Tag Archives: Liya Kebede

LE CAPITAL **

24 Fév

2sur5 Quelques mois après l’aberrante saillie du candidat Hollande contre la finance (« un ennemi [qui] n’a pas de visage »), devenu président de la république française depuis, sort Le Capital (titre du roman de Stéphane Osmont [2004], adressant comme lui un clin-d’œil au livre de Marx [1867]) de Costa-Gavras (après Amen et Le Couperet). Il suit l’itinéraire de Marc Tourneuil, placé à la tête de la Phénix, première banque (imaginaire) européenne. Propulsé pour être sacrifié (il sera accusé de délit d’initié et promis à la prison), il devance ses collaborateurs et tous les adversaires avançant masqués en pactisant avec un fond spéculatif américain, ouvrant les portes au ‘satan’ de l’économie. Tourneuil (outil consentant et rusé) apparaît donc comme le fossoyeur du « capitalisme à la papa » au profit de celui des forts, dont il fait la promotion et cherche à tirer profit. Autrement dit, il va dans le sens de l’Histoire et saisit au vol les avants-postes. Lorsqu’un ancien communiste internationaliste l’ouvre (tonton au repas de famille – didactique, un peu con mais imparable), Elmaleh lui explique que son internationale à lui fonctionne, réalise des rêves, apporte des produits inespérés et fait travailler des gosses : il retourne toutes les accusations (même les plus odieuses) avec brio et renvoie idéalistes et subversifs au panier, ou plutôt à prendre conscience qu’ils lui mangent dans la main.

La vision est parfois grossière, le parti-pris tranchant mais sans éléments originaux ou réflexions nouvelles. Le Capital enfonce des portes ouvertes comme tant d’autres, mais en ayant les vertus de la férocité et de la franchise : les préférences idéologiques sont claires, les accusations sont précises. Ce n’est pas un essai de plus pour contenter tout le monde, c’est un pavé (un peu useless mais) lancé sans trembler. Ce film dit des choses éculées, réparti les rôles de façon primaire (les gentils, les salauds à divers degré, les autres qui s’accommodent ou n’entrent pas dans la ronde du sérieux), mais va droit au but, mélange vues ‘basses’ et détails forts. Ceux-là émanent des restes du Costa-Gavras au zénith : sur le pouvoir, ses ramifications, ses pièges et ses exigences. Cosmopolis de Cronenberg (sorti plus tôt dans l’année 2012) présente avec davantage de profondeur un agent de la domination et la désintégration d’un certain capitalisme, mais ce Capital a l’avantage de l’objectivité (et de la ‘transparence’). Toutefois ce film militant astucieux, sachant faire entendre son message, est aussi superficiel : il pointe les dérives sans souligner leur proximité, montrer leurs effets, se contentant de citer les anecdotes ‘massives’ comme les licenciements. Massives dans leurs effets, mais banales car rebattues et dérisoires car ce film n’aidera pas à se figurer ce qu’elles entraînent, signifient dans le réel dur – en cela Costa-Gavras est bien niché à côté de son ordure magnifique, à intellectualiser la nausée.

Concentré sur sa démonstration, Le Capital slalome entre les genres, comme un documentaire trop léger et engagé cherchant le meilleur costume pour se faire fiction. Dans l’ensemble le film prend une apparence de comédie mesquine et fatiguée. Il envoie avec énergie ses cartouches, réserve quelques moments de vacheries jubilatoires (contre la fille de l’ex-président), pompe avec succès la lucidité et l’amoralité de Tourneuil. Le film essaie de devenir thriller, mais chavire, s’affaisse sous le coup de rafales d’aigreurs et de pessimisme, rebondissant sur ses oripeaux de fable (excellentes à faire digérer ce Capital). Il garde un aspect de téléfilm aux moyens modestes, prenant de grands airs mais se reposant sur des béquilles fébriles, décalées : la volonté d’expliquer engendre des dialogues surfaits (mais jamais absurdes), des situations outrées mais pas à la hauteur de ce qu’elles désignent, etc. Ce décalage a des bénéfices indirects : les démonstrations impliquant des outils ‘modernes’ reflètent l’incongruité -IRL- des laïus sur « l’innovation » et « l’audace » assurés par les Oui-oui pantouflards pour les vidéos d’entreprise. Elles mettent Costa-Gavras et son équipe sur un plan parallèle, avec le même modèle ‘transcendant’, conscient et pourfendu cette fois. Ce manque renforce l’un des mérites du film : désacraliser ce monde, afficher ce que le luxe du ‘grand centre’ peut avoir de sinistre et de trivial (dans ses ressorts et ses motivations). Bref : jeter de la laideur sur des zones souvent protégées par omission.

