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LA CHUTE DE LA MAISON USHER =+

11 Nov

la chute maison usher

En 1960 Roger Corman, réalisateur prolifique de films d’épouvante très désuets, réalise pour la première fois un film de studio avec un budget conséquent, en tout cas par rapport à ses moyens quasi amateurs jusque-là. Il tourne donc une adaptation de La chute de la maison Usher, nouvelle de l’auteur pionnier Edgar Allan Poe. Elle fut déjà traduite à l’écran notamment par Jean Epstein en 1928 pour une sorte de cauchemar lorgnant vers le délire, digne des surréalistes ou d’Eraserhead.

Cette adaptation-là est bien plus sage, mais elle engendre en revanche un univers que Corman va très rapidement affirmer et exploiter par la suite. Sans le savoir, il vient de lancer une série de huit films inspirés de Poe qu’il tournera avec Vincent Price dans le rôle principal (sauf pour le 3e). La même équipe sera généralement au rendez-vous, y compris au-delà de cette saga pour le réalisateur. Cependant à ce stade les moyens sont encore étriqués, d’où le statisme de la mise en scène. Il est compensé avec élégance et sophistication.

Les dialogues sont abondants et volontiers lyriques, tâchant de restituer l’ampleur psychique des écrits de Poe. Les paysages, montés en studios et quasiment tous en intérieurs, sont déclinés sous tous les angles et l’illusion fonctionne bien, même si le sentiment d’assister à un dérivé de pièce de théâtre peut s’imposer et résister. Corman arrive à dominer toutes ces limites et déploie son ambiance à fond. Tout est très calculé et ‘lourd’ à un degré transcendant la caricature, car simultanément la gravité et l’urgence du phénomène est pleinement ressentie, les personnages intenses.

Malgré sa rigidité, la séance est donc un régal, mais pas armée pour délecter comme le feront La Malédiction d’Arkham ou Le Masque de la Mort Rouge. Corman et son équipe jouent habilement sur la nature ambiguë de la malédiction et le film ne basculera jamais clairement dans le fantastique. Folie ou possession réelle, les deux restent probables : mieux, les frontières sont gommées, surtout grâce au personnage de Lord Roderick et à la prestation de Vincent Price. En tout cas, la maison s’agite anormalement et son identité trouble est révélée, tant par la présence de cette famille d’aristocrates malades que par l’ingénieuse introduction de gimmicks (les peintures).

Corman se permet de verser dans la démesure dans la dernière ligne droite : après une scène de cauchemar bien troussée, il achève le film sur un carnage propre et violent. Cet House Usher sera son premier grand succès public. La Chambre des tortures suivra rapidement, présentant un style assez proche, se montrant bien plus flamboyant. Tous les autres films du cycle Poe seront comme celui-ci des adaptations très libre, Arkham étant même davantage une reprise de Lovecraft.

Note globale 69

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LES VIERGES DE SATAN =+

11 Déc

3sur5  Entre deux opus de Frankenstein, Terence Fisher a réalisé cette adaptation du roman The Devil Rides Out de Dennis Wheatley, auteur de thrillers occultes très populaire dans les années 1950 et 1960. Pas de vierges sacrifiées malheureusement dans ce film réunissant le trio Hammer (les studios) – Fisher (le réalisateur) – Christopher Lee (l’acteur principal, également celui de tous les Dracula de Fisher). Le titre français est une traduction racoleuse du britannique The Devil’s Bride (les « vierges » sont souvent mentionnées à tort dans le cinéma d’épouvante, même de première classe).

Dans ce film, le duc de Richleau (Lee) et des proches tentent d’arracher deux adultes et une petite fille aux mains d’un groupe satanique. Fisher prend le parti de placer les forces du Mal sur un pied d’égalité avec la réalité dans sa narration. Toutes les créatures du Diable existent au même titre que Dracula et elles apparaîtront tout au long du film. Ce sera toujours pittoresque, parfois impressionnant (le cavalier), d’autres fois ridicules : l’apparition pas du tout coordonnée de l’arraignée géante devenant banale mygale d’un plan à l’autre n’a rien pour sa défense.

Comme il faudrait selon l’expression « soigner le mal par le mal », ici l’occulte permet de se protéger et briser les plans de la secte. Lee aka Richleau est un expert en démonologie, connaissant toutes les pratiques et les antidotes ; on aimerait en connaître davantage sur ce personnage élégant, savoir s’il est davantage qu’un aristocrate érudit, on en saura rien. Nous avons juste à contempler les techniques de Christopher Lee pour lutter contre le Mal, ses valets et émissaires. Le spectacle est lent, extrêmement grandiloquent, peu avare en excès et en explications à rallonge. C’est charmant quoiqu’une pointe de frustration soit au rendez-vous.

