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SHAUN LE MOUTON LA FERME CONTRE-ATTAQUE ***

4 Nov

4sur5 Ce second film a probablement plus de personnalité et de capacité à rester en mémoire. Le scénario est plus soutenu et au lieu d’explorer la ville des humains Aardman a davantage misé sur le dépaysement. La place importante d’un ami venu d’ailleurs y est pour beaucoup. LU-LA a l’air d’un gadget moche héritier des Télétubbies ou d’un programme télé débile du matin, mais les animateurs ont su le rendre sympathique pour un public élargi grâce à sa vivacité, sa part d’exploits et de secrets.

Contrairement à il y a quatre ans les références abondantes sont discrètes ou introduites à des moments moins évidents. Elles restent classiques ou vulgaires et forcément nous avons celle à ET sur son vélo devant la lune. D’autres sont plus subtilement amenées comme le code d’ouverture sonnant comme l’air propre à Rencontres du troisième type. L’ensemble des aspects de la mise en scène sont opportunistes dans le sens créatif du terme, que ce soit en terme d’agencements du décors ou des perceptions (la fente d’une poubelle donne l’occasion d’adopter un format de pellicule plus ‘cliché’ du cinéma). D’ailleurs le bonus en générique de fin vaut la peine de rester contrairement à celui d’Angry Birds 2.

C’est donc un film d’action dynamique sans être hystérique, ne véhiculant pas la niaiserie des autres à son niveau de visibilité, mais il ne s’aventure pas vers les efforts de profondeur ou de sentiments d’un Mystère des pingouins. C’est plutôt une Soupe aux choux actualisée et spielbergienne, boostée par une culture audiovisuelle et musicale anglaise. Son grand talent est dans la fusion et la réinvention (on voit une base souterraine à la On ne vit que deux fois, une antagoniste avec un air d’agent Scully), or l’originalité pure étant rarissime c’est déjà excellent. Puis la première des qualités reste esthétique car au-delà de la beauté diversement appréciable, on peut toujours apprécier la mobilité des traits : rien là-dedans ne semble ‘objet’ et on se sent plus proche du film ‘live’ que de l’animation artificielle.

Note globale 72

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E.T. L’EXTRATERRESTRE *

27 Mai

1sur5  Certaines prises de conscience vous mettent dans un état de détresse profond, d’autres vous laissent simplement KO. Il y avait des indices pourtant, il y avait la carrière de Spielberg, les guimauves et les produits tendancieux la parsemant. Certes. Mais non, ce n’était pas vrai, non, ce fameux ET ne pouvait pas être stupide à ce point, à ce degré où la médiocrité devient manifeste hostile.

Quatre ans après l’horripilant Rencontres du 3e type, Spielberg passe définitivement du côté laiteux et dégénéré de la création. La blague concernant la différence entre ET et un arabe a plus de valeur que les aventures de Elliott et son invité venu de l’Espace. Il n’y a à peu près rien à dire sur ce machin, fondé sur une trame primaire et trois pauvres notions : ET rentrer maison (ses seules paroles), ET mal à l’aise (comme un touriste sans sa moustiquaire), ET il est cool tu l’apprendras.

ET a la subtilité d’un enfant trisomique expérimentant ses premières émotions allocentristes. La mièvrerie : pourquoi pas ; mais il faut avoir un minimum de sujet. La reconnaissance et l’estime dont jouit ce blockbuster triomphant consacré classique par les instances officielles américaines fout le doute. Les foules sont-elles suggestibles à un point critique, seulement lentes ou carrément attardées ? Les institutions et professionnels de la profession sont-ils à ce point corrompus qu’ils en omettent la vraisemblance de leurs supercheries, sont-ils simplement conformistes ? Se sentent-ils obligés d’adouber les pires loukoums-blockbusters pour parer aux accusations de snobisme ? 

