SORTIES FIN 2011 : THE ARTIST & A DANGEROUS METHOD (& DE L’EAU POUR LES ELEPHANTS)

25 Mai

Deux films majeurs : le frenchie oscarisé et ultra-rabattu The Artist et le dernier-façonné d’un de mes auteurs-fétiches (A Dangerous Method de Cronenberg). Et en bonus, le petit De l’eau pour les éléphants avec Robert Pattinson (héros du prochain Cronenberg).

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A DANGEROUS METHOD ***

3sur5  Depuis 2007, l’activité de Cronenberg était en suspens. Après le tandem A History of Violence/Les Promesses de l’Ombre, tournant déconcertant pour les cinéphiles qui voyait Cronenberg se lancer dans un cinéma mainstream, on était logiquement plongé dans le doute. Il s’agissait toujours d’un cinéma très froid et ambitieux, mais aussi moins cérébral et surtout assez codifié, tant par rapport à un genre (la mafia, le western) que par rapport à l’air du temps. Cronenberg revenait donc en fin 2011 avec A Dangerous Method, achevant dans la foulée ce Cosmopolis (sortant en salles ce jour) s’annonçant ébouriffant. Ce tandem-là semble marquer un retour à un cinéma conceptuel et des projets plus téméraires et abstraits : l’enjeu, à moyen-terme, est de déterminer ce que Cronenberg gardera de ses récentes mutations ou d’identifier ses nouvelles manies et lubbies.

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En attendant le come-back révolutionnaire, A Dangerous Method rassure sur l’intransigeance intellectuelle et formelle de son auteur, convoquant les deux papes de psychanalyse (Freud et Jung). Dans leurs joutes s’immisce Sabina Spielrein (Keira Knightley), elle-même future psychanalyste freudienne, arbitre et accessoire relationnel et des fabrications théoriques en chantier. Désincarné et abondant, tout le film se partage entre la confrontation des visions de Freud et Jung (opposés notamment sur l’importance et l’implication du sexe dans la lecture psychanalytique des esprits). Spielrein est un avatar temporisateur ; Cronenberg aurait pu en faire celle par qui l’émotion arrive, mais il évite cet écueil, d’ailleurs les effusions romantiques ou sensuelles convergent immédiatement vers l’analyse rationnelle (tout devant nécessairement être inscrit dans un ordre d’idée plus vaste – ou s’évanouir faute d’être significatif).

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Voilà le pitsch : il était une fois une psychanalyse dure, hybride de pseudo-science, de traditionalisme et de rigorisme agressif. Une psychanalyse obscurantiste, post-médiévale en quelque sorte. Carl Jung (Michael Fassbinder) en extraie Sabina/Keira, maniaque hystérique aux mains de vautours conservateurs, dont la psychiatrie est l’arme et le moyen d’assouvir des besoins de domination et de sécurité. Jung emploie sa protégée comme assistante, cherche à valider puis élabore avec elle des thèses, d’abord au sujet d’un principe de déduction et d’associations de mots, puis, entre autres expérimentations savantes, autour de confrontations sadomasochistes très platoniques. Face à eux, un homme arrogant de ses découvertes, certain d’être un pionnier ; tout en flegme mesquin, Viggo Mortensen (en passe de devenir un collaborateur-fétiche de Cronenberg) fait de Freud le connard arrogant et opportuniste par excellence. Les deux hommes entretiennent des rapports constructifs, dans une pédagogie mutuelle, jusqu’à l’émergence d’un conflit couvert, toujours courtois et assassin.

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Avec A Dangerous Method, Cronenberg retrouve de cette dynamique  »clinique » qui manquait depuis Spider. Il introduit également une dose d’humour plus tacite – mais sans jamais s’égarer pour autant, sans se mettre à esquiver son sujet en se masquant derrière une ironie quelconque. C’est aussi pour cela que Cronenberg est resté auteur productif avant d’être faiseur industrieux. Pour autant, cette livraison est encore plus académique que le diptyque précédent ; mais son univers est moins ancré, son horizon n’a pour limites que celles des spéculations et de l’imagination de ses héros. A Dangerous Method est l’écrin de réflexions aventureuses mais méthodiques. C’est un objet mouvant mais passablement neutre. La forme, simple et épurée, paraît choisie comme pour ne pas gêner l’intelligence et la croissance ; comme, aussi, pour mieux anticiper les tentatives d’irruption de pulsions et prise de conscience violentes au milieu d’une atmosphère immaculée. Bien sûr, l’œuvre ressemble à un vieux drame bourgeois d’époque, mais est tâché par des névroses et des désirs latents cherchant à exulter ; dès lors, cette réserve, cette pudibonderie de façade même, deviennent le jouet d’un artiste pervers et chercheur décidé.

