus la matière à choquer est rachitique (une fois dégagées les graisses) et médiocre !

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SWALLOW **

26 Août

2sur5 Ce pourrait être une belle histoire d’émancipation, ou celle d’une personne allant au bout de ses forces pour en sortir, au moins, éclairée sur son cas. Et ça l’est largement. Ça pouvait être politisé, ça l’est effectivement. Sauf que ce n’est exploitable que par les féministes ou les pourfendeurs de l’oppression, laquelle est nécessairement au moins blanche, souvent mais pas systématiquement bourgeoise. Si on veut aborder la maladie de Pica, la culpabilité, tout ce qui fait la nature du malaise d’Hunter, on ne pourra reprendre honnêtement le film qu’en venant à ces considérations-là.

Le scénario est faible et amorphe, mais le portrait d’Hunter soigné. Elle se sent stupide, misérable, potiche décevante dans un milieu froid planant au-dessus d’elle. Elle a la face rougissante, semble toujours apeurée, hébétée, soumise par défaut, accablée par la honte et l’ennui. Son mari est un cas désespéré qui n’a même pas le charme moisi de celui de Maudie ; la surveillance et le contrôle se substituent à tout effort de compréhension, il n’envisage pas de laisser à son épouse un espace à elle. C’est le type humain ne se posant jamais de questions, sauf peut-être au travail, en restant sur les chemins tracés, dont il profite depuis qu’il est né et dont rien ne semble devoir le déloger. Il s’attend naturellement à ce que n’importe qui dans son champ se satisfasse de ce régime qui le fait se porter si bien.

Cette ingestion d’objets arrive au moment où Hunter est consacrée objet et par là soudée à la famille. Enceinte, elle n’a d’autres choix que de constater sa nature de pondeuse. Pire, sa grossesse est un événement entre sa mère et son mari, avant d’en être un entre elle et lui. Hunter est une propriété familiale allouée au fils garanti 0% prodigue ; elle risque de devenir un investissement défectueux – et embarrassant. Autour d’elle, bien sûr personne n’est apte à venir à son secours, mais surtout tout le monde semble aveugle à sa détresse ; les deux femmes d’âge mûr qu’elle fréquente de force peuvent apercevoir le piège où elle se trouve, mais elles en sont complices et en voient surtout les bénéfices – simplement, il y a ces petits tracas, cette insatisfaction légère mais récurrente (belle-maman se serait vue artiste – quelle dérive bohémienne) ; sans doute ces choses-là passent avec le temps ! Heureusement Hunter la masochiste, excédée par son impuissance, trouve encore, ponctuellement, des ressources pour tenter de prendre l’ascendant (elle se montre sexuellement brutale, s’invite à la fête d’une famille qui s’est fait en dépit de son existence).

Forcément on peut ressentir une sympathie pour cette femme aliénée, ou des sentiments plus forts, d’autant que la peinture, si elle est schématique, est efficace. Sauf qu’il vient un moment où approcher les profondeurs doit obligatoirement conduire à projeter des lectures politisées, tirées d’un catalogue étroit, celui des valeurs montantes ou écrasantes de l’époque (ce que nous évitent Jumbo ou La pianiste). D’abord cette obsession, déjà vieille, du traumatisme antérieur, amenant toujours à remettre en cause la famille et en faire un lieu d’horreur. La filiation naturelle doit être malsaine ! Les gens en souffrance doivent l’être à cause d’exactions dans leur passé ! Ensuite, qui est le seul allié ? Pas franc tout de suite car empêché, c’est l’employé d’origine syrienne. En tant qu’étranger et ayant connu la guerre, lui-même a une barrière avec l’environnement et ne s’y montre ni particulièrement à l’aise, ni enthousiaste. Pourquoi pas ; c’est cohérent. Mais cela s’inscrit dans un contexte particulier et parmi un cumul de marqueurs. Avec une conclusion où l’avortement est le vecteur de la libération, puis un plan-séquence final tire-larmes tout en dignité ordinaire, où défilent des femmes dans des toilettes publiques. Et tout ça placé à côté de la mise à l’index du mâle, blanc, privilégié. Toujours on y revient, pour longtemps on y reviendra.