Ce film est éminemment démocratique, une synthèse accessible, vulgaire mais ‘juste’ : elle pointe le pire (avec facilité sûrement, mais le pire est présent) et veut dessiner la tête. Source ou non, on l’ignore, en tout cas : c’est le point culminant (pas comme ‘événement’ spectaculaire, mais en tant qu’accomplissement durable). Le capitalisme financier à son stade de ‘libération’ ultime, lâché, parti pour faire sauter les dernières résistances et dévorer tout (donc parvenu au-delà de l’absorption et du vol, rendu à la liquidation pure et simple). Costa-Gavras souligne l’ambiance des lieux et de ces institutions mobiles. Dans ces mafias au sommet, on entre et s’aligne ; ‘la fonction fait l’homme’ : un requin standard devient forcément un boucher un costume, même s’il a une once de doute ou de contrariété, peu importe ses jugements sur les choses. Et surtout peu importe la morale, ou par défaut : la morale ici c’est l’efficacité – morale de dominant, légitime a-priori (d’un point de vue pratique et ambitieux), ravageuse à terme (d’un point de vue pratique et ambitieux aussi, sauf peut-être si ‘après moi le déluge’ est admissible). Il s’agit ensuite d’apprécier les effets et là-dessus Tourneuil a choisi la perception : c’est un jeu planétaire, donc avec des gagnants et des perdants ; justification et promesse en vitrine : « les gagnants peuvent tout perdre et les perdants tout gagner, c’est ça la beauté du jeu »). Perception et non plus le camp, la notion est obsolète, tout au plus y a-t-il des alliances à nouer pour cultiver des satisfactions communes. Rien de bien révolutionnaire en soi (l’égoïsme et le cynisme ne datent pas du néo-libéralisme ou même du XVIIIe, n’en déplaise aux ‘réacs’ optimistes) ; plutôt une régression radicale, avec le sabordage de toutes les constructions pour la stabilité et les résidus d’harmonie nécessaires à la survie d’une société et d’une espèce. Costa-Gavras désigne un ‘capital’ nihiliste, dont la maintenance elle-même est réduite au minimum : alimenter cette boucle pour elle-même (et en tirer une ivresse pour les décideurs).

Sur le bas-côté le film flirte avec l’insignifiance. La mise en scène est sommaire, le propos faisant tourner la machine et celle-ci suivant hébétée. Les acteurs sont peu gâtés et seul l’archétype incarné par Tourneuil est approfondi. Après La Rafle (sur l’horreur du Vel d’Hiv en 1943), Gad Elmaleh trouve un nouveau rôle sévère et difficile, s’en acquitte avec succès – non reconnu pour de multiples raisons, souvent mondaines, parfois propres au métier (le 1er avril de cette même année 2012, il écope d’un Razzie Award avec la troupe de Jack & Jill), mais aussi très concrètes : peu après ce film, Elmaleh devient l’égérie d’une publicité pour la banque LCL. Aucune surprise dans le public, mais une abondance de quolibets. En attendant Elmaleh a su sortir de la posture d’humoriste tout en devenant effectivement drôle, dans la peau de ce Tourneuil froid et résolu à tailler dans le vif, capable de jouer le crétin apprêté pour la télé, commentant pour le spectateur les abjections dont il a une pleine conscience. Comme l’inquiétant Frank Underwood de House of Cards (série sur les arcanes de la politicaillerie US, lancée début 2013), il s’adresse directement au public (à deux reprises : ouverture et conclusion). Costa-Gavras lui autorise quelques commentaires en voix-off pour introduire ses collaborateurs, ainsi qu’une poignée de rêveries ou jugements pendant lesquels il s’abstrait (en vain) de la situation donnée.