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Note globale 67

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Page AlloCiné

Fiche Metacritic 

Critique Chronic’Art

Interface Wikipedia

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THE ARTIST **

2sur5  Ce sera donc l’un, sinon le grand sur-côté de l’année 2011. Deux regrets majeurs : d’abord, que cette surévaluation soit aussi transparente, démonstration ultime de l’omnipotence des industries mainstream sur le cinéma labellisé  »authentique »,  »d’auteur », voir alternatif. Ensuite, que le cinéma français ne puisse être reconnu et récompensé de façon significative que pour des productions globalement défrancisées.

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Néanmoins, The Artist marque la consécration de Michel Hazanavicius, dont les trois premières livraisons ont révélé toute la créativité, en dépit du scepticisme qu’inspirait l’amorce de sa carrière, puisqu’elle se déroulait à la télévision sur Canal+. Hazanavicius est désormais lié à Dujardin, qui devient de fait son acteur fétiche, son Johnny Depp. Ouvertement policé, The Artist est naturellement loin de l’irrévérence de OSS 117, mais il met aussi en valeur les limites de cette filmographie et pose le doute : finalement, peut-être qu’Hanazavicius, virtuose technicien et narrateur, ne sait que sublimer les matériaux qu’on lui prête ou qu’il décide de s’approprier. C’était le cas avec La Classe Américaine, son premier long-métrage, ou il compilait des morceaux de films-cultes américains en les doublant avec un français farfelu. La créativité de Hanazavicius était confirmée avec les deux OSS, ou il déployait un sens aigu du grand-guignol, de l’allusion (parfois folklorique) et de la farce borderline (Rio ne répond plus étant le point culminant). Mais cette inventivité paraît dépendante d’un support extérieur ; comme si, seul, Hazanavicius ne pouvait rien fabriquer, mais que son talent consistait plutôt en la mise en scène d’univers pré-existants, voir pré-mâchés. C’est donc plus certainement un cinéaste-critique qu’un artiste-iconoclaste ; d’ou la réussite actuelle, d’un réalisateur sachant concilier style et conventions. A condition que le matériau soit valable ; or ici il est chancelant, promotionnel et il est manifeste que The Artist est à la fois une œuvre de commande à la gloire d’un mythe épuisé, en même temps que l’oeuvre d’un fan trop obnubilé, trop enfantin, pour maintenir sa lucidité acide et rebelle.

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Ce film sur l’avènement du parlant avec en toile de fond, un amour niaiseux pleins d’obstacles et de sentiments ambivalents (orgueil, jalousie, admiration) est un produit totalement creux, mais d’une dextérité absolue. Il n’y a pas de mystère, The Artist est une œuvre formelle et synthétique, rien d’autre. Et le contrat est rempli : Hazanavicius cumule les idées de mise en abyme, allant même jusqu’à conceptualiser son propos en l’adaptant physiquement à ses méthodes. Cette démarche s’épanouit notamment dans une scène cauchemardesque très inspirée, que d’aucuns qualifieront avec empressement de cinéma pur.

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Sauf que The Artist est d’abord un divertissement et qu’il n’est jamais plus séduisant qu’en assumant sa frivolité, ne convaincant guère dans sa phase de gravité. Le solennel ne lui va pas, les intenses effusions sentimentales paraissent excessivement artificielles et poussives, tant le drame est infondé. La lourdeur est elle que même la mielleuse romance heurte par son incohérence, sa construction malhabile. The Artist inspire alors une satisfaction penaude, mélange d’indifférence et de respect pour les efforts et la maestria déchaînés, réclamant légitimement (en raison de leur qualité objective et littérale) les applaudissements sans les mériter. Rien ne transpire ni n’éclate de et dans The Artist (les curieux concluant  »tout ça pour ça » sont ou seront légions).

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Au-delà de ce qu’il est, The Artist est approuvé et acclamé pour ce qu’il implique : un peu à la façon de La Môme sans en partager les tares et le lyrisme méthodique et assourdissant, The Artist dispose d’une valeur culturelle indépendante de ses qualités propres, mais associée à l’identité cultu(r)elle mise en scène. Le geste est si bien accompli, si dévoué à l’âge d’or d’Hollywood, que ce programme chic et bien-aimable en révèle toute l’absence de profondeur. Le génie consiste à utiliser la banalité pour la camoufler sous des dehors enjoués et aguicheurs ne laissant jamais de répit, pour que les aspirations candides trouvent leur sublimation dans la légèreté et l’allégresse.

