Archive | janvier, 2013

2012 : SÉANCE DE RATTRAPAGE

30 Jan

L’année 2012 a été plus riche que la précédente en matière de découvertes cinés. Mais en dépit de ces retrouvailles, la Politique n’est pas loin de prendre l’ascendant sur la Blogosphère… Affaire à suivre. L’année 2013 s’annonce sous les meilleures hospices, avec le remake de Maniac pour démarrer.

En attendant, voici quelques films de l’année écoulée, dans la foulée de chroniques spéciales pour The Amazing Spider-Man, Des Hommes sans Loi, Laurence Anyways ou Frankenweenie
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ONE LIFE / VIVRE ***

3sur5  Film-documentaire animalier, adapté de la série-documentaire « One Life » diffusé par la BBC, il n’a eu les honneurs de la sortie en salles qu’au Royaume-Uni ; en France il est sorti en DVD par anticipation des fêtes de fin d’année de 2012.

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Le parti-pris consiste à faire de la vie animale une immense constellation où se déploient des combattants et des prédateurs de chaque instant. La structure est sans surprise mais beaucoup plus maîtrisée que d’ordinaire dans le domaine ; Martha Holmes réalise une œuvre intense qui gagne à être ouvertement scénarisée.

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Raffinée et cash, souvent pince-sans-rire, sa mise en scène transforme des poursuites ou des quêtes en séquences à suspense, tout en agrémentant les courses ludiques et les drames élémentaires de commentaires informatifs et enjoués (le narrateur US est Daniel Craig ; Anouk Grinberg pour la VF). La biodiversité est envisagée comme le matériau brut d’un recoupage clipesque, dense et intelligent.

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Grâce à cette originalité du ton, au rythme et à une grâce certaine, ce document animalier se hisse au-dessus du lot. La BBC n’a pas réuni les moyens de Yann-Arthus Bertrand pour Home et son produit n’arbore pas la même splendeur, mais il est plus condensé, plus divertissant et se passe de toute velléité idéologue, pour simplement s’acquitter de sa mission authentiquement écologique et de ses impératifs d’entertainment. 

Note globale 65

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SuggestionsHome + Félins

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TWIXT ***

3sur5 Avec Twixt, Coppola flirte plus qu’il ne revient à la source de son œuvre, l’époque où il appartenait aux écuries de Roger Corman et sortait Dementia 13. Un cinéma de genre, mineur mais divertissant. Il honore cette vieille passion avec élégance, mais ne s’arrête pas là : Twixt est un immense théâtre en trompe-l’oeil, arpentant les genres et l’œuvre personnelle du personnage. Le postulat classique de série B débouche sur une foule d’expérimentations, elles-mêmes consacrées autant à racoler une intrigue classiciste qu’engendrer une sorte de thérapie familiale.

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Le film se vit d’abord comme un spectacle un peu hagard et halluciné, une sorte de métafiction exhibitionniste mais trop polie pour être malade. Pour illustrer le processus de création littéraire, Coppola rempli sa mise en scène d’auto-suggestions et multiplie les morceaux de bravoure et de poésie loufoques, hybrides et grand-guignols. Il fait cohabiter logorrhée métaphysique de briscard sur le départ, ironique et néanmoins ravi, conte gothique et farce à suspense. Le charisme de Val Kilmer, magnétique dans un costume à contre-emploi, est presque un aspect secondaire. C’est surtout la beauté de Twixt qu’on retient, la sophistication du trait : la violence elle-même est désincarnée, c’est la grâce qui compte, dans la forme et dans les moyens (c’est le troisième film de l’ère numérique pour le cinéaste). 