Quel attrait trouves-t-on à ce bout de plastique dégueulasse et plein de suie (l’extraterrestre en animatronics) ? Quel crédit accordes-t-on à cette soucoupe, genre de lave-vaisselle rose-orangé fluorescent, chiant un arc-en-ciel à son départ ? ET est une immense claque. Vous croyez que la débilité sera nuancée, qu’il y aura quelque chose de supplémentaire et finalement tout s’amplifie vers la bêtise, l’humanisme et le sentimentalisme de primates immatures. Le jugement commun vous répondra : le message est tendre et les enfants sont bouleversants.

Sur le tournage, ils se sont liés à la créature et ont véritablement perdu un ami au final. Leur histoire personnelle n’est qu’un fétiche pour alimenter cette baudruche. ET le pendant monocellulaire de Birdy. Il faut regarder ce qu’est ce film ou devenir fou avec les autres. ET exige une trop grande fatigue, une trop grande faiblesse, une inertie malsaine, pour être perçu comme merveilleux ou simplement enduré sans qu’en vous s’installe une consternation abyssale.

Note globale 21

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ANNIHILATION **

15 Mai

3sur5  Ce film fait chauffer les claviers et les compteurs Youtube car tant de monde s’acharne à vouloir apporter des explications [de scénario] quand lui les refuse. Annihilation lance de nombreuses pistes, fournit de la matière à étayer ; ce qu’il est aussi doit compter et il n’y a pas de raison que les ambiguïtés gâchent l’identité ou la qualité d’un film. Si on souhaite tirer des déterminations d’Annihilation, cerner ce qu’il propose (et pas seulement ce qu’il effleure ou convoite), il faut y lire des allégories et évaluer son message, plutôt que chercher des solutions à cette aventure. Son espèce de méga-cancer, poids lourd amorphe reflétant et absorbant, permet d’appliquer une profondeur ‘mathématique’ à l’ego ou théorique à l’humain. Puis il cultive ses propres mystères plutôt que se mettre en quête de vérités ou de dimensions inédites ou mal comprises – ou alors, la quête repousse tout ce qui n’est pas (soumis ou) elle-même.

Un substrat biologiste enveloppe le film au bénéfice d’une cosmologie incertaine – même si Annihilation donne la première impression de procéder en sens inverse, avec une action commandée par les aléas du concret (pendant qu’un projet ou mécanisme surnaturel étend ses filets – et doit être maîtrisé à double titre car l’essentiel est la conservation de ce monde, de ce couple). En bon organisme en expansion, le miroitement (« the shimmer ») procède par mutation (expéditive grâce à la ‘réfraction’) et sélection. Celle-ci est généralement aberrante car inutile – mais jamais au point de rendre dysfonctionnel ou de produire des effets ‘trop’ sidérants sur les humains, ce qui plongerait vers le nanar. Sauf sur le plan de l’esprit (que justement elle écrase) et du maintien de la vie organique (mais à terme, au prix de déclins ou de pertes de fonctions parfois et même si celle-ci doit être aseptisée). L’une des principales questions du film (non résolue – évidemment) porte sur la part de volonté que peut avoir l’individu sur son irrésistible transformation génétique ; dans quelle mesure la conscience de soi permet-elle d’instrumentaliser sa réalité et de se corriger. Le sens et la vocation ne sont pas au programme, qui exclue l’élan religieux et rétame ses prétentions, ne serait-ce que par omission. La spiritualité peut demeurer mais elle se passe de l’élan de ses sujets, rendus à l’état de simples outils, dont les désirs personnels mais aussi la compréhension ou l’adhésion au ‘miroitement’ ont la même incidence que des ingrédients inertes pour une recette.