Note globale 62

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FRANKENSTEIN =-

20 Avr

2sur5 La première adaptation du roman Frankenstein ou le Prométhée Moderne de Mary Shelley (1818) est produite en 1910 (deux ans après Henderson fera celle du Jekyll de Stevenson). J.Searle Dawley la tourne en trois jours dans les studios Edison. L’heure est encore aux ‘courts-métrages’ et ce Frankenstein-là ne dure que 13 minutes. Il va donc chercher le plus fort et reprend principalement deux séquences : celle de l’engendrement et la rencontre de l’aveugle (où il termine chassé à cause de l’arrivée de sa famille). La création du monstre s’accompagne d’effets spéciaux diversement réussis, grand-guignols et surpassant le plus morbide de chez Méliès (Le diable au couvent, Dislocation mystérieuse).

Un parallèle est dressé avec la sorcellerie, conformément aux écrits de Mary Shelley, mais sans pouvoir étendre tous les remords de Frankenstein. L’agressivité du monstre reste injustifiée et théâtrale. Son allure est assez éloquente, mais plus proche du clochard sous substances que d’une image de sur-puissance. La version de James Whale (qui ouvrira une franchise via La Fiancée, complétée par Le Fils en 1960) avec Boris Karloff donnera une représentation en ce sens, avec un grand corps froid et massif, tout en soulignant l’humanité maladroite et réprimée de la créature. Frankenstein connaîtra de nombreuses autres adaptations, dès 1915 (le long-métrage Life Without Soul), notamment celle de Brannagh avec DeNiro (1995). Ces adaptations précoces de classiques littéraires sont rarement des réussites (Alice in Wonderland d’Hepworth en 1903, ou le Ben-Hur de 1907), Frankenstein se fond tranquillement dans la masse.

Note globale 52

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MIDSOMMAR ***

8 Août

4sur5 Le successeur d’Hérédité procède par envoûtement. Il relève brillamment le défi de rendre des horreurs éventuellement acceptables intellectuellement [les penseurs et transgresseurs tout émoustillés de malmener un Christian les admireront certainement], à défaut de permettre une isolation/abstraction ; tout en ménageant un certain stress quand à la suite des événements et alimentant les attentes plus primaires, plus ‘foraines’. Le suspense est pourtant passablement éventé d’entrée de jeu, mais les qualités immersives en sortent indemnes. Il doit bien y avoir un prix à ce tour de force, c’est peut-être pourquoi les personnages sont si crétins ou évanescents, malgré l’écriture d’excellente tenue. Le spectateur risque peu de les estimer et manque d’éléments pour s’y projeter profondément. La monstruosité du film et de la communauté en est atténuée, en même temps que les individualités sont dissoutes – parfaitement raccord avec cette aliénation tempérée par l’inclusion.

Les rejets aussi sont spontanés et épidermiques, car ce n’est pas seulement un film d’horreur ou d’épouvante, mais d’abord une sorte de reportage romancé (et secrètement romantique) sur cette communauté. Le public sent cette invitation dans une normalité qu’on sait (et que le film lui-même reconnaît) anormale. D’où probablement ces explosions de rire excessives dans les salles lors des scènes de copulation (éructations certainement embarrassantes pour les pauvres personnes encore persuadées ou désireuses de trouver chez la masse des Hommes des créatures matures). Dans ces manifestations on retrouve la gêne normale dès qu’on s’oriente sous la ceinture, l’amusement face au grotesque de la scène, puis surtout une occasion vigoureusement saisie de ‘soulagement’. Tout ce monde-là est quand même déplorable ou invraisemblable, cette outrance permet de casser l’hypnose et de minimiser le malaise (la résistance et éventuellement le caractère obtus des rieurs les valorisent donc finalement, en les distinguant des dangereux sujets fascinés ou pire, volontiers complices).