Le personnage a le droit à une certaine complexité interdite aux autres, tous des fantômes, passants autour de lui quand ils ne sont pas des concurrents (parfois des relais) ou des sujets. Il est salaud mais pas mytho (sauf en vitrine, puisqu’il faut bien – roi des discours creux et du mielleux glissant les signaux démagos/intimidation nécessaires). L’armure et la forme lisse craquellent tout au long du film, pas pour sombrer dans la sensiblerie mais pour amplifier certaines postures intimes du personnage. Le recul sur lui-même est décuplé, Tourneuil ironise et tient même des propos ‘moraux’ sans être affecté ou concerné, simplement en étant ouvert aux points de vue qu’il domine ou méprise (lui, ou plutôt le système dont il est une ressource d’avant-garde). Dans les derniers temps du film, il évalue sa reconversion éventuelle en croisé anti-capital. Une opportunité de secours, car l’héroïsme et le prestige occasionnés seraient de faibles compensations. Il se tire des chausses-trappes de son milieu en jouant les prophètes de l’aliénation des pauvres et le chantre des gouffres insurmontables : il y aura un public pour aimer. Sa relation avec Nassim (Liya Kebede) est un défouloir. Il s’y adonne à un comportement d’enfant enthousiaste puis finalement de brute triviale. Jamais Nassim n’aura de véritable importance, jamais il ne la considérera autrement que comme objet ; c’est un stimulant et l’espèce d’idylle qu’il se figure est juste une façon élégante (et délassante) de convertir son excitation.

Ce Capital refuse la neutralité et donne donc matière à discuter, mais il pourrait encore cacher son jeu, laisser le spectateur déduire ce dont il aurait envie. Au contraire, il a une fin, ou au moins des alternatives imparfaites mais déjà existantes, à proposer. L’opposition entre le capitalisme continental et celui anglo-saxon travaille le film, expliquant sa tendance à la caricature – ou son adéquation au réel extrêmement colorée. Le capitalisme anglo-saxon est plutôt perçu en tant que plate-forme qu’en tant que modèle strict ; c’est donc son émanation principale (ou supposée) qui est traitée. Le capitalisme à la française est reconnu comme celui du « copinage » mais il aurait des résidus de vertus, par nécessité et pas seulement par principe ; Costa-Gavras plaide pour cette forme tenant à la fois du paternalisme et du collectivisme, où l’élite se sert et défend le bien commun en maintenant le sien propre. Cela se traduit par la volonté de limiter les délocalisations et sauver les lois sociales (le ‘modèle social’ à la française). À l’inverse le capitalisme « de cow-boy » est mesquin et suicidaire, inéluctablement : c’est la « secte de la rentabilité à court-terme ». Agent de ce dernier, Tourneuil/Elmaleh tourne en dérision ce vieux fond français. « La performance » sera juge et non plus la bienséance (c’est au tour de la première de dérouler ses fatras ‘visionnaires’) : « nous ne serons plus jugés sur la soit-disant éthique bancaire à la française mais sur la vérité des chiffres ». Costa-Gavras a beau jeu d’emprunter cette posture, puisqu’il confond lui-même l’expertise et la morale, les lois du management et les sentiments, comme si ces derniers devaient être placés en première ligne en toutes circonstances, justifiant par ailleurs des iniquités établies préférables aux iniquités d’un système violent mais surtout aveugle à ses effets. De cette manière, Costa-Gavras attaque tout ‘libéralisme’ en général sans pour autant y toucher, puisqu’il reste concentré sur sa cible outrancière.

Il a le courage de l’afficher carrément, mais c’est le courage (en plus de celui de s’indigner catégoriquement – avec ce que ça comporte d’honnête et d’idiot) d’afficher sa résignation et sa complaisance au profit de vieilles bêtises, au nom de la lutte contre la tornade sous nos yeux. Ce Capital est le testament d’un gauchiste devenu héritier des résidus de la mentalité monarchique, en brandissant comme un trophée sa supposée fibre sociale – imparfaite mais bien utile et au bout du compte, indépassable rempart à l’ensauvagement. C’est bien de cet espèce de consensus hiérarchique, ce féodalisme compassionnel (avec une surface républicaine et l’horizon méritocratique comme compensation et optimisation) anti-néo-féodaux, que Tourneuil/Elmaleh est l’ennemi ultime (il y a bien d’autres ennemis mais apprivoisés, sans incidence, ou communs à d’autres puissances). Le Capital est donc ce genre de films ‘appelant les pouvoirs publics à prendre leurs responsabilités’, du moins en idéal : Tourneuil mise sur le manque de volontarisme du gouvernement français pour le vaincre, passer entre les mailles des filets voire saper ses lois. Les normes, les institutions françaises, ont un poids surtout symbolique et pas d’avenir : elles font peser leurs acquis obsolètes et stériles mais ne savent inverser les tendances ou imposer les leurs. Comme un organisme en fin de vie, l’État français ne sait que mettre des barrières, parasiter : il sait seulement réagir en somme. Naturellement Costa-Gavras dénonce la faiblesse de cet état et l’absence de contre-offensive, sans l’englober un instant dans sa critique : l’un des défauts du film est de ne livrer aucun fait ou nom précis ; il omet aussi de mentionner les résultats du modèle français, discuter la place de l’État sur cette économie. Est-ce un paradis ou le plus juste des mondes que le cavalier noir Tourneuil contribue à faire exploser ?