Le film est très ouvert, y compris pour rationaliser (sur le plan de certaines hésitations ou lenteurs à conclure) et recomposer l’expédition sous nos yeux (apparemment loin de durer près d’un an comme celle des militaires). Les légèretés curieuses dans l’organisation devraient gâcher la crédibilité du film. Mais en utilisant l’inconnu comme un mur ne laissant passer que les interprétations et les discussions (et justement, ne les laissant que passer), il s’évite d’être pris en défaut. La narration est d’une fluidité étrange, digne d’un épisode de Druuna (série de BD érotiques exhibant les joies malsaines d’un univers post-apocalyptique). Le montage et la répartition cérébrale l’emportent (sur l’émotion, le récit), les matérialisations et symboles aussi (le signe de l’infini/l’ouroboros est placé pour s’assurer de passer l’information aux retardataires ?). Quelques bizarreries, par exemple la contre-offensive face au crocodile, peuvent dès lors être de vraies ou fausses négligences (et vraies ou fausses naïvetés lourdes – comme le côté sombre et tourmenté réduit et surligné des participantes). Les allers-retours récurrents dans le temps pourraient avoir des intentions non ‘performatives’ – on ne pourra justement que spéculer, en d’autres termes les digressions qu’on aurait pu pratiquer, le film nous suggère fortement de les appliquer et de les associer à l’expérience de visionnage (et non aux méditations qui peuvent se greffer dessus). Les décors sont sophistiqués (les bâtiments sont des reflets explicites et conventionnels des états des cinq femmes, leurs absorptions ‘sur-mesure’ sont plus subtiles) sans être nécessairement beaux, même si les amateurs de psychédélisme seront clients. L’analogie avec Stalker est inévitable car dans les deux films des voyageurs viennent trouver une révélation dans une zone désolée. La nature et l’aspect varient déjà, la zone dans Annihilation est plus colorée et surtout animée. Puis à la chute existentielle et au vertige subjectif du film de Tarkovski, Annihilation préfère une issue du style d’Aronofsky, avec un aperçu de ‘dark enlightment’ au goût lovecraftien.

Ce qui génère frustration voire malaise avec Annihilation, c’est son obstination à compliquer le tableau et insérer des indices non-concluants. Il garde une part d’obscurité en s’appuyant sur trois méthodes : en faisant rideau, en ne s’engageant pas, en détournant sur les accessoires et une cohérence formelle (en cultivant des points discrets dans la mise en scène ou certaines caractéristiques des personnages – silencieuses, ‘clignotantes’ ou les deux mêlées). Il ne rentre pas dans l’obscurantisme dans la mesure où il n’est que marginalement ‘positif’ au test – il ne répand pas de fausses théories construites, de clés certifiées pour emprisonner. Par contre il enfile de grands desseins en se gardant bien de prendre un point de vue ou en préférer un ; s’il en a c’est sans l’affirmer. À terme si on interroge le film ou ses questions, il apparaît creux (bien qu’il soit rempli à ras-bord et réfléchi). Il n’éclaircit rien concernant les profits ou les vices de ces mutations, l’après lointain ; la victoire objective de Lena mène au malheur quand même – mais nous n’avons pas tous les éléments, seulement quelques-uns appuyés lourdement, alors nous flottons. Ce qui dégouline en revanche, c’est que l’évolution pourrait ne servir qu’à mourir plus à fond ! Annihilation laisse ce paradoxe à l’écran et s’attache à ce qu’il y a en chemin, les peurs comme les enthousiasmes – il ne discute pas ce paradoxe, c’est ce que ramasseront ses personnages, mais lui n’en répond pas.