À une époque les problèmes venaient du capitalisme ; maintenant de l’homme (blanc cis privilégié) ; demain éventuellement des nouveaux entrants non homologués, venant pomper insolemment les ressources, avec l’arrogance et l’insouciance léguée par leurs ancêtres toxiques. Tous ces axes peuvent se cumuler (on est loin de manquer de communistes quelque soit leurs nuances et leurs apparences), mais que les porte-paroles des premiers n’oublient pas qu’avec le temps, leurs grilles de lectures et leurs réformes passent d’essentiel à simple agrément ; le progrès-liquidation du genre humain n’aura qu’un besoin formel de leurs services. C’est à se demander si jeter le petit colon blanc/patriarcal en devenir dans les eaux usées n’est pas une erreur archaïque du film ; car cet amas de cellule est parti souiller la communauté !

Même le point le plus constructif du film semble enchaîné à cette dégradation généralisée ; les deux seuls hommes auxquels on accorde une épaisseur et des circonstances atténuantes (ils respirent tandis qu’Hunter est à l’agonie) sont intimement cassés, minés par leur passé (le second est joué par un abonné des rôles de déviants et de pervers). Et par leur position, ils ne sont pas en mesure d’être des menaces pour Hunter. Voilà tout ce qui semble tolérable : des gens également piégés et de préférence à un étage social inférieur. Eux peuvent avoir un petit temps d’expression, tant qu’il entre en résonance avec un modèle de victime contemporain autrement relevé (et coutumier).

Note globale 52

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Suggestions…

Les+

  • joli portrait d’une maso et aliénée
  • photo
  • interprètes excellents

Les-

  • discours
  • faible scénario
  • peu d’existence hors de la démonstration

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LA PLATEFORME ***

1 Août

3sur5  Thriller rude et fable pessimiste, où l’apprentissage de la survie dans un système impitoyable mène à diverses formes de résignation, soumission ou corruption – autant de petites damnations permettant de réaliser que toute société est une prison se maintenant sur la merde de ses otages/habitants.

Comme c’est d’abord une métaphore, le film laisse se cultiver des inconsistances et des incongruences mineures ou a-priori tolérables ; jusqu’à cette dernière partie mettant en relief l’aberration de sa construction. Tout ce que notre Don Quichotte et son acolyte y tentent devrait avoir été expérimenté depuis longtemps – ne serait-ce que d’un point de vue primaire ou de survie : pourquoi les gens ne recevant rien n’ont pas tenté de descendre jusqu’au-bout, puis de remonter sur la table ? Avaient-ils simplement peur de la sanction ? De la nouveauté ?

Puis j’ai été déçu par le petit tour de passe-passe final que je qualifierais de banal et pleutre si on appuyait pas au même moment sur l’épouvantable levier ‘Le truc.. c’est qu’il est mort [peut-être – mais peut-être pas – cho’cun son ‘terprétation]’. Il faut être honnête même si on a aimé le film : ceux qui l’ont conçu (spécialement ceux qui l’ont écrit – avec malice et superficialité, faisant du scénario le point négatif) ignoraient comment le boucler ou le justifier. Heureusement la partie technique est plus astucieuse (pour camoufler les faibles ressources et décors) et la partie sonore est délicieusement stressante (certains instants m’ont évoqué Alice Madness Returns). Le portrait de l’Humanité est plus accompli – et sombre, voire stérile.

Ainsi la logique du film ne mène qu’à un mix de démobilisation et au choix, de nihilisme ou de vaine moralisation ; les optimistes apprécieront la planification des vertueuses niaiseries par lesquelles les refaiseurs de monde se réchauffent (‘la prochaine génération porte notre espoir’) ; tout le monde verra que la bienveillance et l’empathie deviennent un luxe dans un univers carcéral, arbitraire et hiérarchique [à moins qu’il en existe des hédonistes – pour ça il faudra des coopérations ou des révolutions] – et que si on s’obstine [dans la voie de la justice sociale], il faut en passer par l’autoritarisme sans la moindre garantie de réussite, avec pour seules certitudes des sacrifices [humains] et de la gesticulation présomptueuse.