Note globale 54

Page IMDB  + Zoga sur SC

Suggestions… Film Socialisme + La Conquête/Durringer 2011 + Adieu au langage

Scénario & Écriture (3), Casting/Personnages (2), Dialogues (3), Son/Musique-BO (2), Esthétique/Mise en scène (2), Visuel/Photo-technique (3), Originalité (2), Ambition (4), Audace (3), Discours/Morale (2), Intensité/Implication (2), Pertinence/Cohérence (3)

Note arrondie de 53 à 54 suite à la suppression des notes impaires.

Voir l’index cinéma de Zogarok

NICKY LARSON ET LE PARFUM DE CUPIDON ***

12 Août

Nicky replonge vers la BD (elle entame le ‘réel’ par les lignes sur les côtés).

3sur5  On a raison de taxer ce film de lourd ou graveleux, de l’estimer à destination d’ados attardés ou de gens plus volontiers éméchés qu’exigeants. On peut défendre la conviction qu’il s’agit d’une adaptation insuffisante. Par contre lui reprocher ses déviances envers la franchise ou de la tirer vers le bac à sable s’appelle mentir – par nostalgie, intégrisme culturel ou aveuglement élitiste, voilà ce qu’il faudra définir. Dans la série de 1987 le héros est lubrique, les vannes assez limitées par leurs thèmes et leur niveau, l’action volontiers invraisemblable, le ton léger et la réflexion absente, le contexte chaud et urbain. Le film respecte ces données sans chercher l’imitation. Il a plutôt tendance à améliorer le matériel, ce que ne semblent pas avoir fait la plupart des versions cinéma (des anime et quelques lives dont un avec Jackie Chan en 1993). un autre anime sort dans la foulée .

Et surtout il y a cette fixation de Nicky sur les femmes et leurs formes. Là-dessus ce n’est pas pire que dans la série, simplement plus large et plus adulte. Lacheau a réussi à être fidèle au ton humoristique de la VF tout en étant plus crû comme l’était la VO et surtout, d’après les connaisseurs, le manga papier originel (City Hunter). La délocalisation ne pose pas de problème car déjà dans la série les apparences étaient caucasiennes et non asiatiques, sauf pour des personnages secondaires (et souvent les antagonistes). Respecter scrupuleusement la source a de toutes manières peu d’intérêt et exigerait le recours à des bodybuildés, des malformés ou du numérique afin de respecter les proportions curieuses (et changeantes) au niveau des épaules (féminines y compris). L’aval du créateur de Nicky Larson est probablement aussi sincère que l’engagement d’anciens spectateurs dans cette aventure. En revanche, les puristes et les individus gênés aux entournures par leur attachement à la vieille série souffriront tout aussi sincèrement des récurrents gags bito-centrés ou biturés, encore qu’hormis leur franchouillardise une majorité ne soit pas non plus si infidèle. La séquence d’ouverture a pour principal mérite de poser le pire sur la table et vacciner le public. Quelques passages éclairs comme celui avec les religieuses semblent appartenir à l’ère des bidasses ou de Louis de Funès, en tout cas à un monde révolu. Les fans de la Laura originelle devraient être satisfaits, bien que l’acolyte sous les traits d’Élodie Fontaine n’ait pas grand-chose d’un garçon manqué (sa moindre hystérie, sa fermeté et son caractère la tirent plutôt vers l’asexualité).

