THE WALKING DEAD *****

16 Mar

5sur5  Walking Dead est l’histoire d’un groupe de survivants dans un monde post-catastrophe où pullulent les zombies. Adaptation d’un comics culte pour la chaîne AMC après les succès Breaking Bad ou Mad Men, c’est devenu l’une des séries les plus appréciées et téléchargées.

Je l’ai découverte sur le tard, un soir il y a quelques mois. J’y allais sans aucune attente, elle m’a galvanisé. C’est une de ces fictions dans lesquelles on se sent pénétrer intégralement, envers laquelle un lien mental si fort se crée qu’on s’y sent organiquement relié. J’ai dévorée les trois saisons en à peine une semaine, profitant d’une courte séquence favorable à une telle boulimie. Ce genre de délectation est rare : j’ai ingurgitées de la sorte (sur un temps bien plus long) les premières saisons de South Park, mais dans ce cas il ne s’agissait encore que d’un divertissement. Et la nuit blanche passée à explorer la première saison de Twin Peaks ne m’avait pas englouti d’une telle manière. De rares spectacles ont pu trouver cet écho, car ils étaient pour moi un pur miroir : Hannibal, Battle Royale, Hellraiser forcent un contact, dépassent le cadre habituel, même celui des chefs-d’oeuvres les plus justes et puissants, pour instaurer un rapport direct et surtout, une proximité impudente. Leur métaphysique spontanée semble issue de mon rapport au réel ou des paysages de mon esprit. Forcément, The Walking Dead est l’une de mes séries favorites.

Walking Dead est le survival brut, pur, absolu. Il met en scène le combat permanent pour la survie, lorsque chaque instant de l’existence se déroule dans l’urgence. Sous la menace, perpétuellement éveillés et forcés d’être agiles, nous avons le devoir d’agir. Cette situation cultive l’attachement émotionnel (aux personnages et finalement, à ce contexte où il faut se battre, conquérir et affirmer), stimule l’action. L’implication est totale car contrairement aux autres séries où nous sommes réduits à l’état d’accompagnants passifs, ici nous sommes des conseillers réduits au silence. La nécessité s’infuse en nous ; le rapport à l’atmosphère est double, avec la sensation de l’adopter et celle de s’y fondre ; à la mort de l’égo, s’ajoute l’exaltation de l’instinct.

Dans cette configuration, les personnages ne peuvent qu’être forts ou se dépasser. Nous marchons à leurs côtés, impliqués – ou alors nous ne sommes que des laborantins. Tout s’expose avec une transparence parfaite ; pas la peine de masquer ses affects. On ne triche pas. Aucun intérêt. La vie est trop courte et on a plus les moyens. Dans un instant peut-être, on sera mort ou victorieux.

Alors il faut prendre la décision qui s’impose. Prendre des risques. Chasser le doute. Écraser ce qui s’écarte des instincts. Être guidé par la volonté seule. Être responsable de ses actes, en adéquation avec ses idées, ici et maintenant, et pour plus tard, car les implications sont partout. Tout est crucial, les choix définitifs et catégoriques sont le lot de chaque instant.

Explicite et tranchante, Walking Dead est simultanément raffinée. Pudeur et pugnacité mêlées. Pas de pièges, pas de faux-semblants, pas de mystères. C’est pour sa matière humaine que la série fascine autant. Car elle confronte à la véritable individualité, aux dilemmes moraux, convoque les tripes. Quand chacun sait que la lâcheté est coupable et qu’hors du combat pour la vie, le reste est un luxe ou un accessoire. Ce niveau d’existence hystérise et rend aussi plus vivant, sûr de soi, clairement soi, qu’aucun autre.

Saison 1 ****

Prise de contact violente et intense. Rick se réveille à l’hôpital et découvre un monde ravagé par une épidémie. Il trouve quelques survivants et devient le leader du groupe. Il s’agit de fuir, à l’autre bout du pays, où peut-être se trouve des ressources et la délivrance, qui peut-être a été épargné. L’environnement est semé d’embûches et surtout de zombies, que nous pouvons rejoindre. Il y a aussi tous les problèmes humains et ces mauvaises passions que le drame et l’anomie ne peuvent contenir. Tout est menace, tout est révélateur. C’est le désert, il faut tout défricher et on ne peux plus rien cacher. 