Or à quelques angles morts près le tableau est irréprochable. Dans les premières minutes Dani baigne dans un monde gris, plus ou moins lot de l’écrasante majorité des spectateurs, intellectuels avides y compris. Il lui manque un entourage au sens complet ; c’est pourquoi ces étranges mais pas surprenantes scènes d’hystéries sont le comble du spectacle et non une gâterie pittoresque (ce que sont les exploits gore). Ces primitifs en costumes immaculés n’ont rien à dire aux individualités (sauf dans leur chair angoissée demandeuse de protection, guidance et soutient), mais ils sont capables d’empathie pour les animaux ou païens blessés en grand désarroi. La simulation, à l’usure et en concert, devient un soutien réel et approprié pour la personne ciblée ou la foule impliquée. Les imbéciles journalistes (et beaucoup moins les critiques officiels – eux, comme le reste, se contentent de galvauder les mots et les définitions) nous rabattent les oreilles avec la ‘folk horror’, en louant l’originalité du film mais en le saisissant pour faire part de ce genre venu de loin et prétendument incroyablement prolifique ces temps-ci (il est déjà bien tard pour abandonner tout espoir de consistance de la part de ces gens, mollusques émotionnels et buses mentales, capables d’être raccords qu’avec la publicité, la pensée pré-mâchée et les indications des acteurs ou prospectivistes en chef du milieu). Midsommar s’inscrit effectivement sur ce terrain mais il est aussi sur celui, général, de la religion, dans son optique régressive puisque nous avons à faire à un culte sectaire (et meurtrier). Peut-être ne veut-on pas simplement l’apprécier comme tel car beaucoup de gens instruits d’aujourd’hui sont sensibles aux fumisteries totalitaires et à l’abrutissement par la magie, y retrouvant ce dont ils se privent en arrêtant l’Histoire au présent (voire à l’actualité) et confiant servilement le futur aux experts et aux chimères. Peut-être que les observateurs éclairés sont encore habités par la foi dans le sacrifice et les vertus de l’absolutisme, que les humanistes avancés éprouvent une attirance inconcevable pour ce qui nie ou écrase l’humain.

Bref dans Midsommar les détails sont soignés et significatifs, pour affermir le scénario, les thèmes et l’univers, spécialement pour représenter les stigmates banales ou curieuses du fondamentalisme. Le freaks du club s’avère le chaman à la dégénérescence voulue ; il cumule tous les paramètres requis pour n’être « pas obscurci par la connaissance » et avoir un accès aux « à la source ». Ce goût dévoyé de la pureté se retrouve dans une des dernières scènes où les deux volontaires n’ont apparemment pas reçu l’anti-douleur qui leur était promis pour mieux accueillir les flammes (le lieu et ses moments renvoient à Mandy – par ailleurs l’à peine moins frais The Witch a pu venir à l’esprit). On peut apercevoir plusieurs fois un blond extatique et débile en arrière-plan. Voilà une illustration tout juste exotique d’un ‘ravi de la crèche’, toujours exalté pendant les célébrations. C’est lui qui perd tout contrôle lorsqu’un innocent agresse l’arbre de l’ancêtre ; car son bien-être et sa conviction absolue sont brisés. Seule la colère, la violence et d’autres poussées irréfléchies peuvent émaner d’un tel type face à la crise. Car pendant qu’on s’extasie, on est moins enclin à progresser et s’armer – s’armer intellectuellement (ce dont on peut se passer) mais aussi sur les autres plans (et ça l’héroïne doit le sentir compte tenu de sa difficulté de se laisser-aller). Le film s’avère juste également dans ses passages les plus familiers : ces trucs de couples, de jeunes, d’étudiants universitaires, sont absolument banals mais conçus sérieusement. Sur le papier ils pourraient servir de matière à une sitcom mais ils semblent trempés dans le réel, comme ces sentiments lourds et idiots, ces relations navrantes – éventuellement comiques mais jamais grotesques ou exagérées. Le portrait d’une fille dévorée par ses peurs et anxiétés (et sûrement d’autres choses) est le premier atout par lequel le film convainc (à moins de ne supporter l’exposition de femmes ou filles faibles, compliquant vainement les choses, trop pénibles pour que leurs qualités soient encore manifestes). Le premier par lequel il se déshabille aussi : grâce à Dani, incurable en l’état, j’ai grillé la fin et l’essentiel dès le départ.

