Archive | août, 2015

PLAYLIST ZOGAROK n°19

31 Août

GIUSEPPE VERDI – LIBIAMO *****

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SIOUXSIE SIOUX – DEAR PRUDENCE ****

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NEMERTIMES – FRUSTRATION ****

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BAUHAUS – SHE’S IN PARTIES ***

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PEARL JAMES – DO THE EVOLUTION ****

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Toutes les Playlists : 20, 19, 18, 17, 16, 15, 14, 13, 12, 11, 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1

TEAM AMERICA – POLICE DU MONDE +

30 Août

Parker et Stone lancent la Team America au son de « America fuck yeah » dans une course contre le terrorisme, le Moyen-Orient, les « liberals » hollywoodiens emmenés par Alec Baldwin et un Kim Jong-Il héritant du pire de Cartman. Une seule mission : l’humiliation de l’Amérique contemporaine, tant de ses défenseurs transis et illuminés que de ses pourfendeurs labellisés.

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Fidèles à eux-mêmes, les deux auteurs se moquent de la beaufitude de chaque parcelle de la civilisation humaine. Ils sont cependant moins bassement potache que dans leurs précédents métrages (Capitaine Orgazmo) et, à l’instar de South Park, ancre la bouffonnerie dans la réalité sociale, culturelle et politique du monde commun. Le film est frondeur, puéril, un peu nihiliste a-priori, mais tellement préoccupé par le triomphe d’une méchanceté gratuite qu’il est impossible d’y déceler le moindre message, la moindre lubie ou rhétorique masquée. Il n’y a pas ici de symboles masqués, de manipulation morale ou d’intentions idéologiques : c’est un film qui crache une vision du monde triviale et cruelle. C’est l’œuvre de deux artistes qui ont choisis de prendre la vie comme une comédie remplis d’acteurs d’une lourdeur effarante, qu’ils détournent pour en jouir comme de sales gosses même pas dissidents, juste amusés et même assez exaltés par ce théâtre si gargantuesque et limpide.

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Le film n’a pas la précision ni l’intensité de South Park, mais il en conserve l’acidité sous le vernis de la nonchalance. Les fans retrouveront quelques morceaux ou pratiques familières, dans les séquences chantées ou certaines anecdotes ou running-gag discrètement invoqués. Voilà un spectacle flamboyant et résolument farfadesque, un film-troll outrageux et jouissif. Il brille moins par son originalité que par son ardeur à railler ; car après tout, il se concentre sur le Monde et ne fait qu’enchaîner les digressions et le redessiner avec une brutalité caustique. Avec une virtuosité exemplaire. Cette façon de torpiller les hystéries notoires est hautement bénéfique, elle relève vraisemblablement d’une compensation adroite d’un sens du devoir oublié.

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Les ergoteurs pourront les tenir pour lâches, puisqu’ils ridiculisent quelques camps antagonistes sans trancher eux-mêmes ; mais l’intérêt de Parker et Stone n’est pas dans la recherche du Juste ou l’affirmation d’une conviction (on peut d’ailleurs regretter cette absence de participation aux combats idéologiques). Leur volonté est la parodie ultime, mais pas sournoise ; virulente et transparente, comme un sale gosse, pas comme des héros. Ils osent ce que d’autres esquissent, parce que trop timorés, trop attachés ou crédules.

Note globale 72

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UN HOMME ET UNE FEMME =+

29 Août

un homme et une femme

Le début de carrière de Claude Lelouch oscilla entre la catastrophe commerciale et l’échec nuancé par quelques bonnes recettes ou appréciations. Le cinéaste s’essaie alors aux scopitones (l’ancêtre du clip) où il aligne de grands succès ; cette expérience est responsable de l’importance de la musique dans son œuvre. Après avoir essuyé un refus pour la sortie en salles des Grands moments, Lelouch met en chantier Un homme et une femme. Il peine à trouver des fonds mais le soutien de Jean-Louis Trintignant débloque bientôt la situation.

Récit à la fois éthéré et terre-à-terre, plein de poésie, Un homme et une femme montre tout ce que sera Lelouch : l’essentialisme gentillet, la gratification par les petites fulgurances et les belles choses de la vie, l’intelligence visuelle, l’écriture minimaliste et limpide. Au plus dur des confessions, c’est Pierre Perret avec de grands sentiments, une douceur rare ; une vraie finesse aussi. Ce cinéma est sentimental au dernier degré, d’où le mépris ou l’indifférence catégoriques qu’il peut inspirer. Pourtant, en-dehors de la musique omniprésente, le style Lelouch est sobre. Sa contenance réelle, mûre mais vénielle, s’extériorise par le biais des dialogues et monologues intérieurs, emprunts de philosophies innocentes ou d’idéaux sur l’art de vivre.

