SAGA SPIDER-MAN +

27 Juin

A trois semaines de la sortie du quatrième opus de la saga, retour sur le triptyque supervisé par Sam Raimi. Les Spider-Man de ce goreux non repenti avaient su redonner leurs lettres de noblesse aux méga-blockbusters de l’action-movie US. On y découvrait un super-héros geek et candide assurément plus conformiste et consensuel que son homologue et concurrent Batman, mais plus facétieux et charmeur aussi.

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SPIDER-MAN ***

4sur5 Le réalisateur d’Evil Dead et de Darkman se voit définitivement intégré par Hollywood qui lui confie l’adaptation live de Spider-Man, vieille icône des comics Marvel. Un début affreusement cliché autour de l’archétype de l’intello scientifique asocial malgré lui. Un super-blaireau qui acquiert de super-pouvoirs ; si le genre est geek par tradition, ce super-héros là l’est par définition.

Mais le film dépasse tous les stéréotypes sur lesquels il se fonde ( »j’ai un don/une malédiction » : Monk aussi, hein!), et partant, surpasse toutes les espérances. Car ce que Raimi met en scène, c’est une brillante métamorphose : le personnage s’affirme, se dote d’une certaine répartie, gagne en charisme. Il devient attachant et son capital sympathie inespéré permet au spectateur de s’impliquer. C’est d’ailleurs la sensation globale éprouvée devant ce Spider-Man : le film part du cliché, et d’un héros sans attrait, pour devenir particulièrement stimulant et ouvert (d’une romance insipide il évolue vers une intimité riche) ; tout devient possible et cet état d’omnipotence est forcément séduisant. Les séquences édifiantes et intimistes s’emmêlent sans laisser le moindre répit (le combat dans l’immeuble de feu, pour ne citer que lui, concilie parfaitement ces deux pôles) ; le simple film de super-héros est chargé d’une force émotionnelle telle que Spider-Man en arrive à ressembler à une sorte de conte. Un conte sur la mue, le passage à l’âge adulte, les choix qu’il implique et le courage qu’il exige (on pourra estimer que les pouvoirs permettent l’accomplissement de la puberté).

C’est aussi la lutte de deux personnages en plein dédoublement ; en face, Willem Dafoe, gueule hors-norme pour parfait méchant, campe un Bouffon Vert cynique à la rhétorique séduisante. Une créature du Mal qui n’est pas sans rappeler le Joker du premier Batman.

Note globale 73

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SPIDER-MAN 2 ***

4sur5 Un opus plus tard, le super-héros s’inflige une super-couverture avec un métier super-banal (quelle frustration de voir un tel personnage s’infliger pareil, bien que nécessaire, double-jeu). C’est donc machine-arrière toute : Spider Man côté pile est exploité par ses employeurs, à côté de la plaque à cause des difficultés  »techniques » inhérentes à sa double-vie, toujours en retard et endetté, ses conditions de vie sont minables.

Bientôt il voit tout ce qui était cher à ses yeux défiler : l’amour, l’amitié, la carrière, peut-être même les pouvoirs. C’est la remise en question : reprendre la vie normale, ou rester condamné au statut de super-héros ? Le jeune homme est partagé devant les dilemmes qui se posent à lui ; toujours indécis et spontané, quelquefois opportuniste, il subit cette responsabilité qui l’a rendu accroc ; défendre le Bien.

Ce leitmotiv est un véritable refuge narcissique puisqu’en parallèle il lui accorde la toute-puissance. Léger revers de la médaille : en face, l’adversaire a changé de style, mais la figure du Méchant de service n’est pas enrichie (la prestation d’Octopus est néanmoins spectaculaire). Mais la lutte du Bien contre le Mal passe en second plan ici, au profit de combats beaucoup plus humains ; Spider Man 2 est un grand blockbuster existentiel. Pas boursouflé pour autant, le résultat est toujours aussi haletant, voir fascinant.

Note globale 73

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SPIDER-MAN 3 ***

3sur5 Spider Man a réglé ses comptes, il a été démasqué par ses proches. Des ambiguités ont donc été levées, alors qu’elles comptaient parmi les principaux rouages du scénario. Spider Man va-t-il concilier bonheur au foyer et hyper-activité publique et extra-professionnelle ? Et justement, tout semble concilié, d’un côté les aspirations intimes ont trouvées satisfaction, de l’autre Spidy est adulé par la foule.

Cet équilibre, cette sérénité nouvelle amène SM3 à déboucher sur de nouvelles pistes. Le film prend la forme d’un épilogue à propos du succès total et de l’éthique d’un super-héros. Les choses s’arrangent globalement, les problèmes éthiques ou sentimentaux sont mineurs mais finalement empoisonnent la vie du personnage ; la menace désormais, le motif de suspense, c’est la chute de la star. Le film sait susciter l’attente et le doute sur l’équilibre acquis. Mais ce qui booste véritablement cet ultime opus, c’est la vengeance personnelle de l’Araignée et l’inauguration de son double ténébreux. Ce dernier combat permet une nouvelle fois au héros de gagner en profondeur, achevant d’explorer ses dernières facettes.