Car Dani est comme la borderline de La Maison du diable (film d’épouvante mésestimé et tenu pour un trivial ancêtre des débiles trains fantômes gavés de jump scares – l’habituelle cécité et mauvaise foi des cinéphiles), soumise à la panique, dépendante et en quête constante de réassurance. Elle est peut-être un peu plus individualiste (en pratique – c’est-à-dire qu’elle s’y efforce ou y est forcée) mais aucunement plus résiliente. Il lui faut trouver une famille ou une communauté, un cadre stable avec des liens collectifs infrangibles, confortés et animés par des traditions. Avant d’y parvenir la suspicion demeure, l’enfonce dans sa maladie psychologique et son impuissance à régler ses besoins. Sa conscience de soi éprouvante la conduit près de la paranoïa – la scène avec le groupe de ‘moqueuses’ lors de l’arrivée l’illustre de façon directe et brillante. Plus tard ces portions d’images mouvantes relèveront davantage du gadget raffiné et séduisant. Ces ressentis flous sont la meilleure justification de la passivité et de la confusion des invités à Harga. Les plans ‘vomitifs et anti-épileptiques’ (latéraux, circulaires, semi-perpendiculaires, renversés) du début ne sont pas si pertinents ni originaux – heureusement il s’agit d’une version tout-public, loin du niveau d’une expérience avec Noé (Enter the Void, Climax), plutôt voisine des effets d’un Jordan Peele (Get Out, Us).

Le seul point où le film omet la logique (outre la lenteur des produits importés n’ayant d’égal que celle du développement) doit lui être accordé sous peine de tout annuler. Car une communauté, aussi atypique et située dans le monde occidental aujourd’hui, se crée une menace en procédant ainsi (même les Amish, relativement conventionnels et fiables, se compromettraient en démarchant des visiteurs). Son élite ne semble pas assez naïve ou démente pour l’ignorer.. à moins que le groupe apporte effectivement une sensation d’invincibilité, que le culte et la bulle les ait convaincus d’être rendus ‘intouchables’. En revanche il aurait été intéressant d’en savoir sur les relations entre ce monde clôt et le monde extérieur. Il déborde au travers du terme « matcher » (utilisé, en référence aux profils astrologiques, par la patronne pour convaincre le piteux amant de livrer sa semence), de la référence aux enfants regardant Austin Powers et au petit équipement électronique sur la cheville d’une fille. Sauf qu’il doit être bien plus étendu puisque nous en sommes là ; sur ce point The Cage’s Wicker Man (le costume d’ours est probablement une référence appuyée davantage que le fruit de sages recherches sur l’occultisme) était plus solide et généreux, tout en ne précisant quasiment rien.

Note globale 74

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Suggestions… Candyman + L’Heure du loup + Mort à Venise + Persona + Nicky Larson et le parfum de Cupidon

Ennéagramme : Elle 6 (ou 9 désintégrée), son copain 9w8 à défaut d’une meilleure hypothèse, le black 5, le roux 7w6. Le suédois plus difficile à cerner, avec son milieu d’origine obscurcissant encore la donne : 2, 9w1, 6w7 ?

 

Les+

  • exigence de la mise en scène
  • qualités esthétiques
  • de beaux morceaux
  • sait garder l’attention malgré des manques et des surcharges qui devraient y nuire

Les-

  • longueur certainement inutile (le défaut est courant)
  • des invités bien lents et complaisants ; une communauté aux contours flous et aux relations extérieures opaques, qui pourraient bien anéantir toute crédibilité
  • prévisible

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SANS UN BRUIT *

5 Juin

1sur5  Il est temps que les cinéastes cessent de se vouloir intelligents et sensibles, car s’ils n’ont que ce genre de résultats en bout de chaîne, mieux vaut laisser sa chance à la fange et au cynisme. Entre rien et Sans un bruit, la nuance est faible ; oui mais cette nuance c’est toute sa subtilité ! Au départ le film a quelques mérites, il réussit à faire du neuf dans un contexte post-apocalyptique, avec cette injonction au silence sous peine de rafle immédiate par des créatures de cauchemar.

Mais déjà toute la banalité du projet saute à la gorge. Nous voyons les ruines de la civilisation et les grandes maison de la campagne américaine. C’est reparti pour un tour de survie dans un monde désolé, désert, où l’état de nature a repris ses droits – avec éventuellement des forces contre-nature voire surnaturelles, c’est le cœur du sujet ici. Même Annihilation sorti simultanément et boxant dans une autre catégorie reprend ces sortes d’images – où est la banque de données où tous les films américains approchant le survival vont puiser depuis quelques années ? À 90% au moins nous sommes en terrain connu et rebattu, les 10% restant eux-mêmes s’avéreront repompés ou alignés sur les ressorts paresseux du film d’action morbide ou d’horreur fantastique.

Sont servis la femme enceinte (quelle pression ! – et quelle irresponsabilité), le sacrifice dispensable, le son mélancolique, la carte émotion-toute-en-retenue pour combler chaque trou et le compte de trucs qui foirent comme par hasard. La banalité ne suffit pas, il faut aussi rendre l’affaire pénible, alors on jette ponctuellement des lumières aveuglantes dans l’œil du chaland (sans compter l’insupportable culte du lens flare) et lui envoie des sons perçants. Objectif probable : faire tout typique SF en plus de reprendre les pires arguments de Walking Dead, sinon d’imiter ses moments de dépression, les graisses larmoyantes en moins, le faux suspense léthargique en plus.