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De fait, Hazanavicius est aussi besogneux et minimaliste (tout en étant brillant) que les modèles après qui il court ; or un faiseur ne peut pas s’engouffrer dans les brèches s’offrant à lui. Lorsque la ringardise et l’angoisse se confondent, un univers étrange surgit, tapis dans l’ombre, étouffé sous la lumière filtrante des projecteurs voraces et aveugles. Par moments, The Artist affiche le potentiel d’un film d’horreur, mais ne l’assimile pas. Résultat, le tragique seul occupe l’écran alors que le comique sardonique de la situation est évident. Drame inconséquent et hésitant, The Artist est aussi un piètre mélo, alors qu’il est assez bon en tant que divertissement pur (imitant et modernisant avec brio), avec même par endroits la magie de la comédie musicale hollywoodienne (classique et normative, mais néanmoins captivante pour sa théâtralité). Pas ennuyeux pour autant en raison de son agitation compulsive, le film semble néanmoins très long, comme abusant de la patience de spectateurs déjà acquis au fait que tout est réglé.

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Note globale 52

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> MBTI : Dujardin dans ce rôle est un bel exemple de ESTP : enjoué, spontané, conquérant et séducteur (révélant les traits narcissiques de ce type, ainsi que sa difficulté à admettre un échec ou l’invalidité de ses positions).

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DE L’EAU POUR LES ELEPHANTS **

2sur5 C’est dans un contexte forain pendant les 30s récessionistes que se déroule le choc des titans entre Pattinson le vampire et Christopher Waltz, le nazi d’Inglorious. Enfin, c’est la rencontre improbable qui aurait pu être à l’œuvre, mais ce n’est pas le cas, puisqu’autour il y a une petite fille désabusée (Reese Witherspoon), de charmants animaux et quelques briscards alanguis ou femmes de joie transparentes.

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Après avoir perdu ses parents, un jeune homme d’origine polonaise (Robert Pattinson) se retrouve seul à la rue, atterrissant bientôt dans un cirque quand il était promis à une carrière de vétérinaire. Genèse à la Titanic (et puis ça finira en catastrophe humaine et matérielle avant la lénifiante stabilité finale), ou un vieux monsieur raconte à un jeune l’expérience-clé de sa vie. Pour installer le récit, Francis Lawrence expédie la mise en forme, sans reculer devant les incohérences et les niaiseries typiques. Dès le départ, joli couplet hypocrite sur le plan idéologique, avec le vilain banquier à la morale capitaliste et conservatrice expliquant la nécessaire intransigeance en affaires au fils d’un immigré généreux avec le petit-peuple et optimiste (lui) malgré la Grande Dépression.

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Pathos à foison et schémas ressassés au programme, avec Rozzy l’éléphante pour élément perturbateur (drôle de rencontre avec Roby ou elle se suggère en femme phallique). Mais il ne faut pas se mentir, le film est mignon, il génère probablement ce plaisir qu’on les enfants en balade au zoo, ou bien celui d’une âme un peu esseulée prête à larmoyer pour n’importe quelle tragédie romancée et bien trop surfaite pour réellement pénétrer (et donc, briser). De l’eau pour les éléphants est plutôt agréable, voir efficace par intermittences (quelques hausses de tension, courtes mais réussies), mais incapable de tenir la distance ; sur le fond, parce qu’il est trop manichéen, sentimentaliste et normatif ; sur la forme, parce qu’il est outrageusement prévisible (fragments de phrases caractéristiques et faciles à anticiper), régulièrement explicatif (celui qui n’a pas intégré « la prohibition » est sourd ou idiot) et bien trop collé à son cahier des charges du mélo hollywoodien à l’ancienne. D’où une discordance à l’occasion : August est hilarant dans ses élans auto-parodiques, alors que dans ces moments-là, le drame s’accélère et parfois mêmes, des vies se jouent.

