Assaut, c’est l’action autrement : une proposition radicale pour un genre dont la caractérisation est souvent bâclée, réduite à une essence simpliste, qu’une majorité de ses productions honore. Second film de Carpenter après Dark Star, Assaut sera lui aussi un échec en salles, mais il interpelle les cinéphiles et est acclamé par la critique de l’époque. Carpenter espérait tourner un western dans la lignée de El Dorado mais en raison de son budget nain, il se tourne vers la relecture d’un autre film de Howard Hawks qu’il admire : Rio Bravo.
Toute la virtuosité, la gravité sublime mais inquiétante qu’on retrouvera dans Halloween est dans Assaut. Carpenter y opère une approche de l’action à la fois concrète car aride, brutale ; et carrément abstraite. L’ange d’attaque de Carpenter est quasiment mathématique, ce qui donne à son film un côté éthéré et très puissant à la fois. Les forces antagonistes n’ont pas de motifs grossiers comme souvent dans le cinéma d’exploitation : elles n’en ont aucune. Elles sont anonymes et omniprésentes. Ces menaces déshumanisées, lorgnant vers le surnaturel, deviendront une signature du style Carpenter, mieux exprimées que jamais dans Prince des Ténèbres et dans Fog, où cette fois la dimension magique sera assumée explicitement.
La sécheresse de Assaut heurte et contrariera les amateurs d’action plus hystérique et conventionnelle. La violence y est somme toute peu présente en volume, les effets sont minimalistes quand ils existent. Le talent de Carpenter est justement dans cette mobilisation implacable de tous les éléments du décors, dans cette contemplation du Mal hégémonique aussi. Le rythme est lent mais il n’y a jamais ni creux ni boursouflure. Comme dans Halloween, la ville semble gagnée par des forces patientes et impitoyables, s’installant tranquillement dans un espace toujours plus vide et vulnérable.
Sec, tendu, mais pas toujours intense, Assaut grave des images fortes dans l’esprit et laisse songeur. À l’image de sa BO, l’ensemble de ses propriétés sont à la fois décalées, un peu rigides et pourtant percutantes. Son absence totale d’exubérance semble une audace et une aberration, mais son style exerce un envoûtement indéfinissable, que les flash conservés en mémoire confirment. Comme Rio Bravo auquel il se réfère, Assaut est un film de genre contre-nature, ne donnant pas vraiment ce qu’on en attend. Contrairement à Rio Bravo cependant, Assaut n’est pas dans le bavardage et surtout il a une qualité que le classique d’Hawks n’a pas : le courage.
Ces clin-d’oeils aux prédécesseurs (dans le western – La Nuit des morts-vivants est plus un cousin de fait qu’une source d’inspiration) peuvent être l’objet d’une incompréhension. Le « Gotta’s smoke » de Wilson est une espèce de running gag pas forcément évident. C’est une référence de plus aux westerns traditionnels, mais celle-ci ne gagne pas à être explicite car son insistance enferme le film dans la ringardise bien plus sûrement que les canons esthétiques des seventies. L’humour à froid de Carpenter peut aussi décontenancer et certaines saillies du film, notamment avec le flic noir, volent bas.
Assaut a fait l’objet d’un remake avec Assaut sur le central 13 (2005) et Nid de guêpes (2002) en est plus qu’un hommage, un véritable reboot. Ce film étonnant mérite d’être remastérisé et est desservi par les copies exécrables distribuées.
Note globale 74
Page Allocine & IMDB + Zoga sur SC
Suggestions…
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