Note globale 68

Page IMDB   + Zogarok La plateforme sur Sens Critique

Suggestions… Parasite + Viral + Snowpiercer + Cube + Annihilation + Malveillance + Killer Joe

Les+

  • deux premiers partenaires de cellule géniaux
  • intense, viscéral
  • bon rythme, des dialogues succulents, humour
  • bande-son assez brillante
  • mise en scène efficace, violente à l’occasion…

Les-

  • scénario médiocrement bâti, le ‘concept’ assure l’essentiel
  • vingt dernières minutes douteuses
  • inconsistances puis invraisemblances majeures
  • regard stérile et ambiguïté absurde entre l’aspiration au sursaut et la résignation totale
  • … un peu grossière ou ‘récupératrice’ aussi

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INCENDIES **

19 Avr

incendies

2sur5 Quatrième long du réalisateur de Prisoners et Enemy, Incendies est celui de sa révélation au grand-public (record de téléchargements pour un film francophone sur iTunes). Adaptation d’une pièce de théâtre ayant connu elle-même un grand succès critique et commercial (Incendies de Wajdi Mouawad), le film a été mis à l’honneur aux Oscars et a triomphé au Prix Jutra, équivalent des Césars pour le Canada. Il raconte la quête d’une jeune femme (rejoint par son frère), abandonnant le Québec pour tenter de retrouver la trace de sa mère au Moyen-Orient, dans un contexte de guerre civile. Denis Villeneuve présente cette chronique sous la forme de récits croisés, avec flash-backs. Il arbore une simplicité rigoureuse, découpe son film en chapitres introduits par des titres en lettres rouges tel que ‘les Jumeaux’, ‘le Sud’, ‘Deressa’, ‘Kfar Ryat’, ‘La femme qui chante’, etc.

Incendies est un produit très abouti techniquement, suscitant le respect au minimum par sa maîtrise. Il se pare d’un BO percutante, dans l’air du temps, à l’image de l’ensemble : du goût peut-être, un style certainement, une substance faisant défaut. Le thème des racines comme la dimension politique servent de décors et rien n’est essentiel. L’histoire pourra inhiber le sens critique en jouant sur la corde sensible du Moyen-Orient et de ses relations à l’Occident et ses valeurs, le film engendre une certaine indifférence en n’accordant de valeur qu’à une petite histoire basée sur un (un seul) faux mystère. Le film gagne d’ailleurs en intérêt quand celui-ci est brisé, en milieu de parcours, avec un coup-d’oeil en prison où Villeneuve montre une situation en prenant des pincettes, restant bien figé mais à distance, sans discourir et sans non plus vouloir accélérer le mouvement ou gagner en profondeur dans le récit familial.

Sur la fin les révélations s’emboîtent puis culminent lors d’un dénouement destiné à terrasser le spectateur. Les films de Villeneuve ont cette particularité d’être impeccables et sans rayonnement. Les images pourraient être percutantes mais le cinéaste relaie chirurgicalement, feint l’absence et soustrait tout ce qui pourrait ressembler à du commentaire. C’est le formalisme pur, au sens le plus frustrant. Ce langage atone et minimaliste, mis en boîte avec solennité, ne parle pas aux tripes et évite tout dialogue. Si Prisoners et Enemy peuvent être un peu frustrants, l’urgence et l’angoisse qui les caractérisaient apportaient une énergie totalement absente ici. Incendies n’est pas le plus mauvais de ces trois films, il n’est juste ni bon ni mauvais, c’est l’éblouissement inerte incarné, l’activement non-polarisé par excellence.

Note globale 48

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Suggestions… Le Sacrifice/Tarkovski

Note ajustée de 47 à 48 suite à l’éviction des notes impaires.

 

6

Denis Villeneuve sur Zogarok >> Blade Runner 2049 + Premier contact + Sicario + Enemy + Prisoners + Incendies + Next Floor

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UROTSUKIDOJI : LE FILM, LA SAGA, LA MARQUE

17 Nov

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Les Urotsukidoji sont une saga d’anime parfois classés hentai, mais constituant de véritables films, avec même des histoires assez riches. Les deux premiers opus jouissent de qualités techniques supérieures et dans l’ensemble, les scénarios sont bons, la forme élaborée même si sa qualité est propre à son époque.

Seul le premier Urotsukidoji est parfois référencé dans les bases de données (Allocine ou Sens Critique notamment) et les autres opus ne sont normalement pas cités lorsqu’on évoque le nom de Urotsukidoji.

Voici comment se décline le label Urotsukidoji – et ce sujet a un grand besoin d’éclaircissement :

 

Manga papier.