Un homme et une femme connaît un succès immense et international. Il obtient la Palme d’or à Cannes et attire Hollywood. Lelouch déclinera des propositions alléchantes pour garder la maîtrise de son art, à une échelle (courte) qui lui convient. En ce sens il s’accorde effectivement aux fantasmes de la Nouvelle Vague et sa « politique de l’auteur ». Cependant avec le recul il n’est pas étonnant que Lelouch se soit dissocié du mouvement auquel on l’assimilait ; la suite de sa carrière démontrera sa non-appartenance profonde. Un homme et une femme arrive à la fin de cette ère de la Nouvelle Vague (un an après Pierrot le fou) et Lelouch n’a pas les prétentions ni les théories de ses homologues, alors en train de se déchirer.

Après cet espèce de Marienbad ingénu, Lelouch s’épanouira en emportant avec lui le grand-public, notamment grâce à Vivre pour vivre, L’aventure c’est l’aventure, La bonne année (admiré par Kubrick) ou Itinéraire d’un enfant gâté. La suite d’Un homme et une femme, Un homme et une femme : vingt ans déjà sorti en 1986, ne rejoint pas la liste des succès et fait partie des regrets de Lelouch (avec notamment le film de commande La femme spectacle, à ses débuts en 1964).

Note globale 55

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Suggestions… Le Mépris + Amour/Haneke + Le Conformiste + L’Aveu

Scénario & Ecriture (2), Casting/Personnages (3), Dialogues (2), Son/Musique-BO (3), Esthétique/Mise en scène (3), Visuel/Photo-technique (4), Originalité (4), Ambition (3), Audace (2), Discours/Morale (2), Intensité/Implication (3), Pertinence/Cohérence (3)

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LA MAISON DU DIABLE ++

28 Août

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Ce chef-d’oeuvre du cinéma fantastique est un grand incompris. Son économie de moyens pour un maximum de tension et d’ambiguïté est indubitable ; cela n’en fait pas un train fantôme classiciste, auquel cas il ne serait qu’un ancêtre des grossiers found footage. Ou plutôt, il est certainement un peu ça, mais il reste passionnant 50 ans plus tard pour des raisons bien supérieures. La plus grande richesse de La Maison du Diable vient de ses personnages : le docteur John Markway pourrait inspirer une franchise, Theodora être la reine d’un film noir. Et surtout Eleanor Lance est le véritable sujet.

La Maison du Diable, c’est celle d’une madame Bovary avec des raisons d’être tourmentée. Eleanor est une jeune femme si anxieuse et déchirée entre ses besoins et sa condition qu’elle semble à la fois beaucoup plus vieille que son âge tout en ayant l’air d’une enfant déboussolée, cherchant l’extase et un tuteur. Elle s’enfuie de la ville et de ses attaches ingrates à une sœur égoïste, pour rejoindre le Castel, un manoir excentré dont on a fait un hôtel, dans lequel logent de rares clients. Là, elle fait partie d’un trio impliqué dans les recherches expérimentales du docteur Markway, cherchant à capturer des manifestations invisibles qu’on qualifierait généralement de surnaturelles. Parmi les deux autres, Theodora, une femme extravertie et élégante, une dominatrice morose aussi, auprès de qui Eleanor se sent à l’aise.

Réalisateur prolifique, actif pendant trois décennies, Robert Wise (West Side Story, La Maison du Bonheur) signe ici un de ses meilleurs films et un modèle du genre (fantastique/horreur) et une référence du film de maison hantée. Au sein de cette lignée, il a laissé une emprunte profonde, inspirant directement Les Autres de Amenabar (un patchwork du cinéma d’épouvante de ces années 1950-1960) et Shining de Kubrick. Grâce à Wise et cette Maison du Diable, les grands studios (ceux de la MGM) surfent sur la vague du gothique, alors générée et toujours cristallisée par les films de la Hammer et de Corman. L’esthétique de la maison est éblouissante. Sa genèse également ; construite par un asocial, elle est labyrinthique, sans angle droit. Abondance de portes, de pièces, de couloirs ; trop d’ornement, de profusion. Cette maison est seule et autonome, l’élément humain n’est là que pour contempler sa singularité triomphante.