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Néanmoins Coppola s’identifie largement à ce personnage, créateur fatigué quoique toujours vigoureux, virtuose mais assailli simultanément par deux certitudes : celle d’avoir encore des visions en stock, celle d’avoir perdu le souffle, l’énergie d’engager un chef-d’oeuvre absolu. Il se consacre ainsi à donner le meilleur de lui-même, sans chercher le recul ni l’artifice, sans calcul mais en espérant confectionner un produit ludique. C’est l’œuvre d’un cinéaste se vivant soudain comme un gamer, s’attachant à la mise en scène avec une superficialité revêche. Résultat : un spectacle curieux, nonchalant et ravissant, cynique et généreux. Une sorte de rêve lucide où Coppola assume et revendique un lâcher-prise tout en portant haut ses ambitions d’esthète et d’explorateur introspectif. C’est parfois un peu creux et pourtant toujours habité, d’ailleurs les amateurs avertis seront chaussés de lunettes infrarouges que n’auront pas la plupart des spectateurs, qui n’auront qu’à profiter d’une balade si douce, macabre et enjouée, merveilleuse aussi malgré d’étranges écarts pragmatiques, à la mélancolie rieuse.

Note globale 63

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Francis Ford Coppola sur Zogarok > Apocalypse Now, saga le Parrain, Outsiders, Dracula, Jack 

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Bilan de l’année 2012 (et de 2011)

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Publié exceptionnellement à 14heures

LOOPER +

25 Jan

Bruce Willis face à son ancien lui auquel il fait la morale, on a déjà vu, c’était Die Hard 4. Le contexte est plus ambitieux et complexe ici, le discours sur le destin, le fatalisme, plus assumé et moins étroit que dans le calamiteux come-back de John McClane. Exercice de style, espèce de puzzle narratif, Looper confronte un alter-égo du futur réfugié, mais juste pour une escale, dans le présent de son homologue. Ou l’inverse. Pendant deux heures, les boucles du temps seront le prétexte à des escapades ludiques, intenses et curieusement sensorielles.

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Looper peut dérouter ; il semble opérer en trois temps d’une seconde partie démentielle et raffinée à une dernière intimiste et plus sèche, où intervient un personnage féminin magnifique, avec entre les deux un couloir mixte, fait de mises au point, de doutes et de prises de risques pour le héros. La trame est dense mais toujours limpide, l’action pure n’est jamais entravée, le sentiment de sursis des personnages ne lâche jamais. On a la sensation d’assister à un spectacle mûrement réfléchi et calculé, dont tout le système sert à amadouer à la fois l’essence des références du genre et du grand-spectacle populaire.

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En effet, le scénario est impressionnant et manifestement le fruit d’une vaste construction ; il y a là un ingénieux labyrinthe spatio-temporel. Un raisonnement commercial relèvera surtout un matériel propre à bâtir une saga, adaptable au grand-public d’aujourd’hui, plus friand et conditionné aux intrigues SF torturées, tout en jouissant d’une véritable identité stylistique et surtout de la richesse d’écriture propre au cinéma de Rian Johnson.

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Cette singularité saillante est notamment canalisée par une vision très juste des besoins humains, en parfait équilibre entre trivialité et génie. Johnson a surtout l’intelligence et l’instinct de comprendre que la civilisation est subordonnée à ces besoins, et pas l’inverse (et surtout il sait ce que ça veux dire). Ou alors que justement, dans ce dernier cas, c’est là qu’est le malaise, la dépression et le vide ; et s’ouvrent des pages noires.

Note globale 71

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Suggestions… Minority Report

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UPSIDE DOWN *

21 Jan

2sur5 Sorti en Russie et au Canada l’été 2012, Upside Down ne doit arriver aux USA et en France qu’au printemps 2013. Une étrange disposition et aberrante stratégie de la part des distributeurs, d’autant plus que le film est visible sur internet. Accessible en HD depuis quelques jours, il aura probablement été découvert par la majorité des cinéphiles d’ici sa sortie en salles du 17 avril, dans des copies de qualité et en simple streaming de surcroît. Sabotage délibéré ou mauvais filtre et traitement a-pragmatique et négligent jusqu’au-bout ? On pourrait croire à une tentative de séduction paradoxale, une manière de limiter la casse en cherchant à justifier un échec commercial et artistique par quelques errances promptes à fabriquer une « légende », une genèse rocambolesque pour ce doux navet dont la porte de sortie sera le travestissement en film-malade.