La série d’anime (OAV) . Treize épisodes ; puis trois dans la « Nouvelle saga » de 2002. La durée et la cible des épisodes n’ont pas de continuité, sauf dans le cadre des six films singuliers qu’elles composent.

Les six films (rassemblant les 16 épisodes).

Dès le second opus, les OAV sont conçues en vue d’être restituées dans le cadre du long-métrage – et sont connues principalement par ce biais. Sauf confusion des encyclopédies, on note six films mais pas 16 opus.

 

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urotsukidoji 1

UROTSUKIDOJI 1, LA LEGENDE DU DEMON ***

4sur5  Sade et Paprika se sont coalisés pour engendrer ce monstre. Urotsukidoji est d’abord un manga hentai conçu en 1986 pour une revue de mangas pour adultes (des seinen) par Toshio Maeda. Contrairement à ses pairs, Maeda est capable de donner du sens à ses dessins érotiques, d’y apporter du soin et une certaine vraisemblance. Mais son manga n’aurait jamais été célèbre sans l’adaptation animée.

Entre 1987 et 1989, trois anime portent son œuvre sur grand-écran. Ils seront fusionnés en un film, nommé La légende du démon pour l’exploitation française. Dans ce dernier, de nombreuses séquences sont coupées : les 23 minutes d’ultraviolence. Urotsukidoji devient néanmoins culte et un quart de siècle plus tard la version non-censurée du film est relativement accessible, sans avoir à passer par les épisodes. Par la suite, cinq autres films réuniront une dizaine de nouveaux épisodes, mais le premier Urotsukidoji est considéré comme le meilleur et la marque Urotsukidoji est généralement citée en référence à lui seul.

Urotsukidoji, c’est la perversion des anime japonais à son paroxysme. Le personnage principal, Nagumo, loser voyeur au début, devient le réceptacle d’un démon dont le but est de rassembler  »les » trois mondes. Et déjà les démons et jiyujinkai s’abattent sur le monde des humains pour semer le chaos dans leurs villes et surtout violer leurs jeunes représentants avec une préférence quasi exclusive pour les filles innocentes et pures. Lorsque la fusion des trois mondes sera accomplie, le Nouveau Monde sera un gigantesque parc trash où ces créatures prédatrices pourront exulter dans l’horreur, comme elles le font déjà dans ces 23 minutes.

Lors de ces séances d’extase morbide, les cibles passives reçoivent une décharge agressive sans commune mesure. C’est là que se généralise un élément dont la galaxie hentai ne se remettra jamais : les tentacules en guise de phallus mutants, armes sexuelles plus sensuelles que la foreuse pénienne de Tetsuo mais à l’hostilité subtile et illimitée. Ces tentacules s’inscrivent dans un lot de séquences érotico-gore, quasiment porno-gore même, manifestant une grande puissance d’imagination. Urotsukidoji est un spectacle extrême et brutal, comprenant le sens et la source de ces extases terrifiantes.

Cette conversion d’instincts primaires et antagonistes en déchaînement exotique et raffiné a une vertu : elle représente toute la branche sexuelle et sadique d’un éventuel Apocalypse. Cette jouissance dans un contexte sans limites est justement le meilleur argument promotionnel de tout chantre de l’Apocalypse, du chaos ou de la dégradation. Cette dimension ne se cantonne pas aux fameuses séquences de sexe, dont la proportion dans le métrage est dérisoire par rapport à un hentai traditionnel. Dans Urotsukidoji, le trash et l’invention s’insinuent dans chaque angle du cadre pour doper le tout : et à chaque instant. Le spectacle est vicieux jusqu’au-bout, l’outrance en fait partie également.

Il y a la part vulgaire : les culottes d’étudiantes, le héros minable, les phrasés aussi basiques que les les expérimentations sont raffinées. Mais le véritable sujet c’est cette intempérance absolue, cette furie blobesque, transgression par-delà la vulgarité ou l’élitisme. Face à ce délire visuel dément, Maeda a fait part de sa stupéfaction et de sa révolte tout en reconnaissant être admiratif. Le réalisateur Hideki Takayama dira lui : « Rien ne provoque une réponse aussi forte chez l’être humain que le sexe ou la violence. La fusion des deux est donc très puissante. » Il a raison et son œuvre est au-delà du désespoir car elle déroule le programme d’un Enfer compensatoire pour les déçus de l’Humanité aux appétitis impertinents ; mais aussi au-delà de l’horreur car elle constitue sinon une délectation malsaine, au moins un motif de sidération qu’aucun curieux ne peut bouder.