La bande-son est omniprésente et contribue à ce climat lourd, menaçant de prime abord mais néanmoins envoûtant. Wise la diffusait pendant le tournage pour conditionner les comédiens. En tant que film d’épouvante et de suspense, La Maison du Diable repose essentiellement sur la suggestion ; et l’auto-suggestion, légitimement qualifiable d’auto-intoxication, mais ce jugement manquerait de vision. Une phrase exprime le fondement psychologique d’Eleanor : « tout est si horrible et cependant si reposant ». Eleanor est la plus réceptive de tous pendant l’expérience, parce que son âme est disposée à entendre les cris les plus sourds et les sentences les plus sombres. Il existe un doute entre les propriétés paranormales effectives de cette maison et la part d’induction du docteur et surtout d’Eleanor.

Ce doute est en-dessous de la réalité à l’oeuvre, car il oppose des éléments s’alimentant. Les perceptions subjectives ou excentriques dans La Maison du Diable sont des symptômes francs, plus vivaces que des objets froids et sans densité, comme le sont les plates considérations de Luke Sanderson ou le cadre initial de Eleanor. Eleanor est l’élément manquant à cette maison, le réceptacle de ses songes, de son histoire. Elle comprend le langage de ce territoire. Sa peur, c’est celle de n’être pas à la hauteur des révélations sur son propre caractère. Et en dernière instance peu importe, car c’est ici, la source de sa vie, l’essence de sa chair.

Comme Les Innocents, autre classique de l’épouvante de l’époque (début de la décennie 1960), La Maison du Diable est avant tout un drame humain et (para)psychologique. Dans l’enfermement, elle trouve enfin la liberté et ce qui vaut plus encore : la révélation, du sens de sa présence au monde et de son unité. Cette harmonie était son rêve, elle implique une violence et une complétude permanentes. Au départ Eleanor était déchirée entre son besoin d’émancipation et de sécurité, manifestation de son aspiration à trouver des liens forts et sensés. Elle a survécu grâce à cet espoir.

Sa conscience est pressée et pour être comprise des autres, Eleanor dit qu’elle a toujours souhaité qu’il lui arrive quelque chose d’extraordinaire. Elle en garde la définition dans son monologue intérieur, mais passe son temps à l’exprimer, même explicitement, même sans le réaliser. Le sentiment d’Eleanor est plus profond qu’un caprice ou une confuse tentation de se plonger dans une quelconque aventure exotique et dangereuse : la force en elle vient de cette volonté de trouver, enfin, sa maison à elle. Une maison qui soit son sanctuaire et son destin. Elle la trouve, personne n’y voit rien, mais cela se passe. C’est l’égal d’une rencontre avec Dieu ou de découvrir les lois de l’Univers.

Note globale 87

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Suggestions… Les Yeux sans Visage + La Maison des damnés (1973) + Le Fantôme de Milburn/Ghost Story

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SÉANCES EXPRESS n°14

27 Août

Trois films :

> Soeur Sourire*** (65)

> L’Enfant Lion** (53) 

> Manhunt** (44)

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SOEUR SOURIRE ***

3sur5 Évocation de la femme derrière le mythe improbable et éphémère, le film de Stijn Coninx ne s’apprécie pas pour des raisons cinématographiques. La mise en scène est impeccable mais sans ingéniosité ; la maîtrise narrative est totale mais relativement terne. L’œuvre en elle-même n’a pas l’imagination et encore moins l’intrépidité de son sujet. Mais justement, c’est un film qui s’efface derrière son sujet ; la forme est seconde, l’émotion fait tout. Sœur Sourire, alias Jeannine Decker, est de presque tous les plans. Sous les traits de Cécile DeFrance, elle illumine l’écran, le déborde même, d’ailleurs le film tout entier, à l’instar de l’environnement concret de l’héroïne de fiction, semble poursuivre cette femme qui va plus vite que son ombre. Souvent pour tourner en rond.

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Tout converge autour de l’agitation et des rêves de cette gamine androgyne et ivre de vie. Le film se décompose en deux grandes parties : dans la première, sœur Sourire est une rebelle au couvent, dans la seconde, c’est une émancipée paumée et une starlette factice en tous points. Dans un premier temps, face à l’institution religieuse à laquelle elle se livre pour rompre avec les plans d’avenir de sa famille, Jeannine est confrontée au dogmatisme (surtout apparent) et à la dureté de vieilles gardiennes empruntes d’un esprit militaire et d’un amour de la hiérarchie.