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Upside Down pourrait ressembler au film SF tout-terrain du futur : fonctionnel, opulent, insipide, il mérite d’être diffusé dans toutes les zones de transit, les seuls contextes où chacun peut se repaître d’une daube pyrotechnique et dégoulinante, sans faire grief de la sécheresse à l’œuvre parce que cette furie placide accompagne le mouvement. Bref, c’est un film à voir entre deux portes, dans un couloir métaphorique, là il prendra tout son sens et aura sa place.

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D’un bout à l’autre, le film est dans le pathos ahuri et la surcharge continue (il n’y a pas 20 secondes d’affilée où nos oreilles sont en paix), romançant tout et notamment le plus bénin, à la façon d’un clip pop pour ravis de la crèche. Toute cette emphase artificielle empêche la moindre émotion de poindre, mais aussi bloque tout attachement, tout affect pour l’objet. La platitude et la mièvrerie de son exploration contrastent avec le potentiel indécent de son univers, ses mondes physiquement inversés mais plus encore ses moyens techniques.

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Fidèle à ses antécédents (Nordeste, Le Nuage), Juan Solanas (connu pour son cinéma plutôt  »humanitaire ») veut tout glorifier dans une espèce d’Eden paradoxal et bleuté. Or son approche est beaucoup trop cadenassée et démonstrative et il ne fait que désacraliser chaque instant, alourdissant au point d’écœurer dès le premier quart-d’heures. Surtout que les fastes esthétiques (du principe des deux mondes-miroirs à la photographie très originale) ne font que décorer un scénario d’un très grand conformisme. Le spectateur se retrouve à écumer un monde enivrant sur le plan graphique, piteux sur le plan conceptuel, laborieux sur le plan humain et imbuvable sur le plan intellectuel. Ou quand les constructions en labyrinthe sont le cache-sexe de luxe d’un produit aseptisé et somme toute très bourrin. Curieusement, c’est par ses quelques aspects comiques, seuls moments où il retrouve humilité et cohérence, que Upside Down accroche le plus vivement.

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À partir de la reprise de contact et de la restructuration de l’entreprise Transworld, le spectacle gagne en intensité. Malgré la misère de son écriture et le ridicule, voir la vulgarité de ses effusions émotionnelles, Upside Down commence à acquérir une certaine chaleur (peut-être à force d’usure nerveuse, car d’un bout à l’autre la vacuité est trompée par l’hystérie creuse et assez dérangeante du montage) ; on le sent immédiatement consumé mais au moins, le programme est enfin fonctionnel. Bien que peu subtile, l’expérience devient plaisante et le charme étrange de Kirsten Dunst permet de flirter avec cette grandiloquence tant convoitée. A son meilleur, le film atteint donc sa vraie vocation, ressembler à un The Fountain mélo, érodé et artificiel. On en sortira néanmoins passablement consterné d’un si étincelant gâchis.

Note globale 38

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Note ajustée de 40 à 38 suite à la modification générale des notes.

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MANIAC +

17 Jan

Masterpiece du cinéma gore underground, Maniac réunit, au-delà de ses qualités ou caractéristiques intrinsèques, tous les ingrédients du film-culte : tourné à l’arrachée dans les rues de New York sans autorisation, interdit aux moins de 16 ou 18 ans à sa sortie (18 en France), exploitation commerciale refusée… C’est par la vidéo que Maniac se sauvera et concrétisera sa légende ; à l’instar de Massacre à la tronçonneuse, il inspire tous les fantasmes et pour ceux qui auront passé le cap, il accomplit effectivement un dépassement des limites connues et entretenues par le Bis poli façon débuts de Sam Raimi. En France, il paraît dans la collection K7 « Les films que vous ne verrez jamais à la télévision » avant de pouvoir ressortir dans les cinémas de quartiers.

Maniac peut sembler désuet sur le fond au départ et beaucoup d’amateurs avisés gageront que Joe Spinell incarne une espèce de puritain par défaut. Ils verront rapidement que ce n’est pas le cas (même si certaines scènes de repli autistique paraîtront stéréotypées aux plus blasés, la puissance évocatrice de celle-ci demeure impressionnante malgré toute l’expérience cinéphile enregistrée). Si la performance de Joe Spinelli est un paroxysme de tueur misogyne paradoxal, elle offre surtout un plongeon sans concession ni scrupules dans l’antre d’un monstre, avec ses hallucinations, sa solitude maladive, son rapport au monde compartimenté, les délires qui façonnent son fonctionnement. Le rôle poursuivra d’ailleurs le comédien jusqu’à la tombe, bel apport complémentaire au statut  »culte ».