Note globale 76

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Suggestions… Perfect Blue

Voir le film sur YouTube : FRANCAIS, ANGLAIS

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UROTSUKIDOJI 2, L’ENFANT ERRANT **

4sur5  La suite directe de Urotsukidoji est moins connue mais parfaitement à la hauteur. Les viols tentaculaires, attaques sur la ville, crises organiques et autres orgies sadiennes sont à nouveau au programme. L’histoire se déroule peu après celle du premier opus et en reprend quelques personnages, dont Nagumo et la mascotte (l’espèce de singe).

Urotsukidoji avait une option : la surenchère. Il en prend le parti et se montre encore plus machiavélique, violent et explicite, cela dès sa redoutable intro de 8 minutes. Urotsukidoji 2 ne fait pas que persévérer dans la quantité ou la radicalité. Là où le premier opus était déjanté et très éparpillé, celui-ci se montre plus concentré et structuré.

Les scènes érotico-gores sont plus lisibles. L’aspect estudiantin et léger est plus présent, vire parfois à la grivoiserie, sans être aussi expressément vicieux que dans le premier opus ; d’ailleurs, l’allégresse est répandue quand le Monde est préservé des caprices sadiques. Ceux-là justifient des séquences très virulentes, où s’impose une broyeuse pénétrant puis finalement atomisant ses victimes. La fantaisie est totale : cette fois, Hitler et Satan, carrément, sont sur la rampe. Préférant toujours les instincts dévoyés à l’usage de la matière grise, Urotsukidoji 2 manie un certain langage théologique ou occulte et là aussi, se montre plus accompli et précis que son prédécesseur.

Le Graal représenté par le Nouveau Monde est affiché au grand jour, lui qui permettra une domination notamment sexuelle, une emprise sur les corps et une annihilation des esprits. Avec cette plus grande attention pour les motivations des démons et autres obsédés de la réunion des trois mondes, Urotsukidoji 2 fait écho aux théories complotistes. Il reflète les fantasmes alimentant le mythe des reptiliens mais aussi toutes sortes d’aspirations ésotériques qui ont pu occuper quelques hommes de pouvoir les plus haut placés.

Note globale 75

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Suggestions…

Voir le film sur YouTube : FRANÇAIS  

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UROTSUKIDOJI 3, LE RETOUR DU DÉMON ***

3sur5 Le troisième opus de la saga marque une rupture. Le niveau est moindre, la fièvre aussi retombe un peu. Il n’empêche que le spectacle vaut largement la peine de sacrifier 3h30, si on a été convaincu par les deux premiers essais. Urotsukidoji 3 se partage entre 4 épisodes cumulant 210 minutes, dont 56 pour le premier. Il chasse la plupart des protagonistes de référence jusqu’alors ainsi que leurs intrigues pour se situer dans un univers déjà acquis aux lois des démons, où certaines forces travaillent là aussi à rassembler les trois mondes.

La plupart des créatures et éléments introduits dans ce film sont totalement étrangers au manga originel et il en sera de même par la suite désormais. Urotsukidoji 3 est une mutation achevée vers le soap opera, voir le space opera. Il est très ambitieux et cela vaut dans un premier temps un retour à l’éparpillement de La légende du démon, décuplé par 10. Les 4 épisodes marquent quatre temps différents, bien marqués ; dans le second, la tragédie romantique occupe l’essentiel du terrain. Dans un climat mélangeant étrangement langueur et fureur, de nombreuses thématiques malines sont traitées.

Parmi les prédicateurs du Nouveau Monde, le nouveau Nagumo mise sur la séduction pour asservir et accomplir ses desseins, distribuant les plaisirs et laissant croire à ses sujets qu’il a pour eux un semblant d’affection ou d’amour. C’est un portrait du Mal très ingénieux, reflétant certainement le lot commun des gourous, mais surtout le mode de domination le plus répandu dans les périodes où règnent démoralisation, divertissement et immanence la plus bête et sommaire.

