L’AVENIR (Hansen-Love 2016) *

28 Déc

2sur5  Mia Hansen-Løve livrerait depuis Tout est pardonné un cinéma très personnel, fabriqué à partir de ses souvenirs et avec un style plutôt impressionniste. Pour L’Avenir elle s’est inspirée de la séparation de ses parents, deux profs de philosophie. Le résultat veut sonner ‘pris à la vie’, ne ressemble pas à du cinéma ou même à un téléfilm, pas à une vidéo individuelle non plus. C’est du réalisme sans dirigisme, avec prise de recul sur chaque instant. Tout repose sur le cas Huppert, les autres apparaissent comme ils sont pour elle et restent donc à distance, avec leurs airs brouillons, d’une gravité hors-de-propos, inutile. L’Avenir c’est l’histoire d’une sécheresse, d’une dévastation ; des rationalistes fadasses débordés par le temps qui court, saturés mais restant là comme des fantômes. Cette séance donne l’impression dans un ordre crypto-communiste mou mais accompli, où tout développement réel aurait cessé depuis longtemps ; les leviers de la boutique sont repris et dispersés, les ajouts et actualisations sont totalement vains, tout doit se jouer ailleurs à moins que plus rien ne se joue de nourrissant ou définitif.

Bienvenue au royaume du tout-externe vide. Pour Nathalie (Isabelle Huppert, vue dans Elle de Verhoeven au même moment) plus rien n’a suffisamment de sens et remettre les compteurs de sa vie intime à zéro est donc une occasion. Elle est libérée mais groggy et sans ressources personnelles mûres, seule la connaissance lui sert d’appui. Et ses savoirs ne servent à rien. Et les choses persistent, aussi la prise d’autonomie est peut-être réelle, mais c’est comme de rien ; sans doute trop tard, probablement pas pour la bonne personne. On coule avec bases établies, tout en les ayant larguées, ou n’y croyant plus ; le mari a rompu, mais est encore là ; elle s’occupe toujours de sa mère, une de ces vieilles esseulée se transformant en hypocondriaques jusqu’à la démence. Nathalie a l’habitude de fréquenter et même s’engager avec des gens ou des choses qu’elle n’aime pas, comme elle n’est pas disposée à s’emballer, à lutter contre ou pour, elle a le réflexe de s’aligner en espérant placer quelque joutes ou contributions utiles. Elle est casée et peut diffuser, à ses heures, sa lumière blafarde.

Parmi les rares points saillants : le jeu médiocre de nombreux acteurs, car à l’arrache, décalé ou excessif malgré sa conformité manifeste. En participant à recréer un réel surfait, bête, c’est cohérent ; il n’est pas sûr que ce soit le fruit d’une direction choisie ou plutôt celui d’un dérapage, mais c’est un défaut ‘positif’. Nathalie tombe aussi dans ces travers. Elle est la plus ridicule lorsque vient son chat noir Pandora, devant lequel elle multiplie les réactions d’idiote et d’ignare (contre-coup de l’urbanité et de l’intellectualisme dévorant probablement). Privée d’avenir après tant d’années d’errance maîtrisée dans le présent, Nathalie retombera sur le passé ; enfin, quelque chose sur quoi sentir le désir revenir ; l’enfance, le très lointain, pour elle qui probablement n’a jamais envisagé la nostalgie. Au bout du déclin sous les lumières crus et indifférentes ; juste le contentement et la chaleur, vraiment nouvelle, porteuse de tout un monde à découvrir -ou fantasmer- pour Nathalie. La forme romanesque aura peut-être été plus appropriée pour cet Avenir. La mise en scène est instable, penche parfois vers le clinique, donne soudain des coups de butoir soudain, ne se montre jamais féroce.

Note globale 39

Page Allocine & IMDB  + Zoga sur SC

Suggestions…

Scénario/Écriture (2), Casting/Personnages (2), Dialogues (2), Son/Musique-BO (2), Esthétique/Mise en scène (2), Visuel/Photo-technique (2), Originalité (2), Ambition (2), Audace (2), Discours/Morale (-), Intensité/Implication (1), Pertinence/Cohérence (2)

Note ajustée de 39 à 40, puis à 38 suite aux modifications de la grille de notation.

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