Certains acteurs des réseaux sociaux ont décrété que ce spectacle illustrait les ressentis de la dépression ; c’est possible. Sa nature dépressive elle est catégorique (sauf si on le regarde en se faisant abstraction de notre animalité et de notre humanité, mais hors de ces formes la notion de dépression perd justement de sa pertinence). Sans spoiler Annihilation, il promet à l’espèce la défaite ou un avenir pourri (même quand les situations sont matériellement positives et les entités opérationnelles). Dans tous les cas, le film se solde par l’effacement fatal de l’humanité et de l’environnement humain ; il s’épuise s’il ne sait pas s’adapter, se converti de force au point de disparaître sinon. La seule conclusion réaliste, ne dénaturant pas le film et ne parlant pas à sa place, unissant ses expressions, c’est cet effacement. Qu’on gagne sur ses mauvaises tendances ou se laisse couler, qu’on aime ou se dessèche, on s’éteint, n’en a pas le temps ou la chance, puis on se dissout. Il faut grandir pour mourir. Les progrès ne sont pas simplement empoisonnés. La vie et la conscience humaine sont des passages. Et quand ils s’usent, comme pour la jeunesse et l’ignorance heureuse, il n’y a pas de remède. Moralité : en dernière instance, la nullité de l’intelligence humaine et de ses fruits l’emporte sur toutes autres considérations. Mieux vaut alors s’éparpiller en idées, possibilités, degrés de perception et réalisations qui démentent cette impuissance fatale (ou meublent agréablement). C’est la façon radicalement pessimiste mais toujours ‘pro-vie’ de concevoir l’essence humaine. Le big boss d’Ex Machina (déjà le faciès d’Oscar Isaac se prêtait au vendu de l’espèce alternative) donnait crédit à quelque chose de ressemblant dans ses moments de dépit, mais il avait à côté une démarche entreprenante et positive qui factuellement et philosophiquement rabrouait ce fatalisme – par contre dans les deux cas, l’Homme est obsolète, a suffisamment joué, pourrait bien céder la place à une forme de vie supérieure (sans ‘âme’ de préférence).

Les hypothèses psychologiques ou métaphysiques germent inévitablement. Le gommage (lui-même pas strictement avéré) des frontières spatiales et temporelles (jetant un flou supplémentaire sur la place de Kane et son existence) peut soutenir les constructions de nombreuses imaginations. Malheureusement il semble fonctionner selon les besoins du scénario et de l’avancée dans la jungle (est-ce le sacrifice nécessaire sans lequel le film deviendrait inintelligible et plus près du grand clip ou d’une œuvre musicale ? – ç’aurait le mérite d’une radicalité accomplie et d’une cohérence ‘achevée’). Si la pensée et le caractère doivent commander la réalité, les quatre femmes autour d’elle seraient les boulets de Lena. Elles incarnent différentes tendances ou pentes de sa personnalité, deux immatures (l’impulsive et l’intello suicidaire, celles qui se situent émotionnellement pour se définir et se sentir vivre), deux matures (la mère ‘orpheline’ et la directrice scientifique, celles qui comprennent et savent subordonner leur subjectivité), toutes déjà obsolètes pour avancer vers la mutation disponible aujourd’hui. Malheureusement ce dépassement n’implique pas en bout de chaîne un épanouissement. L'(affreuse) option ‘tout ça est rêve/une création’ est disponible également. Elle accrédite l’idée que les compagnes de voyage sont des Lena alternatives ou particulières. Cette explication rebattue mais bien cachée justifierait le recours à des stéréotypies et ramènerait les fantaisies génétiques dans le champ de l’esprit – divagant. Vient une hypothèse qui en rajoute derrière celle-ci et se mêle à ces caprices temporels : la vie que nous connaissons est ‘artificielle’ – une brèche vient annoncer son origine extraterrestre à une population qui sera bientôt prête à s’accepter objet (car elle sera modifiée, non parce qu’elle succombera à la beauté d’une proposition ou d’une prophétie), tout en ayant son fond de vécu humain, ses souvenirs et ses attachements, qui feront de chacun une particule avec ses nuances et ses propres élans, tout en participe passivement à la grande masse dont le miroitement est le moyen de locomotion.