Ces films posés et ‘de genre’ ont trouvé le moyen de produire le moins et de tartiner au maximum leurs intentions et leurs ressources techniques. Comme s’il y avait dans ce minimalisme exubérant de la pureté ou un entendement supérieur ! Fini l’embrouille des enjeux compliqués, des conflits, des personnages tordus par eux-mêmes, par l’entourage, par des nécessités ou envies contradictoires, fini les rebondissements et les surprises (quelle vulgarité ! C’est bon pour le bis des cavernes, pas pour le bis post-moderne !). Ou alors, tout ça doit exister de façon rectiligne puis alors être martelé, surligné. Comme il y a de l’image propre, on peut prendre son temps et puisqu’on peut prendre son temps, c’est qu’il se joue quelque chose de fort, que cette œuvre en est une vraie, qu’elle n’a pas peur de la profondeur !

Le spectateur bercé aux Marvel ou à leur détestation va pouvoir apprécier – qu’il n’oublie pas de dire ‘merci’ à ce film osant lui donner le temps de méditer ! Qu’il savoure d’autant mieux les dialogues qu’ils sont rares. Qu’ils se pomponne avec ces débilités fortes en leurres existentialistes : ‘qui sommes-nous si nous ne savons protéger nos enfants’ ; oh oui profite de tes instants de répit pour baver ce genre de niaiseries ! Oh oui quelle douleur quelle conscience quelle intensité frustrée, nous n’en pouvons plus nous allons juter ! Enfin le spectateur a des raisons de se faire emporter, notamment celui découvrant Sans un bruit en salles, où le film va inciter les gens à se réprimer et par suite à consentir – avec son quasi silence (négligé, contrairement au silence de mots ‘peuplé’ dans Jeanne Dielman, produit autrement aberrant mais avec le mérite d’un parti-pris solide).

Dans sa deuxième moitié la séance bascule dans le home invasion avec créatures (sortes de transfuges d’Alien avec des oreilles en peau de miroitement), en prenant le soin de cultiver les aspects les moins intéressants à disposition et surtout ne créant rien de nouveau (l’entrée dans la cachette elle-même est stérile). Jusqu’au-bout ce film aura cumulés les petits mystères organisationnels et particularités sans aucune utilité (à l’exception de ce langage des signes, mais il ne faut pas être gourmand, ou de clou au traitement d’une lourdeur désespérante). Il ne sait qu’aligner des éléments partant en vrille pour bien pourrir LA situation, éléments disparaissant aussitôt. Les possibles anecdotes de la troisième demi-heure sont bâclées (l’inondation) et même déjà dépassées par d’autres (le passage dans la cave à grain de Jigsaw rend celui-ci encore plus minable qu’il l’est par lui-même).

Puis l’incroyable survient. Oui, la famille de survivors mutiques va bien trouver une solution à la (dark) Mars Attacks – résolution posant des problèmes de crédibilité mais surtout actant définitivement que ce film se contrefout de son sujet dans ce qu’il a de global (les auteurs sont un peu comme la voyageuse de Camille redouble, ne profitant de sa connaissance des 20 années à venir que pour renouer avec ses proches), réduit le cas et les malheurs de ses protagonistes à de l’intendance et de l’inhibition ou pleurniche pour photo, ne chérit que la reconstitution de surface. Surgit alors cette fin monstrueuse, à inscrire parmi les pires jamais démoulées, brandissant fièrement tout le mépris des concepteurs de cette chose à la gueule du spectateur. L’action, l’adrénaline, le bestiaire, ce sera sans vous. Encore une fois, un film a abusé de votre patience et de votre tolérance.

Note globale 22

Page IMDB  + Zogarok Sans un bruit sur Sens Critique

Suggestions… It comes at night + Pas un bruit + Get Out + Alien Covenant + Don’t Breathe + Life origine inconnue + Jeepers Creepers + It Follows + Split  

Scénario/Écriture (3), Casting/Personnages (4), Dialogues (-), Son/Musique-BO (5), Esthétique/Mise en scène (5), Visuel/Photo-technique (7), Originalité (3), Ambition (7), Audace (5), Discours/Morale (-), Intensité/Implication (3), Pertinence/Cohérence (2)

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