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LA GRANDE BELLEZA +

3 Juil

Le sacre de La Grande Belleza est paradoxal, à peu près aussi ironique que l’inertie de la censure (autoritaire et plutôt puritaine à l’époque) devant Hellraiser ou l’adulation de Fight Club par des ados confus. En marge des récompenses attribuées au film, les réactions très lisses et bienveillantes des autorités italiennes et des leaders politiques frisent le ridicule. Cette Grande Belleza dont ils se félicitent du triomphe nie leur puissance. D’une part elle propose une vision romancée de l’Italie et des italiens, un regard d’étranger les confinant en caricatures dans un écrin doré.

Et en plus de cela, La Grande Belleza est une crucifixion. Ce n’est pas un objet vaguement mélancolique, c’est le reflet d’une décadence. Boulevard du crépuscule étendu à tout un peuple. Et autour, les fastes, la ville éternelle. Les meubles, ce sont les individus. Jep le journaliste à succès en a bien conscience et a choisi de s’enfouir dans une bonne carrière, renonçant à imiter les génies et se laissant vivre et bercer par Rome. Il fréquente les mondains et les regarde échoir, comme lui.

Le tableau est extraordinairement pessimiste. Il n’est pas tellement acide en revanche, car nous sommes à la hauteur de ces personnages un peu minables, tout petits face aux splendeurs dans lesquelles ils s’abritent. Paolo Sorrentino montre une population creuse et fatiguée, quoiqu’elle en pense, dans une ville millénaire, dont elle pollue la beauté, avec la politesse toutefois de ne pas se lamenter.

Si Jep s’accommode de cette situation, cette ambivalence fait s’interroger. Difficile de ne pas s’agacer des branlettes de vaniteux élitistes. Sorrentino se positionne de manière opportune à cet égard, si bien que malgré des réticences sur le fond le spectateur se retrouve, comme Jep, à défiler dans ce monde-là, en profitant du divertissement.

Il y a cette satisfaction d’être le spectateur au crépuscule, qui est surtout moral et culturel ici, qu’il s’agisse de ces abrutis exhibant leur fille pressée de barbouiller une toile en mode inspiration sauvage (in extremis, on nous montre un résultat  »cohérent ») ; ou de la performance de cette femme nue, l’étage du bas peinturluré du logo des communistes, s’éclatant la gueule dans un mur avant de venir déclamer « je ne vous aime pas » à un public de dégénérés conventionnels l’applaudissant.

Les gens s’éteignent, parce qu’ils ont tout. Il n’y a plus besoin d’ailleurs quand on est déjà au paradis, quand bien même les camarades seraient d’une insignifiance égale à la nôtre et d’une grossièreté supérieure. Jep a choisi de se gier devant cette « grande belleza » et a une tendresse un peu amère pour ceux qui tentent de l’attendre par leurs propres moyens. La Dolce Vita réactualisé, sauf que Fellini n’allait pas au fond de ce recueillement paradoxal.

Note globale 82

 

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Suggestions…  Le Syndrôme de Stendhal + Opera + Hannibal

Note ajustée de 80 à 82 suite aux modifications de la grille de notation.

 

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TRUE LIES =+

3 Juil

 

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Remake d’un film français, La Totale de Claude Zidi, True Lies ne reprend pas à son compte la dérision ni l’approximation franchouillardes. C’est également une comédie, plus achevée tout en donnant dans la vanne simple ; et un film d’action, avec des moyens conséquents, James Cameron oblige – auteur des deux plus gros succès planétaires de son temps, Titanic puis Avatar.

C’est une question de budget bien sûr, mais aussi de goût ; True Lies exploite les possibilités glamour et spectaculaires de l’intrigue et les sert avec des effets spéciaux puissants. Il pousse aussi le concept à bout, au point de prendre quelques risques par rapport aux sentiers battus du divertissement standard, lorsqu’il s’attarde sur la thérapie de couple explosive et chahute la trame générale. Il en résulte des séquences plus posées et très réussies, comme celle de l’interrogatoire.

Ici Cameron fait la démonstration d’une facette parfois contrariée : son talent pour la direction d’acteurs. Schwarzenegger n’a jamais été si drôle, tandis que Jamie Lee Curtis livre une performance particulièrement audacieuse. Remanié, le scénario joue avec les clichés de l’agent secret (séducteur et omnipotent) et sa double vie (la petite famille rangée) et envoie valser tous ces clichés, car rien ni personne n’est conforme au costume habituel.

Schwarzy en premier lieu, le surhomme rationnel ; Jamie Lee Curtis, l’épouse pince-sans-rire ; la fille, précocement cynique, sans être du tout une de ces espèces d’ado rebelle imbuvables. En se concentrant sur le couple, True Lies gagne en intensité même s’il rate les opportunités criantes des autres personnages. Enfin le film ne s’embarrasse pas de commentaires lourdauds comme le modèle qu’il trahit allègrement, se contentant de faire son office dans le show de masse.

Note globale 67

 

Page Allocine & IMDB + Zoga sur SC

Suggestions… Dommage collatéral + Vanilla Sky + Le Fugitif 

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