RESTER VERTICAL =+

7 Mar

Il y aura de la nudité crue et les moments phares de la vie en gore : une scène d’accouchement laborieuse, une petite sodomie (de charité) avant l’agonie, des élans amoureux bien dégueux, puis en général l’impossibilité de décoller. Auréolé par L’Inconnu du Lac, Guiraudie (Voici venu le temps) n’a pas profité de sa nouvelle visibilité pour attirer dans ses filets et se normaliser. Son Rester vertical est brutal, embarrassant, grand-guignol et encore plus imprévisible que d’habitude.

Son œuvre étiquetée picaresque se fait ici plus réaliste, peinturlurée de tartines absurdes reflétant un mode de vie. Le programme semble aléatoire et obéit à la cohérence de son protagoniste, un individu déstructuré mais engagé, randonneur affamé en perpétuelle aventure, aujourd’hui investi dans le Lozère et l’Aveyron. Ce genre de libertés n’est pas gratuite, aussi Léo (Damien Bonnard) est une sorte de parasite ; il a sa ou ses ‘banques’ privées ; sûrement des types ou des filles qu’il a séduit et bourré en chemin ; dans le film, c’est réduit à un mec attendant son scénario. Ce personnage est attachant à cause de sa sincérité perplexe (il est comme nu à force d’être dans l’itinérance et la recherche) et de sa combativité, même si elle est dévoyée.

Le fuyard est pris de l’envie de bâtir, sans se résigner à se poser, ou du bout des lèvres, ou parce que son nouveau terrier ou sa mission est encerclée d’échappatoires. Nous verrons Léo essayer de se construire une vie, des attaches, quelque chose à aimer et défendre, cette belle volonté étant contrariée par sa compulsion à rabattre les cartes, s’interposer contre toutes les entreprises de lissage, d’immobilisme, d’indifférence. Sa paternité est paumée mais pas passive, indigne malgré la bonne volonté. Toutes ses rencontres se produisent au hasard, certaines prennent ou se répètent, rarement on vient après lui car il n’en a même pas la plus secrète envie. Pourtant dans ses relations il est souvent seul à être enthousiaste ou assumer son implication.

Les personnages sont l’un des meilleurs atouts du film, en particulier le vieillard amateur de Pink Floyd, hôte aliéné du gamin androgyne cynique et égoïste, peut-être au point d’en être diminué. Marcel (Christian Bouillette) est un genre de grand-père idéal avant de sombrer à de multiples degrés – il laisse de jolies répliques de clochard aux réminiscences foireuses. Léo reste le phare de ce marais poisseux d’absurdistes, conservant l’amour du risque qui sauve de l’ennui, des lourdeurs de la conscience ou du vide (à commencer par le sien). S’il faut patauger dans la médiocrité au moins la sienne sera pittoresque et éclatante !

Note globale 68

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Suggestions…

Scénario/Écriture (2), Casting/Personnages (4), Dialogues (3), Son/Musique-BO (3), Esthétique/Mise en scène (3), Visuel/Photo-technique (3), Originalité (4), Ambition (-), Audace (4), Discours/Morale (-), Intensité/Implication (4), Pertinence/Cohérence (2)

Note arrondie de 67 à 68 suite à la mise à jour générale des notes.

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