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La confrontation de cette écorchée vive bourrue et affectée à un institut castrateur, exigeant et rigoureux est révélatrice d’un paradoxe. En effet, tout ce temps ou Sœur Sourire regrette son sort, elle s’en accommode pourtant, peut-être pour gagner du temps, à moins qu’elle soit trop absorbée. Si elle est venue au couvent, c’est pour assouvir un besoin d’émancipation tout en restant prisonnière, dépendante, enfant. Il s’agit d’être une sale gosse tout en étant loyale, cadrée, bref, d’être dominé pour simuler la rébellion tout en espérant la croissance. Ce n’est pas une attitude de rebellocrate ; c’est celle de quelqu’un d’étranger à sa propre vie, voir à son propre corps. Il y a donc, avec la foi, l’occasion d’un épanouissement, de satisfaire la quête de sens pour gonfler sa vie, l’extirper d’un chaos informel (le trop-plein de traumas, de souffrances et de pesanteurs conduit au chaos créatif, à l’incapacité à « être »).

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Puis la créature accepte une pleine émancipation et les risques de la liberté. Elle expérimente une gloire bizarre, inappropriée par rapport au marché, au public aussi, mais presque finalement à elle-même. Elle se perd souvent, revient aux mêmes endroits tout en empruntant des chemins similaires. C’est son paradoxe : touchante parce que son attitude est un mélange de candeur et de brutalité, Jeannine/Sœur Sourire reste toujours une imbécile et une page blanche, donne toujours le sentiment de n’avoir rien fait de concluant de sa vie ou de survoler ses échecs et ses réussites. Cette petite fille effrontée et pleine de bonne volonté a tout pour rendre addict d’autres égarés mieux lotis, mais aussi pour agacer profondément. Et c’est là le tour de force du film.

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Coninx, réalisateur aux productions rarissimes et essentiellement tournées vers l’univers religieux, prend son sujet à bras-le-corps. La force et faiblesse ultime, c’est que son film ne vit que par et pour son personnage. Il est donc intense, curieux et passionnant, mais bref à tous les degrés. Qualifier Sœur Sourire de téléfilm serait mesquin mais logique : c’est un portrait sage et nuancé, appliqué, à échelle humaine, s’achevant sur un angélisme doucereux. Il n’offre rien que de l’emphase à volonté, mais c’est sans mièvrerie et avec une franchise déconcertante. Dans le même contexte et avec un personnage moins borderline, le film n’aurait été qu’un téléfilm lisse et affligeant. En l’état, c’est une aventure aimable pour des motifs irrationnels, pour une pureté éthique et certainement pas pour sa banalité esthétique.

Note globale 66

Page allociné + Page CineMovies   + Zoga sur SC

En écho à un des axes du Blog et parce que c’est trop criant : sœur Sourire a toutes les caractéristiques d’un ENFP dynamité par l’ennéatype 6 (plutôt 6w7).

Note arrondie de 65 à 66 suite à la mise à jour générale des notes.

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 L’ENFANT LION **

2sur5  Entre le reportage et le conte décousu, L’Enfant Lion est une sorte de roman-photo tissé à partir de réminiscences personnelles, de métaphores empruntes d’un bon sens traditionnel. Le film s’adresse à tous et pas nécessairement à un public familial ; néanmoins, c’est les plus jeunes qu’il séduira en priorité. Ceux-là se plongeront plus facilement dans l’aventure, retrouvant une part de leurs aspirations ou de leurs petits fantasmes dans cette rencontre entre un enfant et la vie. Il y a bien sûr les interactions avec les lions, mais aussi avec la nature sauvage que l’enfant expérimente, percevant sa beauté et sa dureté, sans peur ni préjugés, mais simplement avec des yeux avides et, même si c’est mal joué de la part du jeune acteur, un état d’esprit effronté.

Un peu à la façon de Il était une fois dans le Bronx dans un tout autre monde, c’est l’histoire d’un gamin perdu oscillant entre schémas traditionnels et sécurisants et appartenance à une famille d’élection. La construction du film se calque sur la croissance du garçon, dont le développement personnel et la relation avec les lions sont interdépendants. C’est une amitié édifiante, formatrice qu’il hissera toujours au-dessus des autres. Autant dire qu’il y a une large dose de bons sentiments roudoudous et un défilé de félins d’amour, au milieu desquels s’incruste une grandiloquence et des rapports de force humains voir sociaux auxquels on ne croit jamais. C’est léger en tous points.

