L’AGE D’OR =+

29 Nov

Deux ans après le court Un Chien Andalou, spectacle aux choix artistiques inédits, Luis Bunuel, toujours en tandem avec Salvador Dali pour le scénario et la supervision, réalise « peut-être l’unique film intentionnellement surréaliste ». Provoquant à son époque (1930) les foudres de la censure, l’émulation dans la critique et les débats enflammés chez les intellectuels, c’est un film téméraire, impudique et anticonformiste.

Sur la forme, il rompt avec toutes les traditions et l’acception courante du geste cinématographique. La représentation de la nature est fantasmatique, le scénario traître, la logique masquée. L’Âge d’Or est aussi antipatriote, puis surtout antichrétien, ouvertement libertaire et anarchiste, comme l’est Bunuel (et comme il le sera même à l’ére de ses méditations digne d’un intellectuel de droite ou d’un conservateur mystique – la période française). Il affole donc les ligues fascistes et d’extrême-droite, qui détruisent les cinémas où L’Âge d’Or est présenté.

Le film s’achève sur la défenestration d’un ecclésiaste du haut d’un château, dans la foulée de vieux éléments de décors de mobilier aristocrate cheap, retombant sur ses pattes pour partir vers d’autres aventures. Suit la conclusion, reprise taquine des Cent Vingt Journées de Sodome du Marquis du Sade : au château de Selliny, où une orgie criminelle se serait déroulée et dont l’un des seuls survivants, le Christ en personne, sort repus.

L’Âge d’Or est encore considéré comme le climax (précoce) du surréalisme au cinéma ; selon le Manifeste du Surréalisme, c’est « une hypothèse sur la révolution et l’amour qui touche au plus profond de la nature humaine ». Ces deux-là étant mis en scène comme des victimes des chantres de la morale et de la bourgeoisie. Malheureusement, c’est un film propre à son temps et dépendant de lui, dont les effets sont considérablement émoussés par le poids des années. Son concept opaque de rêve délétère a été balayé par Eraserhead ; ses images folles (un cadavre au plafond par-ci) sont parfois gratuites, apparaissent par endroit bien laconiques. Ses provocations et revers pittoresques peuvent manquer de sens (l’introduction, extrait d’un documentaire sur les scorpions). Toutefois le style puissant et évocateur, d’une originalité saisissante, reste aussi manifeste que la sensation de suivre un spectacle parfois désuet dans sa volonté de brouiller les pistes.

Note globale 61

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