Tag Archives: .78

LES FORBANS DE LA NUIT +

12 Mai

les forbans de la nuit

Tragédie des bas-fonds dans la ville de Londres, mais pas les bas-fonds des damnés de la terre : ceux où les petits et grands bourgeois, arrivistes naïfs ou malins font leurs affaires. Dans Night and the City, un aventurier sans succès essaie d’organiser un combat et ainsi s’approprier le business des spectacles de luxe, tenu par une mafia. Loup dynamique mais sans flair, il se trouve empêtré dans de multiples affaires, utilisé par tout le monde pour les basses besognes ou les coups à risques.

Engagé auprès d’individus plus fourbes et avisés que lui, il court clairement à la catastrophe. La mégalomanie ne rend pas nécessairement visionnaire, pas plus que le vice n’immunise. Harry Fabian est un salaud pathétique, c’est un loser ce qui lui permet d’être une ordure en échec, mais ses crimes n’en sont pas moins consommés. Le destin est mesquin, les hommes bien trop lâches : au milieu, les sauveurs et les bonnes âmes sont bien en peine, comme Mary Bristol (Gene Tierney), femme auquel rien ne saurait résister et dont l’amour pour cet homme est une espèce d’aberration.

Exemplaire redoutable du « film noir », Les Forbans de la nuit est une singulière combinaison de réalisme et de lyrisme. Son style a pu inspirer La Soif du mal d’Orson Welles (1958), produit chahuté dont le résultat ‘culte’ est pourtant moins convaincant que l’objet présent. Night and the City s’autorise une violence assez rare, tout en se caractérisant par un cynisme réfléchi, profond, loin des gratuités et de la frivolité de ses ‘noirs’ contemporains (en particulier John Huston !). Comme un humaniste percuté par la bassesse de ses prochains, Dassin n’injecte que des nuances de désespoir à son œuvre ; il le fait avec maturité, sans dégoût.

Il n’y a pas de caricatures mais néanmoins des personnages très typés, parfois extravagants, complexes et avec lesquels le pire et le plus odieux est toujours sûr, mais toujours sans obscénité, avec cette grâce fatiguée des bandits résignés. L’action est située à Londres mais pourrait se dérouler dans n’importe quelle grand ville occidentale. Les films noirs ont en commun l’ambition de rapporter les angoisses et amertumes liées à l’existence urbaine, ce film y parvient avec son style plein de paradoxes heureux. Le regard est cru voir stoïque, mais l’ambiance anxiogène à un point irrationnel.

C’est un peu comme si les prédateurs et aspirants étaient sur le point de basculer dans le Damnation de Bela Tarr, alors qu’ils doivent tirer partie d’un monde dangereux et intense comme celui d’Il était une fois en Amérique. Night and the City est tourné en 1950 par Jules Dassin, alors qu’il vient de quitter les Etats-Unis dans le contexte du mac carthysme. C’est le début de sa seconde période : la première est aux Etats-Unis où il débute, la seconde en Europe où ses engagements politiques et artistiques posent moins de problème, la dernière en Grèce, la plus longue puisqu’elle s’étale jusqu’à sa sortie en 1980.

Night and the City demeure un film hollywoodien par son casting et ses capitaux, tout en se détachant et survolant la masse par son style et son résultat. Il n’atteint pas le degré de machiavélisme d’Assurance sur la mort mais est certainement plus frontal et torturé, avec un pessimisme au fond plus dépressif qu’agressif. Le Troisième Homme n’est pas si loin mais lui est bien trop frivole, presque une sucrerie avec des jets acides. Ici il n’y a pas de place pour l’esprit et les petites combines cyniques, l’atmosphère est autrement lourde et les ailleurs tant rêvés inexistants, les personnages ne peuvent que trouver leur place dans un manège sinistre.

Note globale 79

Page Allocine & IMDB  + Zogarok sur Sens Critique

Suggestions…

 Voir l’index cinéma de Zogarok

.

Stendhal – LE ROUGE ET LE NOIR +

16 Fév

Travaillé par des valeurs héroïques, rêveries de gloire et une sensibilité d’ambitieux jeune et pur, Sorel est pris par des questionnements sur le support de son destin, cherche à ménager ou associer sublime et authenticité. Comme les honneurs de toutes sortes, les femmes sont sujettes à ses appétits tourmentés ; il ne sait plus s’il les aiment, doit les aimer, veut les aimer, doit se servir cyniquement d’elles. Les personnages cherchent comment se frayer un chemin vers la reconnaissance et un sommet (social, matrimonial, professionnel, amoureux) ; l’auteur, comment tous dealent avec la réalité, alors que souvent manquent les outils – ou que les sujets sont pris d’assaut par des émotions nouvelles ou trop ardentes, rendant obsolètes les outils habituels.

La teneur psychologique est rebattue vu d’aujourd’hui, ce qui peut limiter l’enthousiasme à la découverte ; cette fois, voilà probablement un ‘classique’ à lire tôt. Il n’est pas ‘dépassé’ pour autant – donne plutôt une impression de ‘déjà digéré’, marque d’un classique réel et influent (nous sommes quelques années avant Illusions perdues de Balzac, plusieurs décennies avant Flaubert et Maupassant) ; est toujours vrai sur les comportements, les apparats idéologiques, les différentes sortes de jalousie et de quête d’absolu, la part disproportionnée du besoin de consentir, plaire ou manœuvrer pour un semi-prolo avide qui ne serait sans ces recours qu’une étoile morte-née.

Les commentateurs et spécialistes attribuent à ce roman de devancer la psychanalyse ; effectivement les personnages sont ‘incarnés’, la narration est fixée sur ce qui les habite et peut contredire leurs assertions ou comportements, les événements sont au second plan ; il est vrai que l’intériorité individuelle a peu de place dans les textes antérieurs qui ont passé l’épreuve du temps et de la sélection ‘culturelle’ (et probablement peu d’importance dans un monde pré-moderne où le destin individuel est moins mobile), mais j’ai du mal à croire qu’on ne rend pas cet hommage au Rouge et le noir à cause de sa qualité et de la place acquise dans l’histoire littéraire, plutôt que pour une réalité de pionnier. Après tout l’insoutenable Princesse de Clèves allait déjà sur ce terrain, avec ses moyens restreints par le moralisme ; il doit aussi y avoir des feuilletons perdus, méprisés peut-être à juste titre à l’époque.

Note globale 78

Voir sur SensCritique

Suggestions…

L’ANGE IVRE +

30 Août

L‘Ange Ivre ramène aux débuts de Kurosawa, avant les opus identifiés par tous les cinéphiles et systématiquement catalogués ‘chefs-d’œuvre’ (RashomonLes Sept Samouraïs). Il s’en rapproche toutefois, puisque c’est son premier film ‘typique’, où démarre la collaboration avec Toshiro Mifune. De plus, cet opus apporte à Kurosawa son premier grand succès critique sur le territoire national, deux ans avant les louanges à l’international, à partir de Rashomon en 1950. Il suit la tentative d’un médecin alcoolique de sauver un jeune gangster atteint de tuberculose.

C’est le huitième opus signé Kurosawa et le premier où il se sent libre ; pas parce qu’il parviendrait à amadouer la censure (il doit toujours composer – le scénario subit des correctifs), mais plutôt car celle imposée sous l’occupation américaine (1945-1952) ne l’entrave pas. Elle vise à l’établissement d’un modèle démocratique, à la diffusion de valeurs libérales et réprime le militarisme (autrement dit, du ‘nation building’) ; presque du sur-mesure pour Kurosawa, pacifiste par conviction lui, souvent progressiste dans ses partis-pris. Et parfaitement humaniste, jusqu’au tournant (dont les germes sont déjà dans sa relecture de Gorki, Donzoko) de Yojimbo/Sanjuro où il donnera un nouvel élan au film de sabre.

Avant que ce projet ne se transforme en sa première œuvre « personnelle », Kurosawa voulait sonder l’âme des yakuzas, les mafieux japonais. Cet aspect joue finalement au second plan et son intérêt est symbolique. La décennie suivante (années 1960) allait connaître le triomphe des yakuza eiga, centrés sur la vie courante et les relations entre les membres de ces clans ; L’Ange Ivre fait peut-être partie des ancêtres du phénomène, mais est plus proche du ‘film noir’ (courant contemporain, très anglo-saxon) à la japonaise. Le jeune voyou interprété par Mifune est l’allégorie d’un Japon sans repères au sortir de la guerre. Il est absorbé par ses vieux démons, pourtant obsolètes et parfois rachitiques : en effet ses employeurs gardent la main grâce à la misère et à la confusion d’après-guerre, mais leur ascendant semble celui d’astres morts, sauf conversion incertaine (elle aura lieu, décevant les espoirs formulés dans ce film).

Mais si cette supériorité ‘morale’ voire ‘existentielle’ n’est plus valable pour les deux personnages principaux (le docteur la combat, le patient la délaisse), elle reste vivace chez de nombreux sujets, comme l’assistante du docteur (toujours prête au fond à se jeter dans la gueule du loup – c’est-à-dire à se vautrer devant son ancien bourreau et amant). De plus cette tombée en désuétude des superstitions et de la féodalité n’est pas tant gage de libération dans des circonstances frôlant la désolation ; les lumières occidentales, les divertissements et les promesses de vie facile agissent comme des consolations ou de doux leurres. Matsunaga/Mifune est justement l’otage consentant de ce nouveau modèle envoûtant mais peu charitable ; dans son cas c’est plutôt une façon d’embellir son entreprise d’auto-destruction (il patine lors des scènes de danse, jusqu’à s’effondrer – après avoir fait illusion sur la piste, dans le passé hors-champ).

Le cancer du poumon et la proximité avec la mafia sont corrélés : le mode de vie et les fréquentations de Matsunaga/Mifune reflètent ces déchirements nationaux ; Sanada/Shimura en est le phare, usé mais tenace. Plus prosaïquement, Yoidore tenshi est aussi une représentation pertinente de l’alcoolisme et des compulsions morbides en général, présentes chez les deux principaux protagonistes. Il montre, via Matsunaga, la compétition entre la volonté de refaire surface et les pulsions auto-destructrices, les sursauts patauds et les lamentations blasés ; ironiquement, Sanada doit sa résistance à tout ce qui fait son aigreur. Il a ignoré les appels du vide, persiste, mais n’a pas une vie plus gratifiante ; la frustration fermente, les mauvais comportements des autres et de sa propre impuissance (comme réformateur et comme professionnel – carrière ‘médiocre’ à ses yeux) alimentent son dégoût.

Cette rage même moisie le maintient pourtant en vie et lui donne du courage face à ses agresseurs et aux menaces de la vie ; et il faut bien de la colère ou du déni (ou obstination malgré la médiocrité de l’état des lieux – ce qui revient en même) pour un courage authentique (même si son imitation, d’essence mentale, peut sembler plus méritoire). Sanada, obscur notable alcoolique, est le plus proche de l’héroïsme : loyal envers l’alcoolique, progressiste (partisan de l’égalité hommes/femmes), idéaliste en dépit de ces heures sombres et doué de paternalisme malgré tout (qu’il exerce notamment en protégeant son assistante). Matsunaga le patient infect est plutôt l’équivalent d’un ‘bad boy’. Son issue rappelle celle de Tony dans Scarface (1932, signé Hawks) : la scène de confrontation armée, à la fin, renvoie au meilleur des films de gangsters américains des années 1930.

Sur un plan plus ‘people’, on notera la correspondance entre la vie de Mifune et celle de son personnage. Acteur novice, il était encore un paumé intégral, isolé dans le Tokyo d’après-guerre, lorsqu’il passa son premier casting en 1946, sur un malentendu. Avant L’ange ivre, il n’était encore apparu que dans La montagne d’argent (1947, de Taniguichi) ; il jouera dans 16 films à venir de Kurosawa, toujours dans le rôle principal et devient rapidement l’acteur japonais le plus connu. Son charisme en fait d’ailleurs le pilier inattendu de L’ange ivre, fonction initialement dévolue à Takashi Shimura qui interprète le docteur. Son jeu plus intérieur a pu le faire sous-estimer ; il compte pourtant parmi les acteurs les plus prolifiques du cinéma japonais. Fidèle de Kurosawa, il a participé à son premier film (La légende du grand judo) et l’accompagne jusqu’en 1965 (avec des retrouvailles juste avant sa mort via Kagemusha en 1980 – l’opus produit par George Lucas, redevable envers Kurosawa pour son influence, notamment via La forteresse cachée). Shimura aura le rôle principal dans Vivre (où il joue un fonctionnaire accablé par sa vie absurde et son entourage ingrat), un des rares films d’avant Barberousse où Mifune n’est pas à cette place.

Note globale 79

Page IMDB + Zogarok sur Sens Critique

Suggestions…

Voir l’index cinéma

CLOSE +

25 Avr

Sur le paradis perdu. Ennuyeux au départ (déluge de niaiseries et d’insouciance, plus tard d’émulations collectives de gamins) y compris par son intention manifeste de présenter comme naturelle et pure une romance homo juvénile. Puis à mesure que la situation se complique pour et entre les deux, le film devient plus profond et poignant (ou stressant quand la nature de leur complicité devient voyante, dans un contexte de garderie obligatoire qui se prête naturellement à toutes les nuances d’aliénation et au harcèlement). Suite à la bascule majeure (dont la brutalité est bonne pour la narration et sur le fond – il faut sentir cette coupure précipitée, cette volonté d’absolu qui a triomphé et vous laisse exsangue), cette nostalgie, cette douceur et cette douleur, deviennent entêtantes. Conscience à vif d’être passé à côté de l’amour d’une vie, ou au moins d’un confort et d’une amitié intenses, de milliers de moments de joie qui font l’intérêt d’exister. Peut-être aussi que la meilleure page d’une histoire personnelle vient de s’écrire, car cet amour pourra être idéalisé et ré-interprété à perpétuité, au prix d’un manque cruel (et alors que les deux individus avaient probablement une inclinaison trop proche, même si celle du brun était plus franchement féminine).

C’est justement cette érosion d’un lien et d’une situation parfaites que le brun ne supporte pas – en nettoyant l’âme du blond par le vide, il se donne les meilleures chances de le garder captif. Et celui-ci doit subir le soutien [même quand il est sincère et bienveillant] idiot et ‘administratif’ d’adultes (avec cette maladresse et cette indécence toute féminine et typique d’éducateur totalitaire et/ou petit d’esprit d’inviter à ‘partager’ son émotion) et de camarades incapables d’entrevoir l’ampleur de ses remords – et voir notamment ce gamin gras et bourru, vraisemblablement stupide, persévérer… or c’est pour obtenir l’acceptation d’un cortège d’animaux dans ce goût-là qu’il va vivre avec un fantôme. Il a voulu faire un pas de côté pour mûrir (notamment en se rapprochant d’un garçon sportif, au tempérament sobrement assertif et sans égocentrisme aveuglant – relation qui partait pour devenir le véritable premier amour, l’éveil qui le marquerait et serait romancé) et va malgré lui griller les étapes en éprouvant déjà le vertige d’un vieillard qui verrait son monde englouti. Le temps a ralenti, on ne veut surtout pas arriver au terme du film, lequel sera pourtant –c’est inévitable– une délivrance –car si on ne force pas, il n’y a jamais d’atterrissage.

Peu d’autres (la série Six feet under fait partie du lot) ont su communiquer les émotions de deuil et de culpabilité, de ce sentiment horrible, étouffant, avec un arrière-goût délicieux car il entretient une mélancolie qui devient la plus belle nuance d’une existence soudain terne et compliquée – mais il faut bien vivre, alors cette sensation aussi devra être rangée. Il y a dans la partie endeuillée un peu trop de tendresse à la limite de l’inapproprié (principalement avec le frère), mais c’est peut-être le prix de l’authenticité (et de la cohérence avec la préférence homosexuelle). Si on passe ce détail, les clichés de l’innocence bucolique et printanière, on peut trouver un de ces films qui font ressentir le charme et l’importance des acquis affectifs versus l’insignifiance des obstacles de l’environnement, des défauts d’une partenaire, de la honte qu’infligerait un parent ou un ami.

Écriture 7, Formel 7, Intensité 9 ; Pertinence 8, Style 7, Sympathie 8.

Note globale 78

Page IMDB   + Zog sur SensCritique

Suggestions… Trois jours et une vie

L’ILE DU DOCTEUR MOREAU (Brando) +

15 Sep

C’est un excellent film sur la fragilité de la condition et de l’identité humaine et donc un héritier valable, même si pas nécessairement ‘digne’, du roman de Wells. L’essentiel des limites d’un élan ‘de civilisation’ y est, avec la triangulation entre domestication, développement, orgueil. L’émancipation apparaît comme un mirage à la fois à cause des instincts, des nécessités et de la cohabitation. Animaux comme humains ont une pente vers la désintégration et l’auto-indulgence ; le fond normal pour les humains est la médiocrité, celui des animaux dopés du film est plus régressif et immédiatement toxique. L’entropie concerne aussi le pouvoir et même le noble objectif du despote éclairé ; il est autant un sage qu’un fou à la tête de ses ouailles puçées et soumises au contrôle de la Loi [anti-naturelle]. Il manque [pour plaire et rester divertissant] au film une ligne droite, un scénario clair ; le chaos de la dernière phase pèse sur sa capacité à convaincre et impressionner – or ce chaos est logique, présenter autre chose aurait été fumiste. L’ordre était trop facile à briser, ses sujets fatigués d’être soumis deviennent vindicatifs en accédant à une plus grande lucidité, puis tout simplement, poursuivre l’idéal ‘humain’ est si ingrat – et étranger !

À quoi bon devenir un humain, c’est-à-dire un animal supérieur domestiqué (ou contraint de le devenir pour s’épanouir y compris dans sa part animale, physique), si on est de toutes façons une version bâtarde, contrainte à une infinité d’efforts ? À plus forte raison si c’est pour parvenir à un semblant de respect froid mêlé de déception de la part d’une autorité qui jusqu’ici vous méprise avec amour ? Le dégoût et la colère inhérents à la montée en conscience deviennent un barrage insurmontable pour ceux qui ont été trompés sur leur propre vocation et se sentent instrumentalisés sans contrepartie ; mais c’est encore considérer l’aspect sombre et douloureux de la part humaine. L’absence d’ordre et de loyauté, de contrôle des pulsions, ne sont pas gênants pour les animaux, à l’égal de leurs compères les humains qui se sont oubliés. Le problème est aussi politique : après la mort du père et l’évacuation de l’autorité, après la fin des croyances aux promesses édifiantes et la fin de la niaiserie collective, sans colonne vertébrale, sans lucidité, sans projection dans le long-terme, les singes font comme les hommes pressés en meute et se livrent à des imposteurs, des tyrans, pourvu qu’ils meublent la réalité collective (et maintiennent l’illusion festive) – et si la peur ou l’urgence ne les guident plus, au moins leur restera-t-il l’appétit.

Par rapport à la limpidité d’un blockbuster d’aventure ou d’un film plus posé et ‘ouvertement’ fin, L’île du docteur Moreau paraît effusif mais lent, s’avère brouillon, parfois venteux techniquement et ‘cacophonique’ dans sa direction d’acteurs – et son tournage fameux est celui d’un de ces cas ‘maudits’ ou ‘malades. La prestation géniale de Marlon Brando au soir de sa vie peut laisser consterné – et elle est consternante ! Faut-il qu’un despote visionnaire soit nécessairement opaque et distant ? Qu’il soit un méchant de James Bond, de documentaire sur la guerre pour les enfants petits et grands, ou de Demolition man ? Le public se fait-il une si idée si précieuse et rigide des dictateurs, en sur-estimant la distinction avec un gourou ‘civil’ dont on accepte plus volontiers l’excentricité ? Il y a d’apparentes [et d’authentiques] bonnes raisons d’être frustré ou perplexe devant ce film, mais il ne mérite pas le sort qu’on lui a réservé, encore moins d’être traité comme un nanar ; accident industriel recyclant un trésor de la littérature, pourquoi pas. Depuis ma fenêtre, c’est le miroir de La planète des singes, comme l’était sa source – recommandable aux amateurs de bis qui tâche (et jouant avec la confiance dans la ‘réalité’ comme La cabane dans les bois) ou d’Alien 4 plutôt qu’à de la SF intimidante et sinistre [et sur-‘cultivée’] type Ad Astra ou Premier contact.

Écriture 6, Formel 7, Intensité 7 ; Pertinence 8, Style 8, Sympathie 8.

Note globale 78

Page IMDB  + Zogarok sur SensCritique

Suggestions… Hellraiser IV Bloodline