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August, alias Christopher Waltz, est justement l’atout évident de ce petit manège foncièrement insignifiant mais globalement attachant, pour les raisons mêmes qui font sa petitesse et sa candeur navrante. Voilà un méchant typé jusqu’à l’os (cynique, excentrique, contradictoire, colérique et surtout despotique – alors qu’on pourrait le présenter comme logique, original, haut-en-couleur et protecteur) ; quand tous les autres caractères sont limpides, univoques (le film est donc très disneyen) et notamment Robert Pattinson, personnage sensible, modéré et éclairé, doux et introverti. Pourtant les efforts déployés sont manifestes, mais August/Waltz restera le seul personnage un peu dense, quand le tricotage d’un amour contrarié par la réalité mais plus fort que le fatalisme et les méchants obstacles du monde laisse à désirer. Bref, le film est innocent, mais laborieux, sans intérêt ni ampleur, toutefois les animaux sont adorables, le couple de benêt transi est touchant malgré tout et un trublion relève un peu le niveau et apporte un contrepoids à la rafale de loukoum. Par ailleurs, ce troisième long-métrage de Francis Lawrence est bien plus regardable que ses blockbusters SF prétendument « arty » (Constantine) puis « conceptuel » (Je suis une Légende). 

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Note globale 44

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Fiche AlloCine 

Fiche Metacritic

6 Réponses to “SORTIES FIN 2011 : THE ARTIST & A DANGEROUS METHOD (& DE L’EAU POUR LES ELEPHANTS)”

  1. Voracinéphile Mai 25, 2012 à 21:54 #

    Voilà un programme bien alléchant ! J’ai seulement vu The artist sur les 3 chroniqués. J’avoue être toujours assez curieux sur ce A Dangerous method, qui avait divisé la critique lors de sa sortie. Si formellement, je m’attends clairement à quelque chose de très classique, le contenu psychologique m’intéresse beaucoup , vu qu’il s’agit d’un sujet que j’affectionne, et qui se targue d’un pitch minimaliste, mais passionnant. Curieux de voir Viggo dans la peau d’un connard, prétentieux, je n’y avais pas eu droit depuis un certain Daylight, qui ne représente pas grand chose dans la carrière de l’acteur. Mais il avait du potentiel, et ses performances dans History of Violence et Les promesses de l’ombre témoignaient d’une certaine ambiguité. A voir donc, même si le cru semble au dessous des chefs d’oeuvres du maitre Cronenberg. Toutefois, ton allusion à Spider m’intéresse… J’avais le souvenir d’un cru mineur, qui m’avait un peu ennuyé lors de ma découverte… J’en viens presque à douter de mon premier avis…
    The Artist m’étouffe un peu par tout le boucan qu’on a fait autour du film (d’ailleurs, les deux autres succès de l’année, Drive et Intouchables, me laissent un peu froid), il n’y en a que pour lui, alors que le film n’a pas grand chose de français. Un piège à oscar sur patte, un exercice complètement désincarné, mais formellement impeccable. J’aime assez l’analyse sur les compétences d’Hazanavicius, un très bon exploitant, qui se base sur des réactions déjà existantes pour mettre sa patte. De très belles séquences dans ce film, mais une trame copiée sur Une étoile est née, et des sentiments étouffés par une mise en scène trop pointilleuse, trop codifiée. Dujardin a des expressions faciales fantastiques, mais j’ai trouvé Bérénice Bejo complètement transparente.

    • zogarok Mai 26, 2012 à 10:46 #

      Pour les digressions psy, tu sera satisfait, voir comblé selon ton niveau d’exigence ou ton intérêt. Néanmoins, je ne te cache pas que nous sommes naturellement loin des chefs-d’oeuvres comme LE FESTIN NU, CRASH, FAUX-SEMBLANTS, mais ça, nous nous en doutions, et puis ça reste plus stimulant qu’un film standard ou même que A HISTORY OF VIOLENCE.

      J’ai adhéré profondément à SPIDER mais ton appréciation ne m’étonne pas : même si c’est peut-être le point de rupture expérimental de Cronenberg, c’est aussi un film très rugueux, pas forcément riche niveau scénario et ses intentions sont obscures. Ce trouble m’a plu, je me suis senti en immersion totale, mais il y a beaucoup de barrières qui sont peut-être autant de failles.

      « Piège à oscar », c’est très juste. Je ne le trouve pas si désincarné, parce qu’il y a beaucoup d’efforts sur la romance et les sentiments ambivalents de Dujardin, mais c’est tellement grossier qu’une distance s’installe. Dès lors, il y a beaucoup de vie, mais elle est simulée ; comme la tentative de suicide dans un décors à la TATIE DANIELLE, scène à laquelle on arrive pas à croire tellement le cheminement a été niais et les ficelles trop voyantes. L’hommage comprenait justement ça, l’exhibition des ficelles, mais l’échec est double : non seulement on voit bien pourquoi ce cinéma hollywoodien consensuel et euphorique est foncièrement superficiel voir désagréable dans le fond, mais en plus c’est un hommage assez littéral, presque « conceptuel » donc – tout en étant frivole.