D’un bout à l’autre, Maniac est un film coup-de-poing, radical, à la fois sec et tortueux au possible, hyper-réaliste et simultanément sans aucune distance avec le délire du tueur. Le spectateur est confondu dans l’angle de vue du tueur ou à ses côtés au quotidien ; presque jamais le Monde extérieur n’existe en lui-même, par et pour lui-même. Maniac pourrait facilement être considéré comme un reportage trash sur un tueur en série hardcore plus ou moins typé, mais le sujet est vécu sans recul plutôt que disséqué. Il n’y a pas d’intellectualisation, de détours explicatifs ni de symptômes reconnaissables, seulement un aller-simple vers la brutalité d’un cauchemar interne permanent.

Joe Spinell est un asocial, un enfant-gâteux régulièrement reclus dans sa maison de poupée ou il peut prendre soin de sa collection mortifère. Il répète ses scènes originelles et traumatiques, les poursuit sans relâche, retrouvant des indices ou des contextes prompts à exulter sa psychose dans le réel. Etranger au Monde, il n’existe en lui que pour y accoucher ses pulsions, l’inclure dans ses paysages morbides. C’est une silhouette grasse et affectée, paranoïaque et culpabilisante (aux prises avec son Surmoi maternel, pour les nominalistes et les intégristes freudiens) mais insatiable, addict, même pas à un quelconque frisson, mais à une logique compensatrice, un réflexe délétère quoique ponctuellement libérateur.

Ainsi Lustig mène une incursion dans l’horreur et l’abstraction pure ; sa pellicule s’évade régulièrement vers l’univers terrifiant du personnage, totalement dévoré par ses pulsions et ses phobies. Les avatars de son psychisme dévasté sont matérialisés avec subtilité. Ce sera surtout le cas après les meurtres, ou le tueur se retrouve, redécouvre toute sa nature et ses fardeaux inlassables. En marge de ces séquences morbides, les tentatives d’approches pathétiques et émouvantes, ainsi que les meurtres spectaculaires et glaçants, sont autant de prestations déroutantes.

Les maquillages de Tom Savini (extraordinaires pour l’époque – notamment lors d’un certain car-crash…) participent largement à la grandeur esthétique de ce cérémonial impulsif et animal, exultant tout particulièrement lors d’un bal des masques ensanglantés.

Tendu, envoûtant, absolument glauque et monumental en son genre, Maniac sera en quelque sorte prolongé par la saga Maniac Cop du même Lustig à la fin des 80s. Un Maniac 2 a failli voir le jour et le film Fanatic ou Spinelli intervient sous une peau similaire est opportunément sous-titré de cette manière. Maniac aura son remake ; cette énième profanation d’un chef-d’œuvre sera étroitement assurée par Alexandre Aja (Haute Tension), dont le remake de La Colline a des Yeux était un évènement dans le monde horrifique à lui tout seul.

Note globale 82

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SEANCES EXPRESS n°5

13 Jan

> A l’est d’Eden*** (66) – US 1955

> Fish Tank** (58) – drame UK 2009

> Mutants** (44) – horreur France 2009

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A L’EST D’EDEN ***

3sur5 Récompensé de deux Oscars, meilleur réalisateur pour Elia Kazan et meilleur acteur pour James Dean, A l’est d’Eden a révélé cette météore du cinéma classique, un an avant La Fureur de Vivre et déjà quelques mois avant sa mort. Le sujet implicite d’A l’est d’Eden est l’Amérique des enfants agités émergeant dans le contexte d’après-guerre. Ce sont parfois des rebelles sans but, des adulescents moutonniers, mais ils sont décidés à se libérer des schémas qui, croient-ils et en grande partie à raison, les plombe ou les inhibent.