Au niveau narratif, ce troisième opus casse ce qui distinguait Urotsukidoji pour rejoindre un semblant d’heroic fantasy. L’univers reste toutefois trop singulier pour diluer Urotsukidoji dans une sous-galaxie précise. Les scènes de sexe sont plus rares mais basculent clairement dans le porno désormais, avec des séquences particulièrement odieuses (la longue tournante avec les monstres du troisième épisode) et d’une inventivité formidable ; intérieur des organes et phallus inside, voici la pénétration vue de l’intérieur – vingt ans avant Enter the Void.

En marge du défouloir, un romantisme cabalien. Le sentimentalisme de Urotsukidoji 3 est adulte et déviant, il est aussi omniprésent. Une certaine tendresse est là, au milieu de la haine et des ignominies. L’idylle entre la princesse et sa bête puissante et protectrice elle aussi vise nos instincts primaires, pour le meilleur et le pire. Toutefois la belle Alector n’est pas cernée seulement par son amant rebelle Buju, car un papa possessif est également de la partie. Ce climat incestueux se consacrera lors d’une abominable scène de freak porn, gargantuesque et repoussante contrairement aux autres.

Dans l’ensemble, Urotsukidoji 3 est un grand plaisir, quelquefois hagard (premier des quatre épisodes), avec des morceaux de bravoure touchés par la grâce, peut-être une once de gras en trop. Il est objectivement plus calme et tempéré, d’ailleurs du gore et de la mort, c’est surtout l’odeur qui répond présent. Une violence inouïe est cependant omniprésente, au travers de chacune des scènes, alors que les deux premiers opus avaient leurs séquences purement réalistes, même si c’étaient souvent des intersections plutôt que des séquences valant pour elles-mêmes.

Note globale 69

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Suggestions…

Voir le film sur CineMay

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UROTSUKIDOJI 4, APOCALYPSE *

2sur5 Après la confirmation du second opus et la transformation valable du troisième, les restes. Apocalypse pour la France, Inferno Road ailleurs, Urotsukidoji 4 s’étale sur plus de deux heures et comprend trois épisodes. Il propose une version rabougrie de ce qui a été connu jusqu’à ce jour et emmène la marque vers l’anecdote. Le trip soap opera occupe la moitié de la place, les affaires du gang du Village des Damnés en prennent un tiers, le reste est sexe laborieux.

Il y a quelques beaux plans, comme celui de la jeune fille au clair de lune (partie 3) ou la balade dans ce grand château enveloppé dans une nuit bleue. Une inspiration du côté de Alien et Giger se fait sentir. Le versant graphique du film est de loin son meilleur atout. Pour le reste, le rapport avec la marque s’en tient aux pénétrations par tentacules et à la reprise de quelques personnages clés dont Nagumo.

C’est routinier, aseptisé, sans violence. Limite paisible. Le film aligne des scènes X tout à fait conventionnelles, avec une espèce d’orientalisme de circonstance pour l’orgie du début. L’intérêt est nul (comme l’essentiel de la partie 2) et même sur son terrain graveleux, le film fait défaut. En effet les spectateurs tomberont normalement avec des copies où les recoins explicites sont floutés – ce qui est pour le moins ballot pour cet hentai softcore.

Note globale 39

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Suggestions… Guinea Pig 4  

Voir le film sur VoirFilms ou CineMay

 

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UROTSUKIDOJI 5, THE FINAL CHAPTER **

3sur5  Urotsukidoji 5 est un opus à part. Il contient un seul épisode (de 60 minutes), est quasiment introuvable, pas référencé même sur les sites spécialisés (comme Cinemasie) et il y a très peu d’informations sur lui. Il reprend à partir d’une scène du premier opus, La légende du démon, où Nagumo se transforme alors qu’il fait l’amour à une camarade timide.

Le film a de franches qualités formelles et plastiques. Dans la franchise, la bande-son a souvent été assez envoûtante, stéréotypée aussi : ici elle est à son meilleur, plus expressive et sensuelle que jamais. Quand à la qualité de l’image, elle situe ce cinquième opus au-dessus du lot ; les deux premiers opus n’ayant pas subis une remastérisation qui serait bienvenue, les 3 et 4 souffrant et profitant à la fois de la désuétude du trait, tandis que le 6e est très vaguement semi-numérisé et utilise des couleurs pastelles criardes.