      Sinon, Bérénice Bejo est très jolie.

  2. arielmonroe Mai 25, 2012 à 22:26 #

    The Artist… En voilà un qui ne mérite pas tant d’éloges et je suis bien content de trouver ce type de critique ici même si cela ne m’étonne pas. Un film qui fera jubiler les fans de Dujardin et sera un enfer pour les autres. Le scénario est lent, le film est trop long et ne raconte rien, la mise en scène ne fait que reprendre de bonnes manières sans inventivité… Pour moi c’est une arnaque et ce n’est pas le cinéma du XXIe siècle. Sinon, je suis content que la France obtienne un oscar même si c’est à ce prix, là-dessus il n’est pas lieu de se formaliser (en tout cas à mon point de vue).

    • zogarok Mai 26, 2012 à 10:40 #

      Niveau scénario, on est à 0,1, mais c’est tout à fait assumé. C’aurait donc du être une performance ; ça l’est en un sens. Ca n’empêche pas l’ennui, ni une certaine amertume naturellement éprouvée devant ce genre de produits porté au pinacle alors qu’il s’agit simplement d’un hommage surgonflé, artificiel et finalement, presque inhumain malgré tous ses bons sentiments, à une norme pas spécialement suprême – l’Hollywood des 40s/60s, ce cinéma qui vous tient les yeux fermés et le sourire jusqu’aux oreilles.

  3. 2flicsamiami Mai 30, 2012 à 11:44 #

    A Dangerous Method : J’ai adoré ce film, peut-être le meilleur dans cette trilogie « mainstream ». Je trouve ce film faussement simple, il cache une complexité et une profondeur que ton résumé souligne par ailleurs. Les liens et entre les personnages, ainsi que leurs vocations idéologiques et philosophiques m’ont passionné.

    The Artist : Ta critique rejoins certaines que j’ai pu lire à propose d’Hazanavicius. Comme tu le dis, il a construit sa réputation sur l’exploitation d’imageries pré-construits (tu cites bien justement Le Grand Détournement, qui est, peut-être, la preuve d’un manque d’assurance narratif du cinéaste).
    Après, j’ai été emporté par ce film, que je trouve techniquement magnifique, avec d’excellents acteurs, une excellente musique et un tragédie que je n’ai pas trouvé lourde.

    • zogarok Mai 30, 2012 à 16:43 #

      * pour A DANGEROUS = peut-être le meilleur de mon côté aussi, quoique j’avais beaucoup aimé LES PROMESSES DE L’OMBRE. Néanmoins, ce n’est pas cette Trilogie (qui n’en est pas une, rappelons-le) qui contribue à me faire aimer Cronenberg ; je la prend comme un supplément.

      * pour THE ARTIST = je crois que tu adhères assez franchement au cinéma classique US, ce qui n’est pas le cas de tous les blogueurs (parfois par facilité, pour des raisons « anticonformistes » très caricaturales et grossières – j’imagine que tu devines à quels blog(ueur)s je peux faire référence). Je n’ai rien pour ma part contre le cinéma commercial, ni même le divertissement putassier à l’occasion, c’est plutôt la machine à lisser les esprits et les points de vue qui me dérange, c’est d’ailleurs pour ça que je préfère encore TRANSFORMERS à un cinéma bourgeois (moraliste à la Haneke ou niaiseux comme une comédie de moeurs française).
      Le cinéma qu’évoque The Artist vise l’abstraction du quotidien et n’y parvient pas ou plus, parce que les recettes sont épuisées, les ficelles connues ; mais Hazanavicius se délecte de cette transparence, donc le problème n’est pas là. Il faut donc partager une certaine nostalgie, ou une connivence avec cet univers codifié, qu’un public masculin, jeune et plutôt orienté cinéma horrifique ou occidental éprouvera moins facilement.
      Dans un premier temps et à la condition qu’on ne lui prête aucune intention (type course aux « Awards » ou bien plutôt idéologique), The Artist est plutôt plaisant ; ensuite, il y a un décalage trop manifeste entre le déploiement et le souci du spectaculaire et la vacuité narrative, ainsi que l’absence d’univers et d’identité concrète ou indépendante. L’anxiété du personnage, qui devrait être un sujet, est traitée comme une toile de fond, que Hazanavicius illustre : le paysage apocalyptique, la détresse romantique, ne sont pas crédibles. On peut parler de film d’artisan sans inspiration ; méthodique et sincère, mais pas psychologue ni visionnaire.

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