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L’Amérique reculée s’éveille au flot du Monde et cette timide sortie de la coquille engendre une jeunesse dont l’avidité naturelle trouve un écho, mais s’en trouve d’autant plus démunie et désorientée. Une jeunesse brisant la glace mais ne sachant plus trouver sa place, troquant les chaînes de la tradition contre les leurres de l’errance, la vagabondage et la conquête de son destin. Le récit d’A l’est d’Eden reflète l’accomplissement du rêve américain, la révélation de ses limites et ses contradictions avec le socle de valeurs et le passé : et James Dean incarne cette trahison originelle, au détriment d’un eldorado désuet et au profit de l’âge d’or paradoxal qui s’annonce (libérateur mais cynique).

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Il y a un manque au paradis. La sérénité familiale, la stabilité est un leurre, cette structure-même est un leurre. James Dean hésite entre rompre avec ses référents et rejoindre les siens qui sont trop loin ; il hésite entre loyauté par principe, mais pour des lendemains bucoliques et moroses, et réappropriation de soi, mais en avançant vers l’inconnu.

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Son personnage cherche à façonner une identité, un cadre définitif. C’est un rebelle contradictoire, cherchant structure, certitudes et amour : mais acculé malgré lui à des choix irrésolubles, il préfère tenter le chaos, pour mieux se trouver ou être sauvé. Ainsi James Dean semble destructeur, impulsif, sans buts ; mais il est indécis sur sa propre nature, sur sa fonction et son sens. Ingénieux et agité, en mouvement mais doutant de sa propre valeur, il veut faire son devoir, faire plaisir aussi et attirer reconnaissance et confiance : mais il ne sait pas à qui se vouer, ni quoi construire, d’autant qu’il est toujours tourmenté par le sentiment d’être mauvais, défaillant ou inadapté.

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Ceux qui ont le souci d’alimenter le roman du cinéma relèveront que la petite histoire croise celle à l’écran. En effet, pour les besoins du tournage, James Dean dû revenir à Los Angeles, ville qu’il avait quittée pour entamer sa carrière à New York, prenant ainsi de la distance avec son père. Le conflit avec ce dernier tenait notamment aux aspirations de James Dean et à sa volonté de devenir acteur. Même dichotomie dans le film : incompatibilité entre les vues morales du personnage de Raymond Massey et la volonté d’émancipation et d’affirmation d’un idéal du personnage de James Dean. Cette reproduction de la rupture père/fils a engendrée un tournage difficile, perturbé par l’inimitié entre les deux acteurs et les crises de la future icône.

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Note globale 66

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Page Allocine

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Enneagramme : James Dean incarne un type 6 caractéristique (intrépide, indécis, souci du devoir, de la loyauté, ambivalence par rapport aux règles), présentant notamment les aspects récurrents pouvant prêter à confusion avec le 4 (envie, revanche, jalousie, exaltation du drame)

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FISH TANK **

3sur5 Acclamé à sa sortie, notamment à Cannes ou il est couronné du Prix du Jury, Fish Tank semble déjà être négligé par la mémoire cinéphile. La jeune Katie Jarvis y est plongé dans un « aquarium » urbain paupér isé, ou elle réussit l’exploit tellement commun de n’avoir aucune intimité et pourtant aucun lien, ou les autres ne s’expriment et ne cherchent plus que les sensations (par la danse, la cogne, la narcotisation ou le drame sur canapé). Une sorte de méga-bulle de chaos ou déambulent des fantômes énervés, passifs ou désespérés.

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C’est donc la chronique d’une ado des banlieues : la trajectoire est limpide, le canevas habituel. En dépit de la bonne foi évidente -et surtout du talent d’auteure- d’Andrea Arnold, ce souci social tient beaucoup du reportage façon Confessions intimes, à la nuance monumentale qu’il est traité avec sérieux, décence, empathie et premier degré.

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Prévisible et vaguement touchant (surtout après-coup, un bon point), mais rebattu et monocorde, Fish Tank ne fait que résumer l’absence de perspectives, se colle à son personnage pour suivre son agitation souvent vaine, énumérant les stigmates de ses cris de détresse étouffés par la paresse des autres, le nihilisme ambiant et la chape de plomb que constitue le ghetto désaffecté. Et lorsqu’elle part, c’est avec un « gitan » comme s’exclame sa sœur : sa condition la suit et la structure à tout jamais – un peu comme dans Boys don’t Cry ou cet aveu d’échec et d’inaptitude était éprouvé sans être conscientisé – pour, chacun le devine, tenter de vivoter ailleurs, dans des habits de ploucs désaxés ou de serpillières sociales.