La mise en scène de Lacheau est soignée même si l’esthétique reste celle d’une comédie épaisse et d’un univers criard. Des bruitages et de rares poussées ‘cartoon’ reprennent directement le modèle (le marteau géant, en ouverture et en fermeture), les clins-d’œil aux autres gros titres du Club Dorothée pleuvent. La présentatrice apparaît en agent d’accueil à l’aéroport ; elle se joint au petit lot d’acteurs de la génération précédente (tendance déjà présente dans Alibi.com où la recrue Didier Bourdon semblait moins improbable). D’autres références, la plupart d’époque, traversent aussi le film avec divers degrés de discrétion (aucune pour cette séquence de plusieurs minutes à la Hardcore Henry – si c’est involontaire, c’est troublant car d’autres films d’action en vue subjective ne se confondent pas ainsi).Le style 90s se retrouve par des pseudo ressemblances avec les sitcom francophones de l’époque (jusqu’à la scène de rue où Nicky et Laura sont qualifiés de « messieurs ») et quelques détails relevant de l’industrie Besson (notamment Léon). Les spectateurs indifférents à cette culture et ces affinités n’auront aucun mal à suivre. Ils ne verront simplement pas à quel point tant d’éléments ramènent ou appartiennent à ce monde-là, pourront apprécier ou rejeter une comédie d’action typée (et supposer que le corbeau vient d’un succédané de Flappy Bird).

Le rythme est excellent et curieusement, le film est plus fluide que le dessin animé aux sessions d’une vingtaine de minutes. La série était plus focalisée sur le personnage, comptait sur lui pour l’essentiel des gags répétitifs, des actions et réactions ; dans cette version le suivi est plus éclaté, d’autres personnages sont aussi décisifs que Nicky. L’introduction de nouveaux personnages pour inclure ses camarades de la bande à Fifi contribue à en faire une comédie pas trop spécialisée. Poncho n’est pas mauvais mais ses ressorts et ses souvenirs sont éculés ; Gilbert Skippy est savoureux avec son aplomb misérable et ses expressions désuètes ou enfantines (comme le délicat sobriquet « mollo l’asticot », éloquent dans sa bouche). Un personnage digne de ceux de Jean-Paul Rouve (Couscous de Podium), mais capable de tenir sur la durée et sans immédiatement s’humilier. Parmi les rôles secondaires, Chantal Ladesou campe le plus réjouissant bien que ringard. Une nouvelle fois Audrey Lamy excelle dans un rôle de casos végétative une seconde, hargneuse la suivante. Paumée intégrale dans Polisse, elle est cette fois du genre à gueuler constamment dès qu’un membre de la tribu gesticule. Une carrière dans les déclinaisons franchouillardes d’Affreux sales et méchants, de Killer Joe ou même chez un nouveau Chatilliez serait à prévoir.

Le seul truc par lequel cette excellente comédie hystéro-beauf menace de s’appesantir et se laisser engluer par le cliché est la relation Laura-Nicky (ce qu’elle évite, mais peu de suite dans les idées, comme pour l’ensemble des gags même les meilleurs). En de rares occasions le ton flirte avec le sérieux, produisant alors un effet neutre mais curieux – pas celui d’assister à un nanar, mais à une sorte de pastiche s’acquittant du minimum de ses devoirs. Certainement le fan-service et la nécessité d’arracher des larmes aux gros-bébés trentenaires dont la chambre, le bureau et l’esprit sont inondés par les super-héros et héros extraordinaires de fictions du passé (bien sûr il y a certainement du [beau] monde autour de ce cœur de cible). La séance contient bien quelques faiblesses, spécialement les trois gags techniques ‘absurdes’ abusifs et inefficaces (la voiture, le bouche-à-bouche). « Beaux yeux belles couilles » est déséquilibré, « Beaux yeux belle queue » eût été plus savoureux. Quelques points mineurs nuisent à la crédibilité mais profitent au rythme et au style BD (modérément délurée) : il y a dans ce monde quasi-réaliste beaucoup de professionnels actifs la nuit (laveurs de carreaux, auto-école). Avec un peu de chance et de mauvaise foi on y verra l’once d’anticipation d’un film actuel mais entièrement bâti et excité par le passé.

Note globale 64

Page IMDB   + Zoga sur SC

Suggestions… Madame Irma + Deadpool + Kingsman + Les visiteurs 2 + Les trois frères + Barb Wire

Les+

  • bien fichu, scènes d’action et effets spéciaux bons
  • le casting
  • efficace, rythme irréprochable

Les-

  • comédie régressive (il faut simplement s’en aller ou l’accepter)
  • prévisible, de vieux ingrédients, des gags éculés

Voir l’index cinéma de Zogarok