Il s’agit bien de la propreté de l’image : sur le plan esthétique, abstrait et concret, Urotsukidoji 5 est également compétitif ! Il offre quelques effets de perspectives gratuits, de jolis aperçus caverneux et son mysticisme accru lui profite. En effet, si à l’heure de lutter contre les créatures du Mal, les scènes  »hentai » se raréfient, le film dégage beaucoup de force et d’imagination. Urotsukidoji 4 a volé son titre  »Apocalypse » à celui-ci !

Car c’est dans The Final Chapter que s’abattent sur la ville les monstres grotesques aperçus au début de la saga, que vient l’heure de tous les accomplissements. Certaines créations du film évoquent Laloux qui aurait croisé le chemin d’un Gilliam d’humeur grivoise, comme le vaisseau avec son vagin géant. De manière générale, le film est audacieux ; à un degré plus anecdotique, il sort de l’exclusivité hétéro des cinq autres.

Si on retrouve les échanges de fluides interespèces (monstres/ humaines), l’originalité tient aussi à la présence de cet androgyne à temps partiel. Pour le reste, Urotsukidoji 5 décevra les amateurs de chair fraîche, lesquels se régaleront dans les opus 4 et 6. De plus, comme pour le 4e opus et en raison de la commercialisation très limitée de The Final Chapter, les parties intimes en émulation apparaîtront normalement floutées.

Note globale 59

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Suggestions… La Planète Sauvage

Voir le film sur MyHentaiOnline  

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UROTSUKIDOJI 6, NOUVELLE SAGA **

2sur5  Après Kenketsu Hōrō hen (Apocalypse) et Kanketsu Hen, Urotsukidoji 6 est le dernier opus de la saga. Il la fait reprendre en 2002 après six ans de vide. Argument : c’est un reboot du premier volet (La légende du démon), composé de trois parties durant ensemble 131 minutes. Comme les deux premiers opus, celui-ci se veut donc directement lié aux mangas de Toshio Maeda (les trois précédents s’en étant affranchis).

Concrètement, cette nouvelle version est très différente. Il y a beaucoup d’éléments nouveaux et d’orientations à contre-courant. Une personnification de la Mort s’invite, un gang en lien avec le démon déguisé en Ozaki investi le troisième épisode. Les scènes légères sont beaucoup plus présentes, toutes liées à un sentimentalisme débridé, renforçant les contrastes entre l’innocence et la malveillance. Les enjeux sont différés, les forces du Mal moins virulentes que dans les deux premiers opus : sur l’échelle du malsain en revanche il n’y a pas de retard.

Plus de scènes érotico, mais sans gore : sauf celles reprises à La légende du démon. La seconde partie s’ouvre sur une longue scène purement porno. Nouvelle Saga adopte un nouveau look très commun, ne réserve pas de soin particuliers aux dessins, opère quelques petites modifications : les traits de Nagumo tirent vers le renard, la petite mascotte volante est passée du bleu ou noir. Pour les scènes faisant écho au premier opus, la forme est différente, plus expéditive et crade encore. Mais quelle marge dans leurs puissances respectives ! C’est le prix ingrat de cet abattage banal et ce remplissage.

Une scène sur deux lorgne vers le soap insipide, l’autre vers la SF pataude ou les morceaux de bravoure. Par contre il y a le cas Ozaki. L’homme par qui l’apocalypse arrive a changé depuis 1987. Possédé par le démon, il reste toujours lui-même la plupart du temps. Ce personnage ambigu est à jeu égal avec Nagumo. C’est sur ce terrain, celui des individus et même du reflet d’une Humanité basique, sensorielle, que Nouvelle Saga tire son épingle du jeu. Le spectateur est ainsi plus proche des victimes, au lieu de simplement les voir objetisées par les créatures.

Par exemple ici, lors de la dernière agression spectaculaire, plan de la fille : de près, à scruter son visage, entendre sa déglutition. Ce petit aparté laisse le temps d’apercevoir la réalité d’une personne et de sa chair. Dans le premier Urotsukidoji, l’hégémonie du Mal se manifestait par-dessus tout et on voyait à peine ces gens, finalement. Ici on les voit avant qu’ils ne soient sacrifiés ; comme on suit les errances de l’amoureuse d’Ozaki. Entre perversion effroyable et sensiblerie, cet opus s’approche du niveau du précédent, mais son lot de surprises (comme le phallus doré) est moindre et l’effet yo-yo garanti.

Note globale 53

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