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Néanmoins Andrea Arnold installe une poésie, un rythme mélancolique mais irradié de la calme énergie de Mia/Katie Jarvis de dépasser son environnement. Cet espoir confus, mais grandissant, est comme une ouverture tant pour le personnage-pilier que pour le récit, prompt pour le reste à emprunter toutes les péripéties standards de ces drames axés sur le passage à l’âge adulte de mal-nés (phases de dépressions, élans de têtes brûlées, reprises en mains décisives).

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Note globale 58

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Interface Cinemagora (liens vers Allocine, IMDB, Metacritic)

Analyse de la séquence d’ouverture par Clermont-festfilms

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MUTANTS **

2sur5 Survival post-apocalyptique dans un enfer blanc et seul film français présenté à Gerardmer en 2009, ce pur action-movie gore apparaît surtout comme un prétexte à étaler quelques exploits scabreux (vomis de sang etc.). Dans sa première moitié, Mutants est jeu du chat et de la souris dans un immense bâtiment désaffecté entre un couple dont l’homme est en pleine décrépitude physique ; l’ennui pointe mais bientôt une équipe de secouristes présumés rejoint la citadelle assiégée, devenue QG des derniers hommes. Au programme, tensions internes (insistantes mais néanmoins mal foutues) et attaques de zombies (trash comme il faut).

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L’Histoire et les enjeux sont minimalistes, seule la violence graphique et le sens des réalités d’Hélène de Fougerolles ne sont pas épurés. L’ensemble se veut néanmoins nuancé par l’affection réciproque de deux protagonistes, mais jusqu’aux moments censément déchirants, c’est incroyablement pataud, voir incohérent, inadapté avec l’ensemble.

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En revanche, Mutants est attentif à la charge sensuelle d’une situation de chaos ; l’expression des dominants naturels, les rapports de force les plus prosaïques (avec quelques dualités mal-assumées, sage/pragmatique, décideur mesquin/suiveur obnubilé ou assistant contraint) travaillent le film et lui apporte un peu de consistance.

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On veut bien être prompt à encourager le cinéma de genre français, surtout qu’il a semblé chercher à s’éveiller dans les années 2000 – mais qu’autant d’artisans trop humbles ou de geeks inexpressifs y vienne fait douter des perspectives pour l’horrifique hexagonal, qui semble surtout servir à des jeunes techniciens un peu punks à se faire la main sans chercher l’invention. Si Mutants se hisse un peu au-dessus de la mêlée, il se fonde sur des intentions limitées, des particularismes (en terme de scénario, d’idées comme d’icônes) presque inexistants, en-dehors de son environnement esthétique.

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Il s’agit encore de caser du barbaque, quelquefois du bizarre (puisque du mutant) et beaucoup de conflit humain. Primal mais niais. Ça ressemble à l’exhibition de l’imaginaire d’un adepte de jeu vidéo : tout ressemble à la pub d’un survival dont nous sommes aux premières loges (à défaut d’être les héros), avec force effets sonores et graphique mais sans aucun esprit ni aucune construction (c’est Outpost, avec moins de surnaturel, moins de symbole, mais plus d’implication).

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Mutants ne sera pas parmi les grands (Haute Tension), pas non plus à classer au rang des daubes honteuses façon La Horde. Il occupe un espace plutôt intermédiaire, encore à la traîne derrière un tout aussi basique mais autrement stylé A l’intérieur. Il y aura tout de même la sensation prégnante que tout ça n’est que temps perdu ; c’est un tour de piste honnête mais d’une linéarité, d’un simplisme déconcertant. Heureusement que la dernière demie-heure vient booster cette penauderie agitée, pour accomplir un gros outrage forain. Et puis on retiendra de belles démonstrations physiques, d’autant plus respectables lorsqu’est intégré le budget du film.

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Note globale 45

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Page Allocine

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