Loin de l’allégresse de la découverte, Spider-Man 3 rompt avec ses prédécesseurs en se montrant beaucoup plus sombre (dans la mesure du possible d’un film aussi colossal et grand-public). La saga perd en illusions juvéniles mais la grâce est (presque) intacte. Il n’est donc pas interdit d’être suspicieux à l’annonce d’un Spider-Man 4 tant celui-ci apparaît obstinément conclusif ; les grandes thématiques de la trilogie ont été liquidées et ont trouvées réponses, les trois opus s’imbriquent parfaitement. Peut-être s’agira-t-il d’opérer une levée des zones d’ombres du personnage plus intense encore. La bonne option sera obligatoirement dans le renouvellement total ; alors, vers quoi Spider-Man s’apprête-t-il donc à basculer ? L’abus de pouvoirs ou l’usage à  »mauvais escient » ? La colère et la domination ? L’abandon à une vie plus ordinaire, qu’il ne saurait plus supporter ? Ou cet opus sera-t-il une simple synthèse des traits connus du héros ?

Note globale 65

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Les Spider Man sur Allociné : 1, 2, 3, 4
Les Spider Man sur Metacritic : 1, 2, 3, 4

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Autour de Sam Raimi :

* réalisateur > Jusqu’en Enfer-Drag me to Hell, Intuitions
* producteur > 30 jours de nuitThe Grudge (remake US), Boogeyman-la porte des cauchemars, Les Messagers

4 Réponses to “SAGA SPIDER-MAN +”

  1. Voracinéphile juin 27, 2012 à 13:41 #

    Tiens, une saga block buster sur Zogarok ! Les chroniques sont brèves, synthétiques et claires. Tout à fait d’accord pour les deux premiers films (avec une légère préférence pour le 2, plus impressionnant mais aussi assez frustrant pour Peter (l’épisode de l’apéritif mondain est juste horrible)), en revanche, c’est ton avis sur le 3ème opus qui va enclencher les débats (tu dois t’en douter, vu qu’il est le plus impopulaire des différents films).
    Si je suis d’accord pour le thème d’un statut de héros à conserver, je suis plus dubitatif avec l’homme sable. J’ai toujours eu du ressentiment sur la façon d’amener cette vengeance personnelle. La mort de l’oncle Ben était réglée au premier épisode, il y avait un coupable, et voilà qu’un nouveau parachuté tombe du ciel, comme une mauvaise blague de scénariste en manque d’inspiration. Certes, le héros se sent alors impliqué, mais le parachutage est facile. Quant au zig-zag de Marie Jane entre Peter et Harry, j’ai cru sentir un peu de remplissage. Et que dire de ce méchant photographe, qui a bien du mal à convaincre même recouvert d’un extra-terrestre ? N’étant pas un puritain dans le domaine des comics, je laisse tomber la baffe donnée à MJ, mais dans la globalité, je trouve le film un peu plus décevant que ses prédécesseurs. Toutefois, cet opus s’imbrique bien en effet avec ses prédécesseurs, donc le 4ème, déjà en changeant d’acteur, a intérêt à se renouveler. Je dirais au vu de la bande annonce qu’on va avoir droit à un héros geek qui ne sera pas trop malmené, et qu’on va jouer la carte de l’investigation familiale avec le parcours du père de Peter qui n’a pas l’air étranger à son état.

    • zogarok juin 27, 2012 à 14:53 #

      J’avais vus les trois d’une traite -période de nuits blanches à répétition, qui m’ont peut-être conduit à être plus laxiste, ou plus facilement emporté. Initialement, les trois étaient chacun notés 4/5, preuve du laisser-aller critique. Je ne me rappelle pas des détails de toute cette épopée, donc je ne peux te répondre. Il y a une harmonie entre les trois (toujours le même univers, mais un univers à tiroir – dans le 2 essentiellement), mais le dernier opus se regarde plus comme une série TV calibrée, de celle qu’on retrouve après une journée de travail par exemple. En fait, tout est étiré parce que tout est déjà joué ; ce 3e opus paraît artificiel. Le 4e doit trancher et partir ailleurs, sinon ce sera laborieux et chiant à en mourir – la série TV calibrée, ça va une fois. Le pitsch évoqué dans ton com n’est pas très motivant…

  2. arielmonroe juin 30, 2012 à 10:21 #

    Plus d’accord avec ton commentaire qu’avec l’article pour le 3… C’est trois épisodes de la série additionné, ça se regarde mais pas de quoi le relever. Le 1 m’avait bien emballé, après ça s’essoufle directement. Beaucoup de bruit pour rien.

    • zogarok juillet 1, 2012 à 20:40 #

      Radical. Le 2 est largement au niveau, il faut attendre le 3 pour qu’on éprouve plus le plaisir ni l’envie de perdre pied (en toute sécurité bien entendu – c’est du blockbuster bon enfant). « Beaucoup de bruit », ça, on pourrait le ramener souvent.

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