Difficile de cerner les intentions du réalisateur au-delà ; le basculement en milieu de parcours, s’il stimule le récit, paraît très artificiel. Le film semble alors se chercher et a recours à des arguments très prévisibles pour maintenir une narration signifiante. Il lorgne ainsi vers l’ésotérisme, évoque un peu la terre des ancêtres (quand c’est ailleurs, c’est toujours magnifique, synonyme de sagesse et de paix)… Tout cela ressemble fort à du remplissage : manifestement, Patrick Grandperret s’est laissé aller à l’inspiration, à des bribes réminiscentes, mais il donne l’impression de tourner en rond. S’il avait tranché pour une radicalité formelle, alors ces vibrations internes qu’il communique auraient pu encore pleinement s’épanouir ; en l’état, L’Enfant Lion est presque parasité par son scénario. Pour le meilleur, c’est donc un film sensoriel à la candeur brute, où l’Homme est à la hauteur de la Nature, s’inspire et compose avec elle.

Considéré comme une référence dans le petit monde d’un certain cinéma  »humanimal » (façon Deux Frères, etc.), L’Enfant Lion est un joli film, parfois sensuel, souvent mignon, mais il ne dépasse pas le cadre de l’honnête divertissement à savourer un après-midi où on se trouverait en mal d’évasion. 

Note globale 54

Film de Patrick Grandperret (France, 1993)

D’après le roman de Réné Guillot

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Note ajustée de 53 à 54 suite aux modifications de la grille de notation.

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MANHUNT **

2sur5 Produit norvégien d’une impressionnante normopathie de genre, Manhunt (situé dans les 70s) joue du cliché à un point de ringardise sincère confinant à l’anachronisme. Ses hippies en quête d’osmose décroissante ou ados attardés, avec leurs tensions bidons et leurs caractéristiques grossières, sont épuisants. Ils ne sont qu’un intermédiaire avant le rayon trash, où le chaland retrouvera les traditionnelles gueules d’atmosphère de ploucs mutiques et autres incohérences bien glauques. Naturellement, les personnages passent comme si de rien n’était devant des mystères ou bizarreries pachydermiques, prennent un laissé-pour-mort pour un clochard ayant élu domicile dans les WC…

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Un paradoxe retient pourtant. Ce n’est pas la chasse à l’homme engagée aussitôt passée la fastidieuse première demie-heure. Si le scénariste (Patrick Syversen) est vraisemblablement un gros beauf, le metteur en scène (Patrick Syversen) a du style. Manhunt est foncièrement désuet (sauf peut-être dans son troisième quart, plus intense), mais brillant d’un point de vue esthétique. Avec ses bois vallonnés à pertes de vues, il s’approprie un cadre rêvé pour poser un climat horrifique. La douceur des lieux, la sensation d’éternité et de finitude, de mort suspendue : ce paysage désenchanté, serein mais mortifère, semble naturellement appeler la violence.

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Le  »keylight », c’est-à-dire le filtre façonnant la lumière principale, habille le décor d’une chape de brume stylée et poisseuse. Cette atmosphère chromatique renforce la sensation d’immersion dans une terre abandonnée aux hordes sauvages, où les créatures de l’imaginaire peuvent se loger, où les pulsions réprimées dans le cadre de la Civilisation peuvent ici se défouler.

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Néanmoins, c’est un univers en vase-clos et l’imaginaire à l’œuvre est lui-même minimaliste et totalement emprunté. Jusqu’au final  »ironique » tout à fait poussif, c’est un gâchis, un survival banal et un peu laborieux, voué à rester dans l’ombre des récents chefs de file comme Détour mortel. Ses plans-séquences sur les instants de transition vers la mort en atteste : Manhunt ne sert que comme exutoire complaisant, rendu un peu intrigant au moment seul où il flirte avec l’érotico-snuff.

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Sorti en direct-to-video, ce nanar poli et raffiné a pourtant su attirer l’attention des adeptes de cinéma de genre, au point que son auteur a été produit aux US. Mais avec son film de zombies Prowl, il semble plombé pour longtemps. Gageons que personne n’ira le rechercher. Il aurait pourtant beaucoup à apporter dans un film où il n’aurait à se concentrer que sur le climat et déléguerait la mise en scène et l’écriture à d’autres.

Note globale 44

Interface Cinemagora  + Zoga sur SC

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