Saison 2 *****

Période d’accalmie temporaire. Le groupe trouve refuge à la campagne, dans une ferme auprès d’une famille et notamment de Herschel, le vieux propriétaire. Il est temps pour les survivants de se découvrir, d’apprendre à vivre ensemble ; de retrouver aussi, une certaine paix, de découvrir la possible harmonie entre eux et l’environnement, le temps aussi de revenir sur soi.

Chacune des trois premières saisons est une merveille. Impossible d’opérer une hiérarchie tant tout est pertinent. D’un point de vue empirique, cette saison 2 est moins virulente que la première, moins tendue. Elle est aussi bouleversante, autant par les intrigues entre personnages que par le rapport nouveau établi à la Nature, entre foi et sérénité d’une part, vigilance et curiosité d’une autre. Alors qu’on bondissait sans relâche dans la saison 1, ici la langue des tripes est plus nuancée, trouve une expression totale. 

Saison 3 *****

Cette saison a convaincus même les plus acerbes ; elle met en scène la tentative de reconstruction, de reformation du contrat social et d’ébauche de la civilisation. Rick et sa bande font d’une ancienne prison leur pied-à-terre, tout en entrant en contact avec une cité organisée contenant d’autres survivants, maintenue sous la coupe du Gouverneur à l’écart d’un monde devenu hostile et imprévisible.

Dans cette saison, le problème, c’est les hommes. Ils sont capables du meilleur et incapables de ne pas le mettre en péril. Les principes et besoins futiles viennent toujours à bout des constructions et des efforts les plus honnêtes. Le danger est moins auprès des zombies que dans l’affrontement entre deux groupes tâchant de se reconstruire, l’un aux mains de survivants, l’autre occupé à renaître docilement.

La saison est aussi marquée par le chaos généré par Merle : on constate l’effet papillon, engendré par un cas de conscience pour un criminel et un dégénéré. Une tragédie, quand l’heure est aux choix lucides. Et au besoin de respecter les nécessités et la clarté qu’offre une condition d’existence si pure, si impitoyable. 

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4 Réponses to “THE WALKING DEAD *****”

  1. 2flicsamiami mars 16, 2014 à 11:36 #

    Je n’ai vu que la première saison, que j’ai bien aimé la toile des relations humaines construite par les scénaristes – comme tu le dis, c’est l’aspect dramatique qui l’emporte davantage que l’horreur.
    J’ai les deux autres saisons en ma possession, mais j’ai toujours du mal à suivre une série avec assiduité.

    • zogarok mars 21, 2014 à 19:34 #

      Je ne sais pas ce que tu penseras de la seconde saison – mais au moins tu apprécieras sans doute sa beauté, son côté méditatif et Herschel, personnage très dur et puriste, mais aussi gardien de l’intégrité et de la perfection de son environnement.
      Et sinon, y allez quand même pour voir la fameuse sinon indispensable saison 3 !

  2. chonchon44 mars 17, 2014 à 10:57 #

    Idem. J’ai vu deux saisons et je commence à m’ennuyer. Ils délayent un maximum les épisodes… dans certains il ne se passe quasiment rien ! Au final, je préfère la BD, ou encore Fléau de Stephen King.

    • zogarok mars 21, 2014 à 19:28 #

      Il y a un relatif manque d’action par endroits, notamment dans la saison 2. Mais les enjeux humains sont forts et la tension ne relâche jamais ; malheureusement, si elle reste présente dans la saison 4, c’est surtout en raison du contexte. Car pour la deuxième partie de la saison 4, je regrette… de devoir te rejoindre. Ce qui me frustre bien étant donné la pureté de mon estime pour cette série jusque-là.

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