Là encore, cela donne un renouvellement de l’Humanité, de sa religiosité (qui ne convergera plus vers un Dieu, des rituels ou un culte classique, anéantira le cœur et l’esprit de ses fidèles plutôt qu’elle ne les aliénera), un apaisement de ses tensions en les liquidant. La mort elle-même mute. La nouveauté disparaît au rayon humain, le goût des expériences et les émotions eux ne se renouvellent pas. Hors accidents, cet état amélioré et nettoyé empêche la prolifération des toxiques, mais compresse le passé au lieu de carrément le supprimer. Il peut donc encore diminuer l’individu, surtout qu’il ne développe plus de réponses ou moyens appropriés à ces questions ‘primaires’ du vécu, des sentiments, des affections. Dans tous les cas, les humains et leur cadre de vie sont appelés à se fondre. Et s’ils y résistent ou s’ils s’accrochent, ce qui est quasiment inévitable tant que l’oubli de ‘soi’ n’est pas plus puissant, ils souffriront et s’annuleront simplement. Être absorbé est inévitable, l’intégrité n’est pas possible. De quoi idéalement anéantir la crainte du mensonge et de la corruption (d’une personne, d’un rapport au monde), car ils ne sont que les véhicules de ces transitions (ça en revanche ce ne sera pas révolutionnaire). La perspective reste pessimiste, même en mettant de côté les sentiments ou instincts archaïques. Si Lena a la possibilité d’agir sur ‘la chose’ (dans sa rencontre finale), sa domination ne consiste qu’à détruire. En tout cas pour le moment – on en revient éternellement à ces manques délibérés du film.

La fin (de ce film dont les événements se situeraient après ceux d’un Life origine inconnue) est à la fois ce qu’il y a de plus ‘ouvert’ et de plus banal, au niveau du scénario et des considérations pragmatiques. Nous allons potentiellement vers la propagation d’un virus étranger et surtout d’une nouvelle façon de diriger sa vie, vers l’immortalité grâce à l’ADN métamorphosé, ou à défaut un nouvel état biologique optimisé. Il peut carrément se profiler une invasion extraterrestre, comme dans une série B ou un SF trivial (qui dans ses belles heures livre du Body Snatchers). Avec cette dernière piste (ou dernier degré d’acception) le film est plus ouvert à une suite. C’est d’autant plus défendable qu’il n’est supposé adapter (certes en le trahissant allègrement) que le premier opus d’une trilogie (sauf que la trahison le coupe des deux opus suivants). Alex Garland n’aurait rien prévu de tel. Peut-être que des opportunistes ou des motivateurs seront sur les rangs, leur principal défi sera d’allouer le budget qu’avait accordé la Paramount (celle qui a décidé de ne pas diffuser Annihilation en salles hors des USA, du Canada et de la Chine, laissant Netflix prendre la relève).

Note globale 58

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Suggestions… Under the Dome + Solaris + Premier contact + Under the Skin + The Lost City of Z + Cold Skin + Alien le huitième passager + Le Labyrinthe de Pan + Le Blob + Le Mur invisible + Okja + Dreamcatcher + The Descent + Les Ruines

Scénario/Écriture (4), Casting/Personnages (6), Dialogues (5), Son/Musique-BO (7), Esthétique/Mise en scène (7), Visuel/Photo-technique (7), Originalité (6), Ambition (7), Audace (6), Discours/Morale (6), Intensité/Implication (5), Pertinence/Cohérence (6)

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L’EXTRATERRESTRE **

29 Déc

l'extraterrestre inconnus

2sur5  Les Inconnus au cinéma, globalement ? Ce n’est pas une franche réussite. Deux films se distinguent : Le Pari et Les Trois frères. Tout le reste oscille entre sympathique divertissement de second rang (Madame Irma) ou navet limite (Les rois mages). Et puis il y a L’Extraterrestre, sorti au début de l’année 2000, considéré comme l’une des pires comédies françaises de son époque, reléguée encore plus loin que les films de Michael Youn (comme sa Beuze). Si L’Extraterrestre est bien le plus mauvais film des Inconnus, encore que Les rois mages soit d’un faible niveau, il ne mérite pas une telle réputation.

Beaucoup de choses sont catastrophiques ou d’un mauvais goût redoutable dans L’Extraterrestre. Le jeu de Pascale Arbillot, en tout cas dans la séquence d’ouverture, est assez inquiétant (ce « oh shit » annonciateur du pire). Le scénario vise bas, les notions liées à l’extraterrestre ou ses différences avec les humains sont enfantines et la connexion à la SF est trop ignare pour avoir valeur de parodie. Au rayon du rire, les bons mots sont assez rares ou communs, le film ne laissant tout au plus qu’un « va chier Bouzouk » inséré dans un contexte propice (le discours du maire sur la France comme terre d’accueil). Enfin il y a cette trance incertaine, pour signaler en ouverture que ça va être énorme, puis pour refermer cette délicate séance sur un machin hallucinant de laideur sonore, sorte de Lavabo de Lagaff rétro-futuriste.

Entre les farces taciturnes serpente un sérieux relatif. Didier Bourdon et Bernard Campan (comme pour Le Pari, Légitimus ne peut rejoindre ses compères) cèdent à la tentation de la sincérité et de la gentillesse, prenant le risque du ridicule et de l’effet new age pour repentis du Bigdil. Le résultat y souscrit sans problème. Mais cette sentimentalité improbable et la romance nanardesques entre Bourdon et Arbillot, au lieu de tout à fait rejoindre le gouffre de T’aime dont elle n’a pas la dimension démagogique, laisse aussi gêné qu’indulgent. Il y a de quoi rire mais pas suffisamment pour nourrir une moquerie profonde. Cette innocence bonhomme laisse plutôt égal et simplement étonné par le flirt avec le conte de fées, si on est pas braqué par la mollesse de l’ensemble.

Quand l’innocence atteint une telle intensité, on est désarmé. Le film peut agacer un enfant mûr fatigué d’être pris pour un débile en subissant des histoires mielleuses et inconsistantes ; il peut aussi donner le sentiment d’avoir assisté aux confessions d’un dépressif ordinaire donnant à voir son petit monde de fantaisies. Pour le reste, tout n’est pas si mauvais, il y a même de petites idées de mises en scène (le fondu sur la maison pittoresque), certes très vulgaires. Le casting est inégal mais Daniele Lebrun est irréprochable et les fans de South Park auront l’occasion de découvrir le visage du doubleur de Mr Garrison (Henri Courseaux, dont le timbre est exceptionnel). Le gamin des Trois frères sait maintenant aligner des punchline piquantes et Campan, le chasseur déréglé devenu aimable, livre une performance pittoresque. Il enfonce le film vers l’absurdité, sa vocation mal digérée.

Note globale 45

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Suggestions…  Extraterrestre (2010) 

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TRILOGIE MEN IN BLACK =+

5 Août

MEN IN BLACK ***

3sur5  Adaptation d’une mini-série de comics d’un certain Lowell Cunningham, ce blockbuster nous invite auprès de deux agents de la MIB dans leur mission contre une espèce de cafard géant et un prince arquilien. Les Men In Black sont une agence secrète chargée de surveiller la présence extraterrestre sur Terre, elle-même cachée au public. Grâce à une technologie avancée et la capacité d’effacer la mémoire des témoins, elle se montre ultra-efficace.

Les producteurs ont remis le projet à Barry Sonnenfeld en raison de l’humour noir déployé dans sa mise en scène de La Famille Addams et sa suite Les Valeurs. Celui-ci s’est fortement enthousiasmé pour le projet et son film est devenu un phénomène, décliné en une série télévisée, appelant une suite puis une autre quinze ans plus tard. La chanson éponyme, dont Will Smith est crédité, est culte, tandis que la bande-originale bénéficie de la contribution de Danny Elfman (compositeur récurrent de Tim Burton et de nombreuses séries), qui a fourni le theme principal.

En plus d’une comédie SF, Men In Black est un buddy movie et marque des points avec son tandem Will Smith/Tommy Lee Jones. C’est enfin surtout une réussite technique, avec de beaux effets de synthèses, absolument pas vieillis à l’aune de deux décennies de recul. Les concepteurs déploient une vive imagination et présentent une excellente d’introduction (où on accompagne, par moments carrément en vision subjective, une libellule survolant une route de nuit) et de conclusion (où l’infini grand se joue de notre Terre).

Arachnophobie et Creepshow semblent avoir été mixés par un SOS Fantômes agrémenté d’une pointe de Brazil. À voir enfant ou vers 12 ans, pour un plaisir optimal.

Note globale 65

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Suggestions… The Mask

 

 


MEN IN BLACK II **

3sur5 Men In Black II est un blockbuster aimable, mais il n’accroît pas l’univers des Men In Black. En d’autres termes, c’est un coup pour rien, sinon pour le plaisir des spectateurs acquis lors du premier film. Cette suite tente pourtant de rabattre les cartes et se fonde sur la recomposition du tandem J et K (toujours interprétés par Will Smith et Tommy Lee Jones). Ce dernier a subit un effacement de mémoire et vit sans se douter de rien dans une nouvelle vie d’emprunt.

L’agent J doit le convaincre de le rejoindre. De nouveau en activité, l’agent K est perçu comme une légende vivante, craint et admirée ; l’homme s’adapte à ce rôle, taciturne et nonchalant, toujours vaguement sceptique. Pendant ce temps un extraterrestre déguisé en Lara Flynn Boyle (Donna de Twin Peaks) sème le trouble. Tout se déroulera très vite, d’ailleurs le film est concis (1h28). Il passe en un éclair pour toutes les bonnes raisons imaginables, mais son dénouement semble un peu précipité.

Les tensions et l’intrigue générale sont à peine perçues que déjà Men In Black II se referme, d’ailleurs il a tout survolé. Le film est encore plus  »vulgaire » que son prédécesseur, notamment à cause de la contribution d’un agent chien. Il le dépasse aussi en vitesse et en superficialité au point que tout est traité avec brio (les retrouvailles notamment) et sans fioritures. On savoure et le programme le vaut bien, mais il faudra être un fan et y revenir avec entrain pour en garder quelque trace.

Note globale 60

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MEN IN BLACK III **

2sur5 Sorti longtemps après les autres, Men In Black III est le plus hystérique des trois opus, le plus généreux et imaginatif au niveau de la variété d’apparitions approximativement humaines. Ambitieux, il étend l’occupation des aliens dans des proprotions de complotiste enflammé. Les extraterrestres ont maintenant toutes les places ne revenant pas à l’homme ordinaire, quoique le business ne soit pas évoqué ; mais les mannequins, stars et artistes sont tous des invités masqués.

Men In Black III est le moins bon de la trilogie car il aligne quelques choix douteux. Du retour vers les sixties, il ne tire l’occasion que de deux petites saynètes sur le racisme ordinaire de l’époque aux USA, des clins-d’oeil appuyés à Mad Men et une relecture cynique de l’oeuvre de Andy Warhol. Il est aussi l’objet d’incohérences extrêmes, parfois à la limite de la logique élémentaire. Enfin la grossièreté du trait annihile tout.

Tout, c’est la rencontre de Men In Black avec Guillermo del Toro – voir avec Terry Gilliam (son Imaginarium Parnassus), auquel on pouvait déjà songer lors des deux premiers opus. C’est aussi une mise en scène épurée, des décors presque aériens, théâtre d’une course inlassable, de gags et gimmicks à chaque instant. Mais Barry Sonnenfeld est passé de chef-d’orchestre impeccable à ours dandy.

Men In Black III n’est qu’abondance et qu’il ne frappe pas tellement l’esprit n’aurait pas été un problème ; mais l’échec de tentatives bruyantes et lapidaires le handicape. De même, ses guest censés faire plaisir sont au mieux invisibles, au pire manifestement inutiles. Il marque donc une régression par rapport au précédent opus, bien qu’il vise plus haut. Il a cependant le mérite d’introduire avec succès un nouveau personnage (l’agent O incarné par Emma Thompson), balayant l’apparition de Lara Flynn Boyle.

Note globale 53

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