COLOSSAL =-

10 Août

Avec Los Cronocrimines en 2008, Nacho Vigalondo a fait une entrée fracassante dans la liste des réalisateurs à suivre. Ce thriller fantastique épuisait remarquablement un concept aux prémisses fragiles. Puis Vigalondo a persévéré dans son créneau des essais décalés voire tendancieux, avec moins de bonheur (Extrarrestrial). Son quatrième long-métrage, hispano-américain comme le précédent (Open Windows, cousin de Black Mirror), confirme les paradoxes du cas Vigalondo : entraînant et pourvu d’une idée géniale, Colossal (sorti, hors-USA, directement en VOD au moment où Okja est livré par Netflix) se crashe en beauté à force d’errer (même si c’est avec aplomb).

Il se déballonne au bout d’une demi-heure, mais de façon saccadée, régulièrement en faisant douter ou compensant habilement. Au départ l’attention se concentre sur le personnage d’Anne Hathaway, jeune adulte indolente et dispersée, extravertie mais improductive et sans volonté, dissolue à la limite de la narcolepsie – accessoirement alcoolique. Le résultat relève clairement de la comédie et fonctionne. La mise en scène garde un recul sans mesquinerie sur la bouffonnerie de cette paumée sympathique. De retour dans le coin de son enfance, elle occupe la maison vide de ses parents – que bien sûr elle ne se soucie pas d’entretenir ; le mobilier lui sera apporté. Gloria ne prend pas d’initiatives, mais a des inspirations et des impulsions ; c’est elles qui l’ont poussée à s’aventurer (et somnoler) ailleurs, épargnant les coréens pendant autant de temps.

Le film a posé le personnage, banal et ‘épatant’, vrai bouffon charmant de feel-good-movie. Ironiquement, c’est la seule chose qu’il aura fouillée et menée à son terme. Il va continuer à étayer sur sa bizarrerie initiale, tourner sur le concept de l’aire de jeu ‘magique’. Sans y ajouter grand chose. Là-dessus il mêle les sentiments et assombrit le propos progressivement, jusqu’à la libération du dernier acte. Il s’affadit en recalant la farce, prend au sérieux des petites choses, d’autant plus insignifiantes rapportées à l’incroyable phénomène. Ni le film ni ses habitants ne se posent la question de l’origine et de l’étendue de ce jeu surnaturel à base de marionnettes géantes – sinon en termes purement pratiques. L’apathie face aux monstres concerne même les victimes : la vie continue presque normalement à Séoul ! Au bout du chemin, seul le moralisme de romcom et de films de post-ados nuance l’approche strictement immanente du film. Un flash-back ‘fantasy’ (lui aussi très typé et même daté) se charge de tout balayer.

L’intensité monte néanmoins avec les pétages de plombs du barman, sa capacité à aliéner Gloria aidant. Colossal se montre alors plus pathétique et inquiétant que torturé. Devenu ‘lourd’ comme un mélodrame il garde un côté gratuit, tenant intact le ridicule – manifeste aux yeux de quiconque refusera de se laisser porter, excusable en tant que contrecoup de la créativité sinon. Heureusement que le style et surtout les intentions sont énergiques jusqu’au-bout ; au moins Colossal sait divertir. L’humour s’exprime essentiellement par les dialogues et est potentiellement ravageur ; le cynisme jubilatoire est tout près, mais la barrière n’est pas franchie – question de tempéraments à privilégier (pourtant, il y avait de la matière vu la variété de lâchetés des trois hommes d’Hathaway). Mais le clash de monstres vite réglé en guise de final enferme le film dans ses vices ; il sait bien relancer et se perdre, il sait rejoindre les formules conventionnelles et éventuellement spectaculaires, mais il n’a que la fuite en avant pour rester debout.

À terme Colossal devient incohérent au-delà même de ses tendances ‘random’. La résolution bancale en suit d’autres plus petites. Gloria réalise que son ancien ami se comporte si horriblement car il se détesterais à cause de sa médiocre vie présente ; mais alors pourquoi a-t-il déclenché le mal dès leur enfance ? Avec le lot de flottements et d’angles morts contenus par le film, on pourra toujours se rattraper, expliquer, chercher de justes contorsions entre les lignes – alors que le film lui-même est sans subtilité. Il n’y a pas à blâmer des Fast and Furious débiles mais efficaces et encore moins Pacific Rim après ça (ou alors pas trop fort).

Note globale 52

Page IMDB + Zoga sur SC

Suggestions…

MBTI-Enneagramme : Hathaway joue une ENFP 9w1 carabinée. Son amant du début a une attitude IJ extrêmement prononcée (il est probablement ISTJ).

Scénario/Écriture (2), Casting/Personnages (3), Dialogues (3), Son/Musique-BO (3), Esthétique/Mise en scène (3), Visuel/Photo-technique (3), Originalité (3), Ambition (3), Audace (3), Discours/Morale (-), Intensité/Implication (2), Pertinence/Cohérence (1)

Note arrondie de 51 à 52 suite à la mise